Eviter l’impact de la chaleur sur les fruitiers par la gestion de son irrigation
Les périodes très chaudes, de plus en plus fréquentes, peuvent diminuer la productivité des vergers. Mais une bonne gestion de l'irrigation peut contrecarrer leurs effets, allant même jusqu’à des économies d'eau.
Les périodes très chaudes, de plus en plus fréquentes, peuvent diminuer la productivité des vergers. Mais une bonne gestion de l'irrigation peut contrecarrer leurs effets, allant même jusqu’à des économies d'eau.
Avec le réchauffement climatique, les températures extrêmes et les sécheresses deviennent de plus en plus fréquentes. Pour y faire face, une gestion plus précise de l’irrigation en arboriculture est nécessaire. En effet des températures supérieures à 35°C ralentissent le grossissement des fruits et peuvent détériorer leur qualité. Le phénomène est accentué lorsque l’hygrométrie de l’air est faible. En juin 2019, dans des parcelles de pommier de la région de Lunel dans le Gard, des pommes ont été brûlées et « cuites » à l’intérieur du fruit. Ce jour-là le DPV, déficit de pression de vapeur (notion qui prend en compte sur une même courbe les deux facteurs, température et hygrométrie), a été extrêmement élevé. Des parcelles sur lesquelles l’aspersion sur frondaison était en route ce jour-là ont été moins touchées. Plus généralement, le grossissement des fruits est freiné lorsque la température est élevée et l’hygrométrie basse. La technique du bassinage avec un arrosage de deux heures en fin d’après-midi limite ce ralentissement. Ce blocage du grossissement s’explique par la fermeture des stomates, provoquée par l’augmentation de la concentration de l’hormone végétale, l’acide abscissique ou ABA, en réaction au stress hydrique.
Résistance au stress hydrique
Mais, même en cas de fortes chaleurs, des économies en eau sont possibles. Les plantes ont en effet une capacité naturelle de résistance aux stress et peuvent tolérer un certain rationnement Des travaux de l’Inra d’Avignon à l’aide du dendromètre Pépista® et des observations de l’équipe d’Agroressources sur le terrain l’ont confirmé. Une plante peut subir un stress durant deux jours successifs sans qu’elle soit gravement pénalisée. A partir du 3ème jour de stress, la croissance de l’arbre est alors impactée. Une irrigation par goutte à goutte permet d’arrêter l’arrosage une journée par semaine lorsque les tensions du sol sont peu élevées et d’économiser 15 % d’eau. D’autres facteurs météorologiques que la température et l’hygrométrie sont néanmoins à prendre en compte pour gérer son irrigation. Des mesures au dendromètre montrent une baisse des contractions journalières lors d’épisodes de mistral : en présence de vent, certaines espèces consomment moins d’eau car elles effectuent une régulation par la fermeture de leurs stomates. Le niveau de consommation en eau dépend également du rayonnement : la demande hydrique sera forte lors de journées très ensoleillées et nettement plus faible par temps couvert. Il est souvent possible, lors de ces journées nuageuses, de diminuer les durées d’arrosage en irrigation par goutte à goutte. On limite ainsi le risque d’éclatement des fruits. Les prévisions météo deviennent donc de plus en plus un outil déterminant pour prévoir ses programmes d’arrosage en début de semaine, et parfois même au jour le jour.
Des besoins en eau variables selon le stade de culture
Les apports en eau sont aussi à adapter selon la charge et l’âge des vergers. Les arbres avec beaucoup de fruits ont davantage besoin d’eau que les arbres ayant une plus faible production. Des mesures avec des sondes tensiométriques dans le sol et un capteur Pépista® sur l’arbre ont montré que la demande hydrique peut devenir très importante dès la nouaison sur abricotiers très chargés et qu’elle peut se poursuivre après récolte jusqu’à la fin de la saison. Les besoins en eau varient également en fonction du stade de culture. La courbe de grossissement de pêches (variétés de mi-saison ou tardives) montre que la croissance des fruits est naturellement faible pendant le stade de durcissement du noyau. Une irrigation trop importante ne favorisera pas le calibre des fruits mais provoquera la sortie de gourmands qui augmenteront ultérieurement la demande en eau et en éléments nutritifs. A l’inverse, trois à quatre semaines avant la récolte, la demande hydrique des pêches devient nettement plus forte et nécessite un arrosage confortable. Après récolte sur pêchers irrigués en goutte à goutte, une rampe sur deux peut être fermée durant une quinzaine de jours, en alternant ensuite ouverture et fermeture de chacune des rampes durant le reste de la saison. Ces dernières années dans la Crau, en vergers de pêchers et d’abricotiers irrigués au goutte à goutte, l’économie d’eau a été de près de 20 % en augmentant le nombre de rampes d’arrosages (passage de deux à trois rampes par rangée). Pour les fruits à pépins, il faudra faire attention au stade précoce de la multiplication cellulaire en avril et mai, et ne pas déclencher trop tard l’arrosage. Pour des variétés tardives de pommes, un rationnement hydrique sera souvent possible, en tenant compte des phases de croissance des pousses et de grossissement des fruits. Une bonne gestion de l’irrigation peut ainsi permettre d’économiser 20 à 30 % d’eau en vergers de pommiers et de pêchers, sans perte de rendement ni de calibre, tout en augmentant la qualité gustative des fruits. Cette méthode de pilotage de l’irrigation et de la fertilisation qu’Agroressources développe depuis plus de vingt ans tient compte du sol et de la plante.
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Deux systèmes d’arrosage
En vergers de pommiers et de poiriers, il est judicieux de maintenir deux systèmes d’arrosage : le goutte à goutte qui présente l’intérêt de ne pas humidifier le feuillage au printemps, et limite ainsi les risques de tavelure, et l’aspersion sur frondaison pour faire des arrosages complémentaires en été ou des « bassinages » lorsque les températures sont élevées. Cette aspersion sur frondaison est déconseillée si l’eau du forage est chargée en sel.