Révélation
Impossible d’y échapper : en ce cœur de l’été, où tous les indicateurs économiques sont au rouge —avec en particulier l’emballement du cours du baril de brut avec de probables répercussions négatives en chaîne— et une rentrée sociale qui s’annonce chaude, enfin une bonne nouvelle ! Un véritable arc-en-ciel dans un horizon orageux, mettant du baume au cœur de nos concitoyens, qui jusque-là selon des études comparatives battaient des records de pessimisme en Europe. Même si en ce mois d’août vous avez mis l’actualité entre parenthèses, les doigts de pied en éventail, inévitablement vous êtes au courant de cet évènement majeur : IL REVIENT ! Comme le Messie ou Zorro. Incroyable mais vrai, Zidane, notre Zizou des heures de gloire du foot triomphant black-blanc-beur, revient dans l’équipe de France de football ! Et pas n’importe comment. Qu’on en juge : une décision qui —selon ses étonnantes explications à France Football— relève de «l’irrationnel» et du «mystique». Zizou, comme jadis Jeanne d’Arc, voire plus près de nous Charles de Gaulle, aurait entendu une voix, une nuit à trois heures du matin, l’incitant fermement sinon à sauver la France du moins à revenir chez les Bleus : «c’est une force irrépressible qui s’est emparée de moi à ce moment-là. Je devais obéir à la voix qui me conseillait ». Les zizoulogues comme les footeux ordinaires sont encore —on les comprend— sous le choc. Ils ont peine à croire que leur idole —modèle d’équilibre mental, de gentillesse, de modestie et d’altruisme— marcherait à côté de ses crampons. Un jeune homme bien de sa personne, un peu timide, très fortuné, gérant bien ses affaires, bref, qui fait l’unanimité. Et en qui toutes les mères de France et de Navarre voient le gendre idéal. Depuis plusieurs années en tête du Top 50 des personnalités préférées des Français, bien que détrôné provisoirement par Yannick Noah (mais dans un sondage effectué —il est vrai— avant la Révélation). Sur le podium de nos espoirs footballistiques entourant Zizou, Lilian Thuram et Claude Makelele, deux autres retraités trentenaires et millionnaires sont de retour sous les drapeaux du foot tricolore pour sauver l’équipe gauloise en danger, à quelques semaines avant d’entrer dans la dernière ligne droite des qualifications au Mondial 2006. Qu’elles se le disent : les équipes des îles Feroë, de Chypre, de Suisse, d’Irlande et d’Israël doivent maintenant se tenir à carreau ! Le Premier ministre, Dominique de Villepin, a littéralement exulté devant cet inespéré retour, en espérant une émulation pour nos concitoyens : «Quand les choses sont difficiles, tout le monde se mobilise et chacun prend sa part.» A l’Elysée, comme à la Mairie de Paris après l’abattement, on reprend aussi espoir : balayé l’échec cuisant de la capitale pour l’obtention des Jeux 2012, d’autant que nos athlètes au championnat du monde d’Helsinki ont fait une belle moisson de médailles. En résumé, comme l’écrit, dithyrambique Le Parisien : «Zidane redonne espoir à tout un peuple !» Mi figue-mi-raisin, Thierry Henry, autre idole du foot commente pour sa part : «En France, tout le monde réalise que Dieu existe, et qu’il est de retour en équipe de France.» Malgré ces paroles iconoclastes, Zizou fera-t-il une apparition au Journées mondiales de la jeunesse de Cologne, à côté du pape Benoît XVI qui, hors de Rome, inaugure ainsi son pontificat ? Avouez-le, le foot étant devenu une véritable religion planétaire, ce serait en ces temps de montée des fanatismes, un bel exemple d’œcuménisme. Un plus, aussi, pour les organisateurs de ce grand rassemblement qui se tient tous les deux ans dans un pays différent depuis son lancement en 1985 par Jean-Paul II. Il va sans dire que les puissants sponsors de Saint Zizou lui donneraient leur bénédiction !