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Alimentation
AIDEZ VOS GÉNISSES À FAIRE CARRIÈRE

Rigoureuse, sans être forcément compliquée, l’alimentation des génisses conditionne la réussite du vêlage précoce. Tout excès ou retard de croissance aura des répercussions sur la future carrière de vos animaux.

Une génisse trop grasse au vêlage se voit confrontée à de nombreux risques pour
débuter sa carrière. Les difficultés de vêlage, baisses d’appétit et oedèmes mammaires
sont les problèmes les plus courants.
Une génisse trop grasse au vêlage se voit confrontée à de nombreux risques pour
débuter sa carrière. Les difficultés de vêlage, baisses d’appétit et oedèmes mammaires
sont les problèmes les plus courants.
© S. Roupnel

Si l’on s’accorde aujourd’hui à considérer le vêlage précoce comme rentable, dans les faits celui-ci reste peu pratiqué. D’après l’Institut de l’élevage, les génisses laitières vêlent en moyenne à 31 mois. C’est à peine mieux en race Prim’holstein avec une moyenne de 30 mois(1).
Force est de reconnaître que la conduite de l’élevage des génisses en vêlage précoce est exigeante, notamment en termes d’alimentation. D’autant qu’il faut concilier différents objectifs : faire vêler des génisses avec un développement suffisant tout en maîtrisant le coût d’élevage et le temps de travail. La réussite de la phase lactée est primordiale. Pour autant, la période qui s’étend du sevrage au vêlage ne doit pas être négligée. Elle contribue à la valorisation du potentiel de production et de reproduction des génisses. Elle conditionne également la longévité de l’animal au sein du troupeau. Il est donc important d’optimiser les conditions d’alimentation et de croissance pendant les différentes étapes de cette phase d’élevage.
Ces étapes s’articulent autour d’événements clés dans la vie de la génisse : le sevrage, la puberté et la mise à la reproduction. À chaque période, correspondent des besoins en termes d’apports et de densité énergétique de la ration (voir tableau page suivante). Mais aussi des risques pour l’animal en cas de non-respect des objectifs de croissance dont le choix est guidé par l’âge et le poids de la génisse au vêlage.

INTERDIRE LES ARRÊTS DE CROISSANCE
Une maturité sexuelle et un développement corporel précoces rendent possible la pratique d’un vêlage dès 24 mois. Mais quelques règles sont toutefois de mise. « On veillera notamment à éviter les périodes de nongain de poids, recommande Jean-Yves Porhiel, ingénieur au pôle herbivores des chambres d’agriculture de Bretagne. Pour un vêlage précoce, un niveau de croissance minimum doit être maintenu tout au long de l’élevage de la génisse. La croissance compensatrice reste possible, mais elle ne sera utilisable qu’avec de faibles restrictions énergétiques. Mieux vaut ne pas l’intégrer dans un programme de vêlage précoce. » Sans excès ni insuffisance, l’alimentation de la génisse exige un minimum de rigueur en termes de quantités distribuées mais aussi d’observation des animaux. Selon Pierre- Emmanuel Radigue, vétérinaire, « la gestion de l’alimentation de la génisse en vêlage précoce doit éviter deux écueils. D’une part, le manque d’énergie dans la ration, en l’absence d’une complémentation efficace de fourrages fibreux. Dans ce cas, la croissance sera lente mais l’animal ne développera pas de gros problèmes de santé. Au contraire, une ration riche en concentrés risque de placer l’animal en acidose chronique. Surtout avec l’utilisation d’aliments très fermentescibles. Les effets à long terme sont très graves. La sensibilité de l’animal aux infections et aux problèmes métaboliques est accrue ce qui risque de compromettre sa longévité. »

EVITER L’ÉCUEIL DE L’ACIDOSE
Avec des rythmes de croissance et donc des régimes alimentaires et des complémentations qui diffèrent selon les phases d’élevage, le regroupement en lots apparaît indispensable. De fait, les besoins énergétiques augmentent avec l’âge alors que la densité énergétique de la ration diminue. Cette dernière avoisine 1 UF/kg de matière sèche pour les plus jeunes pour descendre à 0,8 UF pour les plus âgées.Voici les grands principes de chaque phase d’élevage :
■ Jusqu’à 4 mois, il faut maintenir un niveau de croissance élevé. Environ 900 grammes par jour, pour atteindre un poids de 150 kg à 4 mois. Les croissances faibles pénalisent le développement de l’animal. Elles ne permettront pas d’atteindre l’objectif de poids à l’insémination. « Il faut réussir à maintenir des croissances élevées malgré d’éventuelles difficultés, notamment autour du sevrage », met en garde Jean-Yves Porhiel. Pendant ces quatre mois, un GMQ élevé est l’assurance d’une bonne production laitière, d’une meilleure croissance en première lactation et d’un poids adulte plus élevé. C’est aussi le gage d’une moindre mortalité pendant la vie active.
■ La phase pré-pubère est une période à risque. La période pré-pubère commence vers 4 mois, 6 mois pour les races les plus tardives. Elle s’étendra jusqu’à l’arrivée de la puberté. Aux alentours de 10 mois en race Prim’holstein, 12 mois en Normande et vers 14 mois en race Montbéliarde. Avec des variations liées au niveau de croissance du jeune animal. La puberté est d’autant plus précoce que le gain de poids vif depuis la naissance est élevé. « Pendant cette période à risque, il convient de veiller aux déséquilibres alimentaires et aux régimes trop énergétiques, rappelle Jean-Yves Porhiel. Un gain de poids de 700 à 750 g par jour semble idéal… Le rationnement est capital afin d’éviter un engraissement excessif très pénalisant pour l’animal. Il est exclu de rattraper ici d’éventuelles mauvaises croissances du veau. Des croissances trop soutenues favorisent le développement du tissu adipeux au détriment du tissu sécréteur de la mamelle et de l’appareil génital. » La production laitière peut donc être pénalisée. Notons que les tissus de stockage adipeux, notamment au niveau du fanon, qui se développent pendant la phase pré-pubère, persistent, malgré une éventuelle perte de poids de l’animal. « Ce dernier restera enclin au sur-engraissement tout au long de sa carrière », souligne Jean-Yves Porhiel.
■ De la puberté à la mise à reproduction, tout est possible. Restriction ou rattrapage, ces quelques mois laissent davantage de liberté pour jouer sur l’alimentation sans risques. La mise à reproduction est déterminée en fonction de l’âge et du développement. L’idéal est d’atteindre 400 kg à 15 mois, soit 60 % du poids adulte ou 1,70 m de tour de poitrine.
■ À partir de 15 mois, il faut viser 850 g par jour. Sur cette dernière phase, les croissances sont plus élevées. Les besoins de gestation viennent progressivement s’ajouter aux besoins de croissance. Si, au départ, l’organisme donne priorité au développement musculaire, dès 18 mois toute stimulation de la croissance aboutira à fabriquer plus de gras que de muscle et de squelette. Pendant cette période, mieux vaut ne pas se précipiter même s’il y a eu des retards sur des étapes antérieures. La santé et la longévité de l’animal peuvent en effet être détériorées. Les risques sont notamment importants au moment du vêlage. Les génisses grasses ont un tissu péri-vaginal encombré par la graisse qui perturbe le bon déroulement du vêlage. D’autant que les veaux sont souvent lourds. Fréquente chez les génisses grasses, la baisse d’appétit dans les semaines postpartum fait courir un risque de maladie métabolique à l’animal. Les oedèmes sont aussi plus courants. Force est de constater que la production laitière n’est pas améliorée chez les vaches primipares plus lourdes et plus grasses. A contrario, si des croissances trop faibles risquent de limiter la production laitière, le vêlage est souvent facilité. « Mais attention aux pertes d’état et aux mauvaises croissances pendant la première lactation sur des génisses légères lorsque le niveau azoté élevé de la ration stimule trop la production laitière », note Jean-Yves Porhiel. Avec le risque aussi que ces femelles n’expriment pas de chaleurs. L’idéal est de viser 600 kg avant le premier vêlage soit 90 % du poids adulte et un poids vif d’environ 530 kg après le vêlage. Il convient d’éviter toute restriction alimentaire pendant le dernier mois car le risque de vêlage difficile augmente. Au-delà du niveau énergétique de la ration, certains déséquilibres en azote, minéraux, vitamines sont à l’origine de pathologies qui vont de l’avortement aux problèmes de fécondité, en passant par les troubles métaboliques. ■ Sandra Roupnel

(1) Statistiques de l’Institut de l’élevage d’après les résultats du Contrôle laitier 2006.

P38 Des pesées pour gagner du temps et de l’argent - Contrôle de croissance

P40 L’observation des animaux est un outil de choix - Dérives alimentaires

P42 De la paille à l’ensilage de maïs, tout est possible ! - Exemples de rations

P46 « Nos génisses pèsent 210 kg à 6 mois » - Au Gaec Le Coquelait, en Loire-Atlantique

P48 « Nous distribuons deux balles de foin tous les trois jours » - Au Gaec Séchet-Guillemet, dans le Maine-et-Loire

P50 « Les rations des génisses doivent avant tout être efficaces » - À l’EARL du Caussey, dans le Calvados

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