Récolte 2022 : pourquoi il faudra se méfier du chiffre d'affaires en grandes cultures
Les prix des grains se traduisent par des chiffres d'affaires en forte hausse en grandes cultures. Mais attention à calculer sa marge pour prendre des décisions stratégiques, car le prix des intrants implique une décorrelation entre chiffre d'affaires et revenu réellement disponible.
Les prix des grains se traduisent par des chiffres d'affaires en forte hausse en grandes cultures. Mais attention à calculer sa marge pour prendre des décisions stratégiques, car le prix des intrants implique une décorrelation entre chiffre d'affaires et revenu réellement disponible.
Tenter de chiffrer les résultats économiques en grandes cultures pour la récolte 2022 est un exercice délicat, plus encore pour 2023. Des centres de gestion s’y sont toutefois essayés, afin de discerner des tendances pour mieux anticiper les bonnes décisions.
Pour la récolte 2021, Cerfrance Champagne Nord Est Île-de-France (CNEIDF) fait état de bonnes performances moyennes. Pour la ferme type de Seine-et-Marne (exploitation spécialisée en polyculture sur 152 hectares, avec 1,3 unité de travailleur humain, ou UTH), l’EBE moyen à l’hectare avoisinerait 830 euros. C’est nettement plus que lors des trois années précédentes. Pour cet exercice 2021, l’EBE suit le chiffre d’affaires : ce dernier progresse avec la hausse du prix des grains, tandis que l’impact de l’inflation des intrants ne s’est pas encore fait pleinement sentir.
Les choses se corsent pour la récolte 2022, car les stratégies vont être beaucoup plus diversifiées entre les exploitations : selon la date d’achat des intrants et de vente des grains, les écarts seront plus marqués, sans parler de l’effet rendement. En prenant l’hypothèse d’un rendement moyen, de prix de vente très raisonnables (250 €/t pour le blé, 300 €/t pour l’orge d’hiver, 800 €/t pour le colza…), d’engrais azoté à 600 €/t et du GNR à 1 200 euros les 1 000 litres, Cerfrance CNEIDF aboutit à un chiffre d’affaires en forte progression, pour un EBE stable – donc rémunérateur. Cet optimisme est partagé dans la plupart des départements céréaliers.
Pour la récolte 2023, l’exercice confine à la science-fiction, compte tenu du manque de visibilité des principaux indicateurs économiques. L’élément le plus important n’est donc pas la valeur absolue de l’EBE calculé, mais « la décorrélation du chiffre d’affaires et de la rentabilité », souligne Philippe Gard, de Cerfrance CNEIDF. En clair : il y a davantage d’argent qui entre sur le compte, mais il n’en reste pas plus disponible à la fin en raison de la hausse prévue des charges. D’où la nécessité de ne pas se contenter du produit à l’hectare, et encore moins du prix de vente à la tonne de grains, pour jauger la rentabilité de l’année, mais de calculer la marge.