Ambroisie : que dit la réglementation en cas de présence sur une parcelle agricole ?
Aujourd’hui, les obligations de lutte contre l’ambroisie sont définies au niveau départemental et consignées par arrêté préfectoral. Présents dans la grande majorité des départements, ces arrêtés précisent les modalités de gestion notamment en milieu agricole.

La présence d’ambroisie sur une parcelle agricole n’est pas une infraction. C’est l’absence de gestion avant la floraison ou avant la grenaison qui permet de constater une infraction. En 2025, les trois types d’ambroisie, à feuilles d’armoise, à épis lisses et trifides, font partie des cinq espèces (avec la processionnaire du chêne et la processionnaire du pin) dont la prolifération constitue une menace pour la santé humaine.
Celles-ci sont réglementées au titre du Code de la santé publique et leur statut permet aux préfets de prendre des mesures relatives à leur surveillance et gestion dans les territoires où elles sont présentes. Frédéric Caray, conseiller environnement à la Fredon Auvergne-Rhône-Alpes (AURA), indique que quasiment tous les départements français ont pris un arrêté préfectoral de lutte contre l’ambroisie au regard de sa forte prolifération. L’objectif de tous ces arrêtés, dont le contenu est proche, est d’interrompre le cycle de l’ambroisie en empêchant la plante de produire du pollen, pour limiter les allergies, et des graines pour limiter l’invasion.
Détruire l’ambroisie jusqu’en limite cadastrale des parcelles
Dans l’Allier, département très concerné par la problématique, l’arrêté préfectoral du 15 octobre 2019 stipule dans son article 7 que « l’obligation de lutte contre les ambroisies et de non-dissémination de leurs graines s’applique sur toutes les surfaces sans exception. » Il précise que « tout propriétaire, locataire, exploitant, gestionnaire de terrains bâtis et non bâtis, ayant droit ou occupant à quelque titre que ce soit, est tenu de prévenir la pousse de plants d’ambroisie, d’entretenir tous les espaces où les ambroisies sont susceptibles de pousser, de détruire avant pollinisation les plants d’ambroisie déjà développés et d’éviter toute dispersion de graines. » Les agriculteurs font partie des acteurs concernés et « doivent participer sur les terrains dont ils ont la charge aux mesures de lutte contre l’ambroisie. » La destruction est à réaliser jusqu’en limite cadastrale des parcelles, y compris talus, fossés, et chemins.
La lutte chimique en dernier recours
L’article 8 de l’arrêté du département auvergnat précise les techniques à utiliser, notamment sur les parcelles agricoles. « Dans les zones faisant l’objet d’une interdiction ou d’une limitation de traitement chimique ou de pâturage, la lutte contre l’ambroisie se fera au moyen de méthodes non chimiques : dans les périmètres de protection immédiate ou rapprochée des captages d’eau destinée à la consommation humaine, sur les couverts environnementaux définis par les bonnes conditions agricoles et environnementales (BCAE) où une interdiction de traitement chimique est précisée par la réglementation. »
Pour les autres zones, l’arrêté indique que « la prévention de la pousse ainsi que l’élimination non chimique de l’ambroisie sont privilégiées » et liste les techniques de lutte conseillées : couverture du sol, arrachage, fauche, broyage, désherbage thermique, pâturage, faux semis, etc. Il mentionne que « la lutte chimique doit être mise en œuvre en dernier recours en utilisant le produit ayant le plus faible impact sur l’environnement. » L’article 11 s’intéresse plus particulièrement à la lutte dans les cultures annuelles, en précisant l’intérêt de certaines techniques culturales : rotations adaptées, gestion des intercultures, désherbage mécanique et nettoyage des outils.
Un impact potentiel sur les aides PAC
Dans certains départements, comme la Drôme, l’arrêté préfectoral précise que le fait de ne pas se conformer aux prescriptions est « puni de l’amende prévue pour les contraventions de la quatrième classe ». En outre, la présence d’ambroisie sur des parcelles agricoles, si elle est importante, peut avoir aussi un impact sur les aides de la PAC en lien avec certaines BCAE, notamment celle relative aux bandes tampons le long des cours d’eau (où les interventions chimiques sont interdites). La notice nationale mentionne que « les espèces invasives, (ce qui inclut les espèces végétales nuisibles à la santé), ne sont pas retenues comme des espèces autorisées, en tant que couvert ». Elle indique par ailleurs que si « le labour est interdit, le préfet peut toutefois, par décision motivée, autoriser un agriculteur à procéder au labour de la bande tampon en raison de son infestation par une espèce invasive ».
Frédéric Caray explique qu’en cas d’infestation forte d’une parcelle cultivée (ambroisie prenant le dessus sur la culture), l’exploitant doit déclarer un accident de culture sur Telepac (avant le 20 septembre) ou en utilisant le formulaire dédié (Modification de culture), pour ne pas perdre ses aides découplées (DPB). Par contre, la parcelle ne sera plus éligible aux éventuelles aides couplées liées à la culture déclarée initialement.
Une dérogation possible en interculture pour détruire un couvert infesté
Certains arrêtés préfectoraux, comme celui du Cher, aborde la question de l’interculture, période propice au développement de l’ambroisie, en indiquant que « dans le cadre du programme d’action nitrates dans les zones vulnérables, en cas de nécessité de lutte sur des parcelles infestées par l’ambroisie, une dérogation, autorisant la destruction du couvert pendant la durée d’implantation minimale de 2 mois, pourra être attribuée par la DDT, sur la base d’une fiche de déclaration de gestion particulière de la couverture des sols pendant l’interculture. »
Un agriculteur est tenu de mettre en place des actions de gestion de l’ambroisie dans ses parcelles et d’inscrire la date et les techniques utilisées dans son cahier d’enregistrement des pratiques. Comme le mentionne le guide d’accompagnement et d’aide à la décision à l’usage des référents communaux élaboré par la Fredon France : « En milieu agricole, on demande à l’agriculteur d’agir, mais le zéro ambroisie n’est atteignable que sur les parcelles peu infestées. »
Bords de parcelles, jachères : que peut-on faire ?
L’ambroisie se développe préférentiellement sur les bords de parcelle, là où les cultures sont moins denses. Ce sont souvent les zones de démarrage de contamination des parcelles. Il faut donc être vigilant sur ces espaces. Pour empêcher la floraison ou la grenaison des ambroisies, plusieurs interventions d’arrachage ou de broyage (en abaissant si possible la hauteur de coupe à chaque passage) peuvent être nécessaires. Il en va de même pour les surfaces en jachères, dans le respect des périodes d’intervention autorisées, définies par arrêté préfectoral (période d’interdiction de 40 jours entre mai et juillet selon les départements).
Chrysomèle contre ambroisie : la guerre est déclarée
L’ambroisie à feuille d’armoise a trouvé son ennemi : la chrysomèle Ophraella communa. L’insecte se nourrit des feuilles et des fleurs de l’adventice. Arrivé d’Amérique du Nord, il est déjà bien installé en Italie et a été découvert pour la première fois en France en 2023, près de Lyon. Depuis, la chrysomèle de l’ambroisie a été retrouvée sur plusieurs sites, entre l’Ain et le Gard. Elle démontre son utilité. « En Italie, avec de fortes populations présentes, on a mesuré une diminution du pollen d’ambroisie dans l’air de 80 %, affirme Zoé Rousset, doctorante à l’Inrae de Sophia Antipolis. D’autre part, des lâchers massifs de cet insecte sont réalisés en Chine depuis 2007 contre les ambroisies. Il n’a pas été relevé d’impact de cette chrysomèle sur d’autres plantes que l’ambroisie. » En France, des lâchers vont être réalisés en mai-juin à titre expérimental en Occitanie et dans l’Allier grâce à un partenariat entre la Fredon, l’Inrae et l’Agence régionale de santé (ARS), qui finance une partie de ce projet. Ce mode de lutte biologique à l’aide d’un insecte contre une plante invasive est une première en France métropolitaine.