Commerce blé 2024-2025 : l’Argentine est en mesure de concurrencer la France sur le Maghreb
Un régime pluviométrique porteur dans les Pampas nourrit les espoirs des exportateurs qui préparent le retour en force du blé argentin au Maghreb.
Un régime pluviométrique porteur dans les Pampas nourrit les espoirs des exportateurs qui préparent le retour en force du blé argentin au Maghreb.
Avec ses prévisions de récolte de 20,4 millions de tonnes (Mt) pour la campagne argentine de blé 2024-2025 et son estimation de stocks de report particulièrement élevés à 4,2 Mt, la Bourse du commerce de Rosario (BCR) envisage des excédents exportables depuis l’Argentine de 13,9 Mt.
Un disponible exportable en blé argentin de 13,9 millions de tonnes sur la campagne 2024-2025
Ces embarquements partiront essentiellement depuis les ports de Necochea et de Bahía Blanca, dont près de la moitié vers le Brésil sous forme de farines. Ce serait la deuxième plus importante performance à l’export de l’origine argentine en blé après son record de près de 15 Mt, réalisé à l’issue de la campagne 2021-2022.
L'Afrique du Nord en ligne de mire
Sachant que les blés argentins ont coutume de « traverser l’Atlantique » dès que leur solde exportable dépasse le cap des 10 Mt, on comprendra qu’ils sont attendus cette année en Afrique du Nord comme rarement auparavant.
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Au cours de la seule première quinzaine d’octobre, les blés argentins ont trouvé preneurs à l’issue d’appels d’offres pour un volume total de 1,8 Mt réparties entre des achats de l’Arabie saoudite (+700 000 t), l’Algérie (+500 000 t), le Japon (+250 000 t), la Thaïlande (180 000 t) et la Jordanie (90 000 t), selon la BCR. Son expert en négoce de blé, Guido D’Angelo, rappelle à La Dépêche Le petit meunier que « les blés argentins ont été absents du marché nord-africain lors des deux dernières campagnes à cause de la sécheresse qui a sévi dans les Pampas. Mais ils devraient faire un retour notable au Maghreb dès janvier prochain ».
Les blés argentins devraient faire un retour notable au Maghreb dès janvier prochain.
Après la sécheresse, une abondance de précipitations
Le piètre bilan des exportations argentines de blé de la campagne 2023-2024, laquelle s’achève tout juste, à hauteur de 7 Mt, a été destiné majoritairement au Brésil, puis au sud-est de l’Asie (Indonésie, Vietnam, Malaisie), au reste de l’Amérique du Sud (Colombie, Équateur, Pérou) et à quelques pays africains (Kenya, Mozambique, Tanzanie, Ouganda). Cette petite performance de la part d’un pays qui fut autrefois le « grenier à blé du monde », s’explique par une récolte passée médiocre, à hauteur de 15,1 Mt à cause d’une sécheresse historique, selon María Marta Rebizo, économiste-en-cheffe du Centre des exportateurs de céréales de l’Argentine (CEC).
Pour la campagne 2024-2025, il en va tout autrement. Des pluies généreuses tombées la veille des semis puis régulièrement tout au long du cycle des cultures, y compris ces derniers jours, c’est-à-dire à deux mois des récoltes, ont sauvé la mise des producteurs de blé de la région pampéenne. María Marta Rebizo se montre davantage prudente que ses pairs de la BCR. Selon elle, la moisson de blé argentine à venir devrait cumuler à 18,6 Mt dont entre 11 et 12 Mt pourraient être exportées. « À la fin octobre, les exportateurs basés en Argentine avaient déjà acquis plus de 3 Mt de ce blé nouveau », précise-t-elle.
De hauts rendements mais une qualité qui laisse à désirer
Le sud-est de la province de Buenos Aires est le premier bassin céréalier du pays. Consulté sur place, l’agronome Gonzalo Rodera, conseiller au sein de la Coopérative agricole de Tres Arroyos, affirme à La Dépêche Le petit meunier que les rendements attendus à partir de la mi-décembre seront « bons, voire très bons » autour de 45 quintaux par hectare (q/ha), jusqu’à 70 q/ha sur la côte atlantique, et autour de 35 q/ha dans un rayon de 70 km autour de la ville de Tres Arroyos. Les céréaliers de cette région visent avant tout de hauts rendements avec des variétés sélectionnées en ce sens.
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La meunerie locale regrette que ces variétés n'allient pas haut rendement et qualité boulangère. De fait, celle-ci laisserait globalement à désirer. « Le poids spécifique minimum exigé par l’industrie argentine est de 73 kg/hl, mais même à 76 kg/hl, de tels indices occasionneraient une décote salée, selon Gonzalo Rodera. Le prix plein de la tonne de blé serait payé aux céréaliers à partir de 79 kg/hl », précise Gonzalo Rodera.
Une taxe à l'exportation de 12 %
Et Gonzalo Rodera de continuer : « Le prix du blé physique rendu à Necochea se situe depuis plusieurs mois entre 200 et 230 $/t au taux de change officiel. La conversion en euros sonnants et trébuchants donne une fourchette de 153 € et 176 €. Mais l’existence d’une taxe à l’export de 12 % sur les embarquements de blé fait que la valeur FOB des blés argentins demeure onéreuse malgré une qualité passable non seulement à cause des choix variétaux mais aussi par l’absence de ségrégation des lots par les stockeurs. »