Développement végétatif
« Il manque 40-50 mm d’eau aux cultures de blé et d’orge d’hiver »
Les inquiétudes quant aux effets du déficit hydrique sur les céréales d’hiver françaises se renforcent. Mais la situation reste rattrapable.
Les inquiétudes quant aux effets du déficit hydrique sur les céréales d’hiver françaises se renforcent. Mais la situation reste rattrapable.
Les alertes concernant le manque d’eau en France se multiplient. Le Bureau de recherches géologiques et minières alertait mi-avril que durant les mois « de février et de mars, les pluies déficitaires n’avaient pas permis d’assurer la recharge hivernale attendue ». Des restrictions d’eau sont mises en place dans plusieurs départements (Nord, Charente, Indre…). La Confédération paysanne demandait, le 29 avril, « aux pouvoirs publics et aux chambres d’agricultures d’agir dès maintenant pour accompagner les paysannes et les paysans » dans la gestion des ressources en eau. De son côté, Jean-Charles Deswarte, expert du pôle Valorisation de l’écophysiologie au sein d’Arvalis-Institut du végétal, estime qu’il manque actuellement « 40 à 50 mm d’eau dans d’importants bassins de production de céréales d’hiver, notamment les Hauts-de-France, l’Île-de-France et la Beauce ».
Des pluies insuffisantes dans les quinze prochains jours ?
Le faible niveau des réserves en eau dans les sols provoque, non seulement, un stress hydrique, mais aussi un stress azoté, alerte Jean-Charles Deswarte. « Les engrais azotés, sous forme de granulés, doivent se dissoudre dans l’eau pour être assimilables par les plantes. Or, les pluies de ces derniers jours ont été insuffisantes dans bon nombre de zones de production : la Beauce, le Berry, la Champagne, la Picardie… ». L’expert d’Arvalis-Institut du végétal rappelle qu’un début de stress hydrique avait été rapporté dès le début du mois d’avril dans le Sud-Ouest, avant que des pluies ne permettent d’améliorer la situation. Le stress hydrique sur les zones nord du pays a, de son côté, été rapporté dès la mi-avril. « Les récentes pluies n’ont pas été suffisantes (entre le 15 et le 30 avril), et les sols restent appauvris en eau. S’il pleut réellement ce qui est annoncé durant les quinze prochains jours, ce ne sera pas suffisant non plus. Néanmoins, il ne faut pas être trop pessimiste : les prévisions météo peuvent se tromper et, s’il pleut un peu plus, la situation se stabilisera. […] L’idéal serait qu’il tombe 20-30 mm par semaine durant les quinze prochains jours, avec des températures modérées », détaille Jean-Charles Deswarte. Ce dernier ajoute que des canons à eau sont en activité dans certains secteurs.
Arvalis-Institut du végétal juge qu’il est trop tôt pour faire des prévisions sur les rendements d’orge et de blé tendre d’hiver pour la récolte hexagonale 2019.
« Si la sécheresse perdure d’ici à fin mai, le potentiel de production sera affecté, et on pourra sortir les calculatrices », commente Jean-Charles Deswarte, précisant que le potentiel de production est surtout en danger dans les situations où les sols sont peu profonds. « Cette année, les orges d’hiver ont été davantage semées sur des sols superficiels. Mais leur cycle est plus court que celui du blé tendre, leur permettant d’être moins affectées par le manque d’eau. Ainsi, la situation pour les orges et les blés tendres est assez similaire », analyse le spécialiste d’Arvalis-Institut du végétal.
Quelques gelées, mais sans conséquence
D’autres paramètres sont à surveiller, tels que les températures. Des gelées sont apparues dans certaines zones au printemps, mais sans réelle conséquence, rapporte Jean-Charles Deswarte. « Du gel est survenu dans l’est de la France, notamment en Bourgogne ou en Champagne, surtout dans les fonds de vallée. Mais nous avons l’habitude de ces situations dans ces zones de production. » Des services météo annoncent qu’une masse d’air froid polaire va s’abattre sur l’Hexagone début mai, provoquant de nouvelles gelées et parfois des chutes de neige. Pas de quoi inquiéter l’expert d’Arvalis-Institut du végétal : « Les plantes peuvent supporter des températures de -4 °C à -5 °C. Les prévisions de température ne sont pas alarmantes pour le moment. Il faut que le froid dure pour qu’il y ait un réel impact. Il faudra être vigilant sans pour autant paniquer ».
Comme les plantes, les diverses maladies (fongiques, notamment) ont besoin d’eau pour se développer. Ainsi, « la situation est plutôt calme en termes de pression maladie. Il faut juste surveiller l’état des parcelles avec le retour des pluies », prévient Jean-Charles Deswarte.