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Désherbage céréales : cinq points à retenir pour combattre les graminées

Les herbicides ne peuvent pas tout faire contre les graminées, notamment dans des situations de salissement élevé. Rotation, décalage de semis, faux semis, labour ou zéro travail du sol… les moyens agronomiques de lutte sont plus que jamais d’actualité.

Pour limiter les infestations de graminées comme le vulpin et le ray-grass, le décalage de la date de semis du blé ou de l’orge est toujours une bonne stratégie.
Pour limiter les infestations de graminées comme le vulpin et le ray-grass, le décalage de la date de semis du blé ou de l’orge est toujours une bonne stratégie.
© C. Gloria

Le recours aux herbicides reste incontournable pour lutter contre les graminées adventices. Mais sans nouveauté avant deux ans et des conditions climatiques qui peuvent remettre en cause leur efficacité, des leviers de lutte agronomiques doivent être mis en œuvre.

Des cultures de printemps dans la rotation pour casser le cycle des graminées

La diversification dans la rotation culturale en introduisant des cultures de printemps est une première solution efficace. D’un point de vue agronomique, les nouvelles cultures cassent le cycle de graminées annuelles à levée automnale. Sur le plan chimique, ces cultures permettent d’introduire des nouvelles matières actives herbicides par rapport à celles utilisées sur colza et céréales à paille. L’expérimentation Syppre à Villedieu-sur-Indre, en Champagne berrichonne, a mis en avant cette efficacité agronomique et chimique de cultures comme le maïs et le tournesol.

Tableau - Des cultures à choisir pour agir efficacement sur les graminées adventices
Tableau - Des cultures à choisir pour agir efficacement sur les graminées adventices © Source : Syppre Berry

« Par rapport à la rotation colza-blé-orge d’hiver, la succession de deux cultures d’hiver, puis de deux cultures de printemps se montre performante », observe Vincent Vaccari, de la coopérative Alliance BFC en Bourgogne-Franche-Comté. Après une succession orge d’hiver-colza, le conseiller cite l’exemple d’une orge de printemps suivie d’un pois de printemps, ou d’un tournesol, puis pois de printemps ou encore d’un maïs, puis soja dans les situations avec une bonne disponibilité en eau. Il cite également la réussite d’un agriculteur de Haute-Marne, qui a opté pour une succession de deux orges de printemps après des cultures d’hiver, car il ne pouvait cultiver ni du maïs, ni du tournesol.

Un labour efficace s’il est réalisé tous les quatre ans

« Le labour sera préconisé pour cet automne, car il est très efficace derrière un échec de désherbage, souligne Adrien Saulnier, de la coopérative Vivescia, dans le Nord-Est. Mais pour les agriculteurs ayant déjà réalisé un labour il y a un ou deux ans sur des parcelles avec un salissement élevé, c’est difficilement envisageable. » En effet, seule la stratégie d’un labour intermittent, tous les quatre ans, est payante pour réduire les levées de ray-grass et surtout de vulpin en les enfouissant suffisamment longtemps en profondeur pour laisser le temps aux graines de dépérir. Celles-ci sont viables quelques années.

Mais dans certaines situations comme les terres à cailloux, le labour est délicat. Autre solution opposée : le zéro travail du sol. Dans ce cas, la réalisation d’un faux semis en grattant la terre en surface fera lever des adventices qui seront détruites par le passage d’un outil mécanique ou un traitement au glyphosate. « En agriculture de conservation des sols (ACS), on peut utiliser une herse étrille en guise d’outil pour le faux semis. Un flux de terre est créé sur trois centimètres, ce qui régule aussi les limaces et les campagnols en plus des adventices », souligne Vincent Vaccari. Sur la herse étrille, le conseiller recommande des dents de diamètre important (8 à 12 mm) et bien espacées avec un passage de l’outil à 15 km/h.

Des produits racinaires plus performants en ACS

En ACS, on cherche à épuiser le stock semencier de surface, en limitant le travail du sol à 3 cm de profondeur. Les graines sont laissées en surface et germent. « Pour que cela fonctionne, il faut que le programme herbicide soit efficace tous les ans, remarque Vincent Vaccari. Or, on a pu observer que les produits racinaires étaient plus efficaces en ACS qu’en agriculture conventionnelle, car les graines maintenues en surface germent de façon homogène et non échelonnées. D’autre part, le mulch de surface limite la migration de l’herbicide en profondeur pour concentrer son action sur les graines en superficie. »

Parmi les herbicides efficaces contre les graminées, des molécules sont largement utilisées en pré-levée ou post-levée précoce comme le prosulfocarbe (Défi), le flufenacet (Mateno…), le chlortoluron, la pendiméthaline… Certaines sont en sursis au niveau réglementaire, notamment le flufénacet, quand d’autres pourraient voir leurs doses d’utilisation abaissées comme le chlortoluron, remettant en cause son efficacité. Quant à la nouvelle molécule anti-graminées de BASF, le cynméthylin (Luximo), elle ne devrait pas arriver avant 2026 en France.

Trouver de bonnes conditions pour rendre efficace son faux semis

L’idéal pour une bonne efficacité d’un faux semis est de le réaliser avec un roulage derrière et une bonne humidité du sol (ou une pluie) qui fera germer les graines d’adventices. Malheureusement, en 2023, l’absence de pluie dans de nombreuses situations n’a pas permis un bon effet de la pratique.

Le décalage de la date de semis du blé ou de l’orge est toujours une bonne stratégie pour limiter les infestations de graminées. Il permet d’introduire ou d’ajouter des passages pour réaliser des faux semis et d’appliquer des herbicides racinaires plus tardivement pour bien couvrir toute la période de levée des graminées adventices. Mais les conditions climatiques peuvent en décider autrement, comme on l’a vu à l’automne 2023.

Les décalages de dates de semis prouvent toujours leur efficacité

Malgré tout, des expérimentations continuent de mettre en avant l’efficacité de cette technique. Sur la plateforme d’expérimentation Champfriand (Fromenteau) en Côte-d’Or, avec BASF et Alliance BFC, la moyenne sur 25 situations analysées sur plusieurs années montre un écart de 14 q/ha de rendement de la céréale en situation non traitée avec une date de semis retardée de 15 jours et de – 50 % d’infestation en graminées. Autre dispositif : sur la plateforme de la chambre d’agriculture des Hauts-de-France, à Catenoy dans l’Oise, en 2023-2024, l’infestation du ray-grass était de 152 pieds/m2 pour un semis de blé le 5 octobre contre 104 pieds/m2 pour un semis au 7 novembre.

Vincent Vaccari souligne qu’en Bourgogne, il y a cinq ans, il suffisait de décaler son semis au 15 octobre pour obtenir des baisses significatives d’infestations en vulpin par rapport à un semis conventionnel. « Maintenant, il faut retarder ce semis au 25 octobre voire à début novembre pour avoir une vraie efficacité. Malgré tout, la stratégie se gère à la parcelle et devra être appliquée prioritairement sur celle les plus infestées. » Les conditions climatiques exceptionnelles de l’automne 2023, où les semis tardifs ont été mis à mal, ne doivent pas servir de référence pour abandonner cette stratégie.

Le cumul de plusieurs leviers est nécessaire pour garder les graminées sous contrôle, parmi lesquels les traitements herbicides demeurent un pilier, à réaliser dans de bonnes conditions (humidité du sol, hygrométrie, peu de vent…).

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