Organismes génétiquement modifiés
Le conflit s’intensifie, Jean-Louis Borloo promet une loi et une haute autorité
Après un été des plus agités, le ministre de l’écologie s’engage sur la définition d’un cadre législatif, après le Grenelle de l’Environnement
IMMOBILISME. Malgré un nouvel été marqué par de nombreux fauchages, les appels répétés d’organisations écologistes opposées aux OGM, ou d’entreprises et de syndicats majoritaires partisans, le gouvernement reste sourd et s’est contenté de multiplier les annonces émanant des ministères de l’Agriculture, de la Recherche ou de l’écologie et du Développement Durable, sans se prononcer clairement sur la question. Ce dernier s’est toutefois montré plus prolixe avec l’annonce d’une loi qui s’appuiera sur les conclusions du Grenelle de l’Environnement.
Création d’une loi et d’une haute autorité sur les OGM
Particulièrement sollicité par les acteurs du dossier OGM, le ministère de l’écologie et du Développement Durable, qui a reçu début août les faucheurs volontaires, espérant vainement obtenir un moratoire, a annoncé l’élaboration d’une loi sur les OGM qui s’appuiera sur les débats du Grenelle de l’environnement dont les conclusions devraient être présentées fin octobre ou début novembre. « Oui, on va faire une loi » a déclaré, sur RTL le 23 août, le ministre de l’écologie Jean-Louis Borloo. Et d’ajouter : « on est dans une situation qui est complètement hypocrite en France, on n’a pas osé faire de loi pour transcrire la directive européenne, on a fait un décret », en référence à l’abandon du projet de loi par le précédent gouvernement, au début de l’année.
Cinq jours plus tard, Jean-Louis Borloo s’est de nouveau exprimé pour annoncer, cette fois, la création d’une « haute autorité » sur les organismes génétiquement modifiés, « indiscutable » a-t-il précisé. Il s’est à cette occasion prononcé « pour une transparence totale et responsable » sur les cultures transgéniques en plein champ. « Certains maïs posent problème, mais il ne faut pas mélanger la commercialisation d’un produit et la recherche qui peut sauver des vies », a-t-il expliqué. Une distinction étonnante de la part du gouvernement qui a pourtant laissé planter 20.000 ha de maïs BT alors que plusieurs groupes écologistes ou syndicaux réclamaient un moratoire lors des semis.
Toutes ces déclarations n’ont pas suffi pour calmer les résistants aux OGM. Pour le collectif des faucheurs volontaires, sans moratoire, les actions perdureront, assure le mouvement anti-OGM. Du côté des politiques, l’opposition a réitéré la nécessité d’un moratoire. Ainsi le 28 août, Philippe Martin, chargé du développement durable au Parti socialiste, a vivement attaqué le ministre de l’écologie actuel : «Jean-Louis Borloo fait une annonce par jour sur les OGM mais il oublie de faire la seule attendue, celle d’un moratoire, (…), la seule chose qui apaiserait le climat délétère entre agriculteurs ».
Un été 2007 marqué par un durcissement du conflit pro et anti-OGM
Syndicats de producteurs, AGPM en tête, avaient prévenu le gouvernement au début de l’été des éventuels dérapages qui pourraient intervenir en cas de nouveaux fauchages de parcelles transgéniques. Et ce que l’on observe désormais chaque année s’est reproduit en 2007. De nombreuses parcelles de maïs OGM ont été « neutralisées » par le collectif des faucheurs volontaires, qui a prévenu, par la voix de José Bové, « qu’en l’absence de moratoire, les actions continueront ». Les ministres de la Recherche et de l’Agriculture ont fermement condamné ces actions, par communiqué de presse. Rien de nouveau depuis le début du conflit entre pro et anti-OGM, jusqu’à cette journée du 5 août où Claude Lagorce, producteur de maïs OGM dans le Lot, s’est donné la mort alors qu’était prévu ce même jour un pique-nique organisé par les faucheurs en face de sa parcelle. Par respect pour la victime dont on ignore encore les réelles motivations de ce geste, ces derniers ont immédiatement annulé leur manifestation. La FNSEA et les JA ont de leur côté dénoncé « l’immunité dont bénéficient les militants anti-OGM » n’hésitant pas à leur attribuer la responsabilité de ce drame. Ils ont, une énième fois, demandé au gouvernement « de prendre ses responsabilités sur ce dossier ». Jean-Louis Borloo et Michel Barnier ont simplement exprimé leur «vive émotion» et ont adressé leurs «condoléances» à la famille du défunt.
C’est dans ce climat de tension qu’un nouveau dérapage a été évité de justesse par les forces de l’ordre le 25 août dans le Tarn-et-Garonne. à l’appel de la FDSEA locale, deux cent agriculteurs – « près de cinq cent » selon Stéphane Smail le secrétaire de la FDSEA – ont cherché à rencontrer les faucheurs volontaires réunis sur un terrain loué pour l’occasion. Présents non loin du rassemblement des faucheurs, quelque deux cent gendarmes ont empêché cette rencontre qui aurait certainement dégénéré. Contacté par La Dépêche-Le Petit Meunier, le secrétaire de la FDSEA a déclaré que « Bové et les faucheurs » n’avaient « rien à faire dans le Tarn et Garonne ». Du côté de la FNSEA, le service communication assure que cette action, qui n’a finalement pas été à son terme, était le fruit d’une initiative locale, non préparée par la maison mère. Jean-Michel Lemétayer avait pourtant déclaré, le 21 août, qu’il voulait un « débat politique » pour désamorcer le conflit.