Pompon
Il est bien connu que nos concitoyens sont plus ou moins fâchés avec la géographie. Alors ne leur demandez surtout pas —même dans un de ces quiz télévisés dont ils raffolent— quel rapport il peut y avoir entre le Texas et le Swaziland ! On sait que le premier, s’enorgueillit d’être le «Lone Star State» deuxième état des Etats-Unis pour sa superficie après l’Alaska, premier producteur de pétrole, de gaz naturel, de coton, de riz, sorgho, bétail : Dallas ton univers impitoyable ! Quant au second, c’est un minuscule et pauvre royaume d’Afrique orientale enclavé entre la Mozambique et l’Afrique du Sud, membre du Commonwealth, dont la capitale est la bien connue Mbabane. Alors quel rapport entre Texas et Swaziland ? Vous donnez votre langue au chat ? Cela est bien excusable. Le point commun entre le Texas et le Swaziland, c’est leur actualité par rapport aux… pom-pom girls. Ainsi, le Texas, cet état sudiste et très conservateur, où George W. Bush possède d’ailleurs son ranch, est célèbre pour ses escouades de majorettes supportrices d’équipes locales du très viril football américain. Qui n’a jamais entendu parler des pom-pom girls des Dallas Cowboys ? Une véritable institution créée dans les 70’s et devenue un phénomène de société de l’Atlantique au Pacifique. Copiée d’ailleurs un peu partout dans le monde. Or, le parlement d’Austin, la capitale de cet état à majorité républicaine, avait envisagé de promulguer une loi visant à interdire le port de certains vêtements et mini-jupes par les pom-pom girls. Ils étaient en effet jugés trop sexy par les vertueux parlementaires texans, aiguillonnés par le lobby des ligues de vertu locales et les tartuffes de tout poil. Un point de vue largement partagé d’ailleurs par les représentants démocrates de cet état, mais combattu et ce avec succès jusqu’à présent par l’ACLU (American Civil Union), la plus grande organisation américaine de défense des droits civiques. Comme quoi, il n’y a pas qu’au pays des ayatollahs et du ministre contre le vice et pour la vertu, ou encore au royaume des Wahabites avec sa police des mœurs que certains pisse-vinaigre sévissent… Cela dit, vous êtes en droit de vous interroger : quel rapport avec le Swaziland ? C’est une dépêche d’agence qui nous l’apprend. Imaginez-vous que Mswati III, le bon gros roi du Swaziland vient de mettre fin au calvaire de ses jeunes sujettes vierges, qui depuis 2001 devaient obligatoirement porter et ce jusqu’en 2006, de hideux pompons de laine, d’où leur surnom de : «pom-pom girls». Ces derniers indiquant aux mâles, qu’elles étaient interdites de toute relation sexuelle. Et ce, pour combattre la pandémie du sida qui frappe 40 % de la population du pays. En cas d’infraction à la règle, la famille de la jeune fille fautive devait payer une amende d’une vache. Et une vache dans l’ancien royaume des Ngwane, un pays misérable, ce n’est pas rien ! A tout seigneur, tout honneur, Mswati III a profité de la levée de l’interdit (son interdit) pour prendre une nouvelle et très jeune épouse —la douzième— et il s’est symboliquement imposé une amende d’une vache au cours d’une grande fête, durant laquelle les pompons des «pom-pom girls» ont été brûlés en un vaste autodafé. Mswati III est encore loin de battre le record de son aïeul Sobhuza II, qui a eu 112 épouses légitimes et environ 600 enfants. Il faut savoir que la polygamie dans ce pays non seulement est autorisée, mais est la règle commune. Les heureuses élues du roi portant le titre très envié de «mère de la nation». Ce qui dans cette société tribale représente en quelque sorte… le pompon suprême.