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Perspectives
L’accélération des exportations de blé pourrait déséquilibrer le bilan français

Malgré la concurrence argentine, les blés hexagonaux pourraient profiter de l’amenuisement des disponibilités russes. Mais est-ce vraiment souhaitable?

La première partie de cette campagne céréalière s’achève sur un bon bilan d’exportation pour le blé tendre français. Au 10 décembre, les statistiques douanières indiquaient des embarquements à hauteur de 4,2 Mt, dont 2,3 Mt à destination de l’Algérie, 400.000 t vers le Maroc, 140.000 t vers la Libye, 120.000 t vers l’Egypte, l’Afrique sub-saharienne représentant toujours, avec le Bassin méditerranéen, le socle solide de notre clientèle. Compte tenu des affaires en portefeuille à la mi-décembre, on peut estimer que près de 5 Mt avaient alors été vendues, grâce notamment à une forte accélération des livraisons au Maroc, atteignant 700.000 t. C’est encore largement inférieur aux réalisations de la dernière campagne sur la période correspondante, mais il s’agissait alors d’une conjoncture exceptionnellement favorable du fait de l’absence forcée de la Russie sur le marché mondial. Pour la saison 2011/2012, la prévision FranceAgriMer d’exportation à destination des pays tiers a été maintenue, le mois dernier, à 8,6 Mt contre 12,9 Mt réalisées lors de l’exceptionnel exercice 2010/2011, 9,6 Mt en 2008/2009 et 9,8 Mt en 2009.
L’ambition d’exportation pour 2011/2012 est donc modeste, mais elle se situe dans un contexte de ressources sensiblement inférieures à celles des trois précédentes campagnes. La deuxième partie de 2011/2012 se présente cependant de façon très incertaine en matière de ventes extérieures de blé. Le rythme des sorties des six premiers mois de 2011/2012 pourra-t-il être maintenu et serait-ce souhaitable ? Certains observateurs pensent qu’un ralentissement des sorties ne serait pas mal venu et plutôt favorable à l’équilibre du marché intérieur qui s’annonce avec un stock de report de modeste de 2,5 Mt, le plus faible de ces cinq dernières années. D’autres sont, au contraire, partisans d’une dynamique d’export sans compromettre cet équilibre. Enfin, la plupart estime que de toute façon le rythme des six premiers mois ne pourra pas être maintenu et qu’il y a peu de chances (ou de risques, selon sous quel point de vue on se place), pour que l’objectif de 8,6 Mt soit dépassé, voire atteint.

Les capacités d’exportations de l’Ukraine et du Kazakhstan restent incertaines
Pour ceux qui craignent d’éventuels effets pervers d’un trop fort courant d’exportations, leurs craintes se fondent sur le fait que les pays importateurs restent vivement aux achats et que l’offre russe va se réduire. La Russie a en effet déjà engagé, à la fin novembre selon l’USDA, 13 Mt de son disponible exportable estimé à 19 Mt. Et, si le potentiel d’exportation de l’Ukraine et du Kazakhstan est encore peu entamé, ces deux pays risquent de se trouver confrontés à de gros problèmes logistiques et climatiques de nature à freiner l’acheminement de leurs disponibilités.
Pour les autres, si la concurrence russe et plus généralement mer Noire, peut s’alléger, celle de l’Hémisphère sud est bien présente. L’Argentine est en particulier déjà très compétitive auprès de nos clients traditionnels comme l’Algérie. Le dernier appel d’offres algérien a d’ailleurs été conclu en « optionnelle », majoritairement en origine argentine.
Par ailleurs, l’Egypte est couverte jusqu’en mars. Mais, si son fournisseur favori, la Russie, venait à réduire son offre, le premier importateur mondial a déjà fait la démonstration de sa capacité à diversifier ses sources d’approvisionnement... peut-être même auprès de la France, mais pas pour des volumes approchant les chiffres exceptionnels de la dernière campagne. Les 60.000 t prises par la France dans le dernier appel d’offres égyptien ne suffisent pas à convaincre que le blé français va y retrouver un débouché pharaonique.
Si l’exportation française devait retrouver sa cadence des six premiers mois de la saison, l’équilibre du marché serait-il menacé ? Les bilans prévisionnels de FranceAgriMer de décembre dernier ont conclu au maintien de la ressource nationale en augmentant de 200.000 t à 30,5 Mt, sa précédente estimation de collecte et réduisant  à 300.000 t contre 550.000 t, celle des importations, qui avaient atteint l’an dernier 1 Mt. Les prévisions d’incorporation dans l’alimentation animale ont été abaissées de 100.000 t (au profit du maïs). Le conseil céréales de FranceAgriMer retrouve ainsi des chiffres de ressources, d’utilisations et de stocks équivalents à ceux du mois dernier.
Et puis, les 250.000 t soustraites du poste importations pourraient ressurgir dans un prochain bilan, pour permettre de sortir du blé meunier en échange de blé fourrager, par exemple, sans bouleverser le bilan global.

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