Oléoprotéagineux
La culture de l´équilibre
Oléoprotéagineux
Les oléagineux et les protéagineux sont des facteurs d´équilibre dans l´agriculture française. C´est le message délivré par l´ensemble de la filière lors de son premier congrès.
« La culture de l´équilibre », tel était le thème du congrès Agora Prolea, premier congrès de l´ensemble des acteurs des filières oléoprotéagineuses. Équilibre entre productions sur une exploitation, équilibre entre débouchés alimentaires et non-alimentaires, c´est de tout cela qu´il a été question lors des différentes tables rondes.
Mais l´équilibre est malmené entre l´offre et la demande à la suite des réformes de la Pac qui ont pour conséquence une baisse des surfaces françaises et européennes tant en oléagineux qu´en protéagineux.
La situation des oléagineux en Europe souffre depuis longtemps de la concurrence du soja américain, un soja qui bénéficie d´aides substantielles de la part de l´État américain. Les producteurs européens, unis au sein de l´EOA(1), estiment qu´ils « ont subi un préjudice du fait de la politique agricole américaine ». « Il est juste qu´ils en demandent réparation », a déclaré Xavier Beulin, président de la fédération des producteurs d´oléagineux (Fop).
©M. Jolyot pour Prolea |
Les producteurs européens ont donc officiellement porté plainte dans le cadre de la procédure ROC. Ils attendent maintenant que cette plainte, qui est à l´étude à Bruxelles, soit effectivement déposée auprès de l´Organisation Mondiale du Commerce. Hervé Gaymard, ministre de l´Agriculture, a assuré les congressistes de son soutien pour faire aboutir cette plainte.
L´enjeu est de taille pour la filière européenne des oléoprotéagineux. En effet, soit les États-Unis sont condamnés pour le type et le niveau d´aides accordées à la production de soja, alors ils doivent revoir leur politique et revenir à un niveau d´aide plus compatible avec une juste concurrence ; soit les aides américaines ne sont pas condamnées par l´OMC, alors les producteurs européens peuvent exiger eux aussi des aides spécifiques pour leurs productions. N´oublions pas que les aides aux oléagineux ont été alignées sur celles destinées aux cultures céréalières pour éviter les foudres de l´OMC !
A Berlin, il avait été décidé qu´à mi-parcours, lors de la Mid Term Review (littéralement, point à mi-parcours) il serait fait un bilan de l´effet de l´application de l´Agenda 2000 sur les productions oléagineuses. Or, la Mid Term Review s´est transformée en nouveau projet de réforme de la Pac, découplage des aides, dégressivité de celles-ci dans le temps etc. Mais on ne parle pas de bilan sur les oléagineux ni d´ailleurs sur tout autre point ce qui serait pourtant nécessaire avant d´entreprendre toute nouvelle réforme.
Quant au découplage, les oléagineux en ont déjà fait l´expérience avec l´alignement sur les céréales et ses conséquences sur les surfaces. Seuls les protéagineux, dans le projet Fischler bénéficient encore d´une aide supplémentaire mais son niveau (55,57 euros par hectare) est nettement insuffisant pour être incitatif. « C´est au minimum 120 euros par hectare qui seraient nécessaires pour retrouver seulement le niveau de surface atteint à la fin des années 1990 », a indiqué Xavier Beulin.
©M. Jolyot pour Prolea |
La Fop affirme qu´elle va se battre sur tous les fronts
Le président de la Fop a aussi rappelé au ministre les autres points à défendre à Bruxelles. Préserver le principe des cultures sur jachère est un préalable à toute mesure du type « crédit carbone », si l´on veut vraiment voir se développer les cultures à usage non-alimentaire. Par ailleurs, au niveau français, un nouveau cap doit être franchi en matière de fiscalité. « Ce n´est plus de défiscalisation mais de fiscalité écologiquement adaptée dont il faut parler », a-t-il été rappelé.
Bonne nouvelle sur ce chapitre des biocarburants, le ministre de l´Agriculture a annoncé que les 70 000 tonnes supplémentaires d´agréments pour la production de Diester allaient être inclus dans les prochaines demandes lors du renouvellement des agréments qui arrivent à échéance.
Parlant de l´aide rotationnelle, Hervé Gaymard a parlé de « mesure intelligente », et il a confirmé l´abandon de la dégressivité de cette aide. Il s´est déclaré « prêt à examiner la possibilité d´élargir la mesure à quelques régions intermédiaires(2) », ajoutant que le devenir d´une telle mesure n´est pas indépendant des orientations et des réflexions actuelles sur la Pac.
La filière oléoprotéagineuse est encore jeune. Ces cultures peuvent encore progresser sur le plan technique ; elles ont besoin de recherches notamment sur le plan variétal. Les producteurs ont rappelé leur besoin et leur attachement à un outil de développement tel que le Centre interprofessionnel des oléagineux (le Cetiom). Le ministre a indiqué que son financement sera assuré à la fois par l´Adar(3) et par des taxes de type Cotisations volontaires obligatoires (CVO).
Une autre demande des producteurs concerne un filet de sécurité : les oléagineux ne bénéficiant pas de mécanisme d´intervention comme les céréales. Une piste, l´assurance-récolte ou l´assurance chiffre d´affaires, est étudiée depuis plusieurs années par les producteurs avec des organismes d´assurance. Il faudrait désormais passer à une phase expérimentale dans quelques départements. Le ministre de l´Agriculture ne s´est pas montré hostile à cette proposition.
Ce sont surtout des questions préoccupant les producteurs qui ont été abordées devant le ministre de l´Agriculture. Mais ces questions concernent toute la filière car comment construire une filière de transformation sans d´abord disposer de productions en quantité et qualité suffisantes.
(1) Alliance européenne sur les oléagineux.
(2) Ceci ne pourrait intervenir qu´en 2004, les dossiers 2003 devaient être remis le 15 mai.
(3) Adar, agence de développement agricole et rural qui remplace l´Anda.