Syncopac : une page se tourne pour les fabricants coopératifs
Daniel Rabiller quitte la présidence de l’organisation. En guise de tour d’honneur, il revient sur les moments forts de ses onze années de mandat.
LES ADHÉRENTS du Syncopac (Fédération nationale des coopératives de production et d’alimentation animales) se sont réunis, le 23 mai dernier à Paris, pour une «assemblée générale qui peut être qualifiée d’historique», selon son directeur Pierre Merlot. Le conseil a en effet adopté la fusion avec Coop de France (cf. “Actualité de la semaine” de notre édition du 25 mai 2006). Cette décision constitue «la première démarche juridique et officielle de la création» de l’hyperstructure coopérative. D’autres fédérations devraient lui emboîter le pas. Cette réorganisation marque un nouveau départ pour le Syncopac qui est revenu sur les principaux événements de cette dernière décennie, «turbulente et très enrichissante» pour Daniel Rabiller qui, après onze ans à la présidence, a décidé de se retirer.
La baisse de production d’aliments composés se poursuit
En 2005, la production française d’aliments composés a baissé de 2,4 %, à 22 Mt. Après une période de croissance, le tonnage national recule depuis quatre ans, du fait notamment des aliments porcins (-3,4 %) et volailles (-3 %). Avec une perte de 1,7 million de tonnes depuis 2001, il s’approche de celui de 1996. La France conserve néanmoins sa place de premier producteur européen, «peut-être plus pour longtemps», remarque Pierre Merlot. Juste derrière, l’Espagne continue de monter en puissance avec 21,1 millions de tonnes, contre 15 millions de tonnes en 2001.
En parallèle, le secteur s’est concentré en France. Vingt groupes assurent trois-quarts de la production qui, avec 310 usines (416 en 1996), reste atomisée par rapport à l’agroalimentaire. Aucun leader ne s’est imposé en France, ni en Europe, ce qui constitue une faiblesse sur des marchés mondialisés.
Pour une meilleure communication dans la prévention des crises
En dix ans, la profession a en effet connu «de grands bouleversements» comme l’a rappelé Daniel Rabiller dans son allocution informelle de clôture. Libéralisation des échanges internationaux, refonte de la Politique agricole commune et crises sanitaires à répétition ont entraîné «de profondes remises en cause de notre métier et de ses relations avec la société», note-t-il. Impossible pour lui de ne pas évoquer, alors que 2006 marque le dixième anniversaire du déclenchement de la crise de l’ESB, le dossier des farines animales dont la suppression dès 1998 a valu à la profession «de fortes pressions». La fédération a été amenée à afficher d’importantes prises de positions, comme celle qui a récemment conduit à la mise en place du guide de production d’aliments médicamenteux, «que l’on a été à deux doigts de ne plus pouvoir fabriquer». Autres événements majeurs de la décennie : la création du Conseil scientifique de la nutrition animale et celle de Réséda Réséda constitue un réseau de partenaires des filières de production animale qui souhaitent contribuer collectivement au développement des guides de bonnes pratiques professionnels, à leur cohérence et à leur application., reflet de la prise de conscience d’une responsabilité de filière. L’escalade médiatique qui a accompagné chaque crise, comme celle de la grippe aviaire, le conduit à insister sur «l’urgence de mettre en place une pédagogie de l’expertise collective sur les risques liés à l’alimentation». Le Conseil national de l’alimentation a, à cet égard, pris l’initiative de conduire une réflexion commune pour une communication plus efficace dans la prévention des crises.
L’élaboration, dès 2002, du guide de bonnes pratiques, qui «a entraîné une remise en cause profonde des méthodes de fabrication», est également une avancée importante, relevée par l’ex-président. Une version réactualisée avec les exigences du réglement “Hygiène” est en cours d’examen par les pouvoirs publics. Elle devrait être diffusée avant l’été. Et Daniel Rabiller de conclure ce flash-back : «Nous n’avons pas à rougir du travail accompli malgré les attaques dont nous avons fait l’objet !»
Biocarburants, clefs de l’indépendance protéique
Le secteur de l’alimentation animale «doit en permanence s’adapter» et le développement des biocarburants, évoqué lors d’une table ronde, devrait encore le prouver. Les 11 millions de tonnes d’éthanol prévues d’ici 2008 en Europe ne devraient mobiliser que 12 à 15 % des surfaces de betteraves et de céréales. La capacité est «très facile à satisfaire» sans pénaliser les débouchés alimentaires, assure Alain d’Anselme, président du Syndicat national des producteurs d’alcool agricole. Rien à craindre non plus du côté du biodiesel. Le développement des carburants alternatifs, générant des coproduits, serait même une opportunité pour la nutrition animale. Quelques 11 millions de tonnes de pulpes de betterave et de drêches de céréales d’origine européenne devraient arriver sur le marché. Reste à étalonner l’intérêt technologique et économique de ces produits riches en protéines vis-à-vis des autres denrées. L’expérience américaine pour le maïs sera d’ailleurs précieuse. Côté prix, la progression des volumes devrait entraîner une décote.
Pour le colza, il va falloir poursuivre le travail de valorisation du tourteau et «faire sauter les verrous» d’incorporation, explique Georges Vermeersch, directeur de la Prospective et des Innovations de Sofiproteol. En ligne de mire de la substitution : les tourteaux de soja. Alors que leur importation n’a cessé de croître ces dernières années, cet afflux de produits pourrait permettre à l’Union européenne de réduire sa dépendance protéique.