Filière betteraves
Pour D. Ducroquet, président de la CGB, « L´essentiel est de préserver le revenu des planteurs »
Filière betteraves
A l´issue de l´assemblée générale de la Confédération générale des planteurs de betteraves, son président, Dominique Ducroquet, fait le point sur l´actualité du secteur, en particulier la réforme du règlement sucre européen.
L´année 2003 a été difficile pour de nombreuses productions. Qu´en est-il pour la betterave ?
Dominique Ducroquet - Le rendement moyen s´établit à 58 tonnes de betteraves à l´hectare à 19 % de sucre soit 10,9 tonnes de sucre à l´hectare. On est proche des onze tonnes des années précédentes grâce à la richesse. Mais l´année se caractérise par de très grands écarts entre régions. Si les résultats sont exceptionnels dans le Nord (13 t de sucre/ha), ils sont très mauvais en Limagne et surtout en Bourgogne suite à la sécheresse avec moins de trente tonnes de racines. Partout la tare terre a été très faible ; 10 % seulement, du jamais vu !
En 2003, vous avez poursuivi les essais d´automatisation de la réception. Où en êtes-vous ?
D. D. - Les expérimentations se font dans le cadre interprofessionnel et en accord avec les services de la Répression des fraudes. Les mesures de tare collet, de saccharimétrie faites lors de la réception déterminent en effet le paiement de la betterave donc le revenu des planteurs.
Actuellement, il y a encore six opérations manuelles qui sont sources d´erreurs et donc de litiges. Pour la mesure de la richesse en sucre des betteraves, deux procédés ont été étudiés. Le premier est l´automatisation du procédé d´analyse actuel. Les essais sont satisfaisants et la Direction générale de la consommation, de la concurrence et de la répression des fraudes (DGCCRF) a annoncé qu´elle entendait homologuer la méthode pour une application dès la campagne 2004. L´autre méthode testée, par infrarouge, pose desproblèmes de fiabilité et d´automatisation.
Quant à l´évaluation du collet par un système d´image en trois dimensions, les résultats sont encourageants. Nous souhaitons le début de mise en oeuvre de l´automatisation à la récolte 2005.
Où en est-on de la révision de l´organisation commune de marché du sucre ?
D. D. - Le règlement sucre actuel s´applique jusqu´à la récolte 2005. Comme prévu, la Commission a remis en novembre 2003 aux ministres de l´Agriculture un rapport d´étape. Celui-ci présente trois scénarios différents d´évolution de l´OCM sucre, scénarios qui vont du statu quo à la libéralisation totale c´est-à-dire à la suppression des quotas et à la régulation des prix par le marché. Pour la CGB, aucun de ces scénarios n´est envisageable en l´état. De nombreuses questions actuellement en suspens sont susceptibles d´influencer le marché mondial et européen du sucre. On peut citer le Round de Doha et les conditions d´accès au marché, les accords préférentiels passés avec les pays les moins avancés « Tout sauf les armes » qui concerne le sucre, les accords avec les Balkans, sans oublier le panel déposé auprès de l´OMC par le Brésil, l´Australie et la Thaïlande.
En quoi tous ces dossiers peuvent-ils interférer sur les règles européennes ?
D. D. - Tout cela joue sur les quantités et le prix du sucre susceptible d´entrer dans l´Union européenne, de concurrencer la production intérieure européenne et remettre en cause la compétitivité de celle-ci. Quant à la plainte déposée auprès de l´OMC, elle conteste nos exportations de sucre hors quota et la réexportation de sucres importés des pays Afrique-Caraïbes-Pacifique (ac-cords ACP). Ces courants d´exportation sont bien antérieurs à l´OMC et n´ont pas été contestés à Marrakech en 1994 !
Dans l´état actuel du dossier, quel scénario a votre préférence ?
D. D. - La CGB ne veut pas se prononcer. Il y a encore trop d´inconnues : panel, accords Mercosur, PMA, préférence communautaire à l´issue des discussions du Doha Round. Mais nous nous ne sommes pas contre des évolutions du règlement sucre. Celui-ci, contrairement à ce que certains disent, a déjà beaucoup évolué depuis sa mise en place en 1968. En 1973, lors de l´arrivée de la Grande-Bretagne pour préserver les intérêts des pays ACP, il a été décidé d´importer du sucre de ces pays à prix garanti ; en 1979, l´OCM intègre l´isoglucose puis plus tard, l´inuline ; en 1981, les producteurs acceptent de supporter le coût total des exportations de sucre communautaire pour préserver leur capacité de production ; enfin, en 1995, c´est l´application des accords de Marrakech avec la mise en place du système de déclassement. Nous avons su nous adapter.
Notre objectif est de maintenir le revenu betteravier et de sauvegarder le potentiel de production de sucre en France. Pour cela, il nous semble nécessaire de maintenir un système de quota européen, de maintenir la préférence communautaire. S´il y a diminution des droits de douanes qui entraîne une baisse de prix, celle-ci devra être intégralement compensée. Enfin, nos courants traditionnels d´exportations doivent être préservés et donc reconnus à l´OMC.