Agrocarburants
La filière biodiesel européenne se défend d’être responsable de la hausse des prix
Les représentants européens de la filière biodiesel, accusés d’être en partie responsable de la hausse des matières premières, s’expliquent
Réunis à Bruxelles, les principaux acteurs de la filière biodiesel européenne ont invité la presse afin de passer un certain nombre de messages. Inévitablement, la hausse des prix a été abordée et l’ensemble des représentants, même s’ils ne s’en plaignent pas, ont tenu à se défendre d’en être à l’origine, notamment en colza. Le dossier des organismes génétiquement modifiés a également été traité et a laissé transparaître des divergences de points de vue entre les producteurs de graines oléagineuses et l’European Biodiesel Board, qui regroupe 52 intervenants de la filière de production en Europe.
La filière ne veut pas porter le chapeau mais se réjouit de la hausse des prix
Dès les premiers instants de la conférence, la question de la fermeté des matières premières a été abordée par Xavier Beulin, président de l’European Oilseed Alliance (EOA). « On a tendance à globaliser les grandes cultures, alors que le marché des oléagineux n’est pas comparable à celui des céréales, et l’envolée des prix de celles-ci n’a rien à voir avec celle observée en oléagineux ». Philippe Dusser, secrétaire général de l’EOA ne s’alarme pas sur la fermeté actuelle et sur sa potentielle poursuite. « Les modèles du Fapri, de la FAO ou de l’OCDE, donnent des indications de prix soutenus mais restant dans des niveaux actuels. La montée du biodiesel permettrait même une stabilisation des prix », explique-t-il. Pour Henri Rieux, qui préside le Fediol (Industries des huiles et de la protéine européennes), ce n’est pas le biodiesel qui fera monter les prix à l’avenir mais « l’alimentaire et les biocarburants comme le bioéthanol ». Il reconnaît néanmoins que « sans les biofuels, les prix chuteraient ». « Donc on a besoin de leur développement », admet-il. Xavier Beulin remarque aussi que « le biodiesel a relancé la production oléagineuse en gagnant 2 Mha en quatre ans ».
Divergence sur les OGM
La question des OGM marque une différence de stratégie assez nette entre les producteurs de graines oléagineuses et l’European Biodiesel Board. Pour Xavier Beulin, président de l’EOA, les organismes génétiquement modifiés sont essentiels dans le développement de la filière biodiesel. « Ce n’est pas une condition à l’amélioration des rendements, mais c’est un plus d’un point de vue environnemental », estime-t-il. « Il va bien falloir que l’on se penche sérieusement sur la question », lâche-t-il. Pour l’heure, la filière de production se dit prête à faire le grand saut. « On attend que le droit européen nous permette de valoriser nos travaux de recherche ». Celle-ci se porte sur le décryptage du génome, avec l’Inra, et sur l’amélioration de tous les stades avec indicateurs de rendement énergétique et environnemental. Rien de bien précis pour l’instant. Mais Philippe Tillous Borde assure que le passage aux OGM est tout à fait « envisageable », même avec des variétés étrangères, c’est à dire américaines, prenant le Canada en exemple, où la grande majorité de la production de canola est modifiée génétiquement.
La position de l’European Biodiesel Board (EBB) est quelque peu différente : « pour nous, c’est clair, il ne doit pas y avoir d’OGM spécialement pour la filière biodiesel, et même pas d’OGM du tout », estime Raphaelo Garafalo, secrétaire général de l’EBB. Cette différence de point de vue, s’explique par la volonté de l’EBB de se réconcilier avec les milieux écologistes et de la protection de l’environnement qui ne cachent pas leur méfiance face à la montée en puissance des agrocarburants, grands consommateurs d’intrants. « On a besoin du soutien des écologistes, donc on ne fait pas de forcing pour les OGM » se justifie Raphaelo Garafalo, visiblement gêné par l’insistance des représentants des producteurs de graines oléagineuses français.