Filière céréalière
Formation - "L'Ensmic mise sur l'apprentissage pour former les meuniers de demain"
Arrivée à Surgères pour la rentrée 2022/2023, la nouvelle directrice de l'Enilia-Ensmic, Marie-Pierre Gousset a répondu aux questions de La Dépêche Le petit meunier, dans le difficile contexte que connait la filière céréalière en terme d'attractivité depuis plusieurs années.
Arrivée à Surgères pour la rentrée 2022/2023, la nouvelle directrice de l'Enilia-Ensmic, Marie-Pierre Gousset a répondu aux questions de La Dépêche Le petit meunier, dans le difficile contexte que connait la filière céréalière en terme d'attractivité depuis plusieurs années.
La Dépêche Le petit meunier : Vous succédez cette année à Patricia Darjot à la direction de l'école Enilia-Ensmic qui dispense des formations pour intégrer la filière céréalière, pouvez-vous nous présenter votre parcours ?
Marie Pierre Gousset, directrice de l'Enilia-Ensmic : je suis un produit de l'enseignement agricole, puisque j'ai été étudiante à l'Enilia, avant qu'elle n'accueille l'Ensmic, donc il y a un certain nombre d'années. Et après avoir une carrière d'enseignement dans l'agroalimentaire plutôt généraliste d'une quinzaine d'années, cela fait 15 ans que j'occupe un poste de direction. Jusqu'à présent j'ai surtout œuvré en Normandie et en en Bretagne dans des établissements du service à la personne, de l'agriculture, production animale, production végétale, gestion et maîtrise de l'environnement, aménagement paysager.... J'ai décidé de revenir aux sources, dans le secteur de l'agroalimentaire.
LD LPM : Aviez-vous, avant d'arriver à l'Enilia-Ensmic, des liens avec la filière céréalière ?
Marie Pierre Gousset : Non je la découvre depuis ma prise de fonction.
LD LPM : L'Ecole nationale de meunerie et des industries céréalières a rencontré des problèmes ces dernières années pour remplir ses classes notamment en formation initiale continue. Qu'en est-il pour l'année scolaire 2022/2023 ?
Marie Pierre Gousset : Concernant la filière céréales en formation initiale scolaire, il n'y a malheureusement pas un seul élève inscrit cette année. Nous avions un candidat en formation initiale scolaire pour la première année de BTS, mais compte tenu de l'absence d'autres élèves, nous n'avons pas pu ouvrir la classe. Pour autant, nous n'avons pas perdu le candidat, qui a pu trouver une place dans une autre formation. Ce qui ne l'empêchera pas d'étudier la meunerie et de faire tous ces stages là où il le souhaite. La formation Meunerie paye le manque de visibilité et d'attractivité de la filière. Par ailleurs, l'Ensmic recrute en formation par apprentissage pour les moins de 29 ans (âge limite pour s'inscrire en apprentissage). Concernant l'apprentissage, nous avons inscrit sept apprentis en première année, et nous en avons 11 en 2e année. Cependant, la formation destinée aux adultes a le vent en poupe. Nous accueillons cette année 40 stagiaires pour des stages orientés vers la meunerie, les techniques de transformation meunière ou céréalières ou de panification, allant d'une journée à une semaine. Il s'agit de formations qualifiantes, des morceaux de diplôme ou des formations créées à façon pour les entreprises (fondamentaux de la meunerie, analyse de la mouture et de la farine, panification, techniques de dosage, mélange en conditionnement...). La semoulerie/fabrication des pâtes et la nutrition animale sont également dispensées.
LD LPM : Que deviendra la formation initiale Industries céréalières l'année prochaine, va-t-elle disparaitre du fait de l'absence d'élève cette année ?
Marie Pierre Gousset : Il y a une réforme qui va transformer ce BTS agroalimentaire, qui avait 4 options, en un BTS appelé « Bioqualim » qui ne proposera plus que 2 options : généraliste et produits laitiers. Donc la spécificité Produits céréaliers disparaîtra des référentiels lors de la rentrée scolaire 2023. Je le regrette mais je tiens à préciser que les professionnels participent à la conception des référentiels. Ce n'est pas une décision des lycées. J'ose espérer qu'il y aura des candidats souhaitant travailler sur les produits céréaliers parce que nous pourrons tout de même donner une forte coloration céréalière, du fait de notre savoir faire et de notre moulin pilote. Donc un jeune de moins de 29 ans qui a envie de devenir Meunier par le biais de l'apprentissage pourra passer par un BTS bioqualim très fortement coloré, voire exclusivement céréaliers à l'Ensmic. C'est également possible en formation initiale scolaire mais la coloration sera moindre. Cette orientation vers l'apprentissage peut répondre aux attentes des entreprises de la filière.
LD LPM : La formation des meuniers en France fait l'objet de nombreux débats ces dernières années, portant notamment sur l'avenir de l'école et sur l'attractivité du secteur de la meunerie et plus généralement des filières céréalières. Avez-vous eu le temps de vous pencher sur ce dossier ?
Marie Pierre Gousset : Pour l'instant nos appels du pied n'ont reçu que peu d'écho, même si tous les professionnels sont très conscients du manque de candidats pour les postes à pourvoir. J'ai profité des Journées techniques des industries céréalières pour me rapprocher de l'Association nationale de meunerie, et j'avais déjà longuement échangé avec l'Aemic. L'urgence c'est de connaître réellement les besoins de la profession en termes de formation. Si les professionnels nous disent qu'ils n'ont pas besoin de BTS mais d'un bac professionnel meunerie, nous sommes prêts à le construire. Mais encore faut-il que la profession se donne les moyens de communiquer sur ses métiers, ses atouts, ses performances et ses ambitions pour faire venir des étudiants à l'Enilia-Ensmic. Une école, aussi vieille et réputée soit-elle, ne peut le faire seule. Nous avons la chance d'avoir un savoir-faire en termes de formation et de disposer d'un moulin très performant. Nous sommes là pour l'ouvrir mais nous ne pouvons communiquer à l'échelle nationale auprès du grand public. Ceux qui parlent mieux des métiers sont ceux qui les exercent. Je pense par exemple aux métiers du bâtiment où à l'armée qui ont lancé des campagnes de recrutement à grande échelle et qui semblent recruter. La force de frappe d'une interprofession et d'une profession est bien plus importante que la nôtre et permettrait d'avoir un retentissement bien supérieur.