Pulvérisation : les pratiques et réglages pour limiter son impact sur l'environnement
Certaines pratiques de pulvérisation et réglages permettent de limiter l’impact sur l’environnement. Le projet Pulv’arbo fait un premier point sur les effets des pratiques selon le type de pulvérisateur.
Certaines pratiques de pulvérisation et réglages permettent de limiter l’impact sur l’environnement. Le projet Pulv’arbo fait un premier point sur les effets des pratiques selon le type de pulvérisateur.
Pour optimiser les débits de chantier ou limiter les impacts sur l’environnement, les pratiques de pulvérisation sont diverses chez les arboriculteurs. Le projet de recherche Pulv’arbo cherche à déterminer lesquelles ont un potentiel impact sur la qualité de la pulvérisation ? « Nous avons besoin d’acquérir des références chiffrées sur ces pratiques et réglages des pulvérisateurs. C’est un prérequis pour engager les producteurs dans des démarches sécurisées de réduction de doses », explique Florence Verpont, CTIFL. Quatre stations expérimentales, le CTIFL sur son site de Lanxade (Dordogne), la Morinière (Indre-et-Loire), l’IFPC (Orne) et Sud Expé Marsillargues (Hérault) ont donc évalué sept pratiques, matériels ou réglages, seul ou combiné. Il s’agit du type de matériel de pulvérisation, du type de buses, de la vitesse de rotation de la turbine, du régime moteur, de la vitesse d’avancement, du volume de bouillie et du nombre de rangs traités. En 2016 et 2017, 107 modalités ont été testées. Pour chacune d’elle, les dépôts de produits phytosanitaires ont été mesurés sur quatre arbres situés au centre des cinq rangs traités. Sur chacun d’entre eux, des collecteurs étaient positionnés dans sept zones de l’arbre (de bas en haut et d'une face à l'autre). Les premiers résultats validés sur différents sites et plusieurs années ont été présentés lors de la journée phytosanitaire fruits à pépins mi-décembre. Mais le travail continue jusqu’en 2020.
Vitesse de turbine et régime moteur
Diminuer la vitesse de turbine d’un pulvérisateur ou son régime moteur permet de réduire le risque de dérive. « Nous avons pu observer que passer d’une vitesse de turbine II à I ou passer d’un régime de 540 tr/min à 430 tr/min n’a pas d’impact sur la quantité et la répartition des dépôts retrouvés sur les feuilles quel que soit le type de matériel utilisé », analyse Fanny le Berre, de la Morinière. « Si sur le haut des arbres, avec une vitesse de turbine tortue (I), les dépôts sont parfois inférieurs à ceux de la référence (voir encadré), ils restent toujours supérieurs à 90 ng/dm², la limite inférieure acceptable pour un taux de dépôts, précise Xavier Creté de Sud Expé. On ne prend donc pas de risque en diminuant la vitesse de turbine. » En revanche, la combinaison d’une vitesse de turbine faible (I) avec un régime moteur inférieur à 370 tr/min peut diminuer le taux de dépôts selon le type de matériel utilisé. « Ces diminutions de régimes sur un jet porté double turbine ont provoqué une baisse en moyenne de 35 % des dépôts sur l’ensemble de l’arbre par rapport à la référence », continue le spécialiste. Avec un jet porté simple turbine, les dépôts ont été identiques à la référence. Ces diminutions combinées n’ont pas encore été testées avec les autres types de pulvérisateurs.
Même efficacité des buses anti-dérive
Autre solution pour diminuer l’impact sur l’environnement : l’utilisation de buses anti-dérive. « Tous les modèles de buses anti-dérive testés sur les quatre types de pulvérisateur avec buses ont eu des dépôts identiques à la référence du début à la pleine végétation », expose Fanny le Berre. L’utilisation de buses à fente et injection d’air avec une faible vitesse de turbine a même permis d’augmenter les dépôts. Le panachage des buses : ATR (à turbulence) en bas et TVI (injection d’air) en haut a aussi amélioré le taux de dépôts avec une vitesse de turbine faible. « En diminuant le volume généré, on confine le nuage dans la canopée », analyse l’ingénieure. Mais moins de dépôts sont observés dans le haut des arbres. « Comme les gouttelettes générées par les buses TVI sont plus grosses, elles ont plus de mal à atteindre le haut des arbres », continue-t-elle.
Diminuer les volumes et augmenter la vitesse
« Sans surprise, le travail à bas volume (200 l/ha) donne d’aussi bons résultats, en termes de taux de dépôts que la référence à 400 l/ha », commente Xavier Creté. Les dépôts sont quasiment identiques pour le pulvérisateur à jet axial quel que soit le volume. Mais avec le jet dirigé pneumatique à tronçons ajustables, les dépôts sont supérieurs avec un volume de 250 l/ha par rapport à des volumes de 500 ou 1 000 l/ha quel que soit l’endroit dans l’arbre. Augmenter la vitesse du tracteur pour accélérer le chantier de récolte est une solution évidente. Mais quelles en sont les conséquences ? Une vitesse d’avancement de 8 km/h couplée à un bas volume donne des résultats de dépôts équivalents à la référence en milieu et pleine végétation. Avec une vitesse de 10 km/ha, les dépôts sont augmentés sur les deux faces en milieu de végétation. Ce résultat est atténué en pleine végétation. Ce phénomène est encore plus net avec un pulvérisateur pneumatique dirigé. « Lorsqu’on avance plus vite, la dépression crée une aspiration du nuage qui va augmenter les dépôts mais aussi la variabilité, note Xavier Creté. A 10 km/h, on peut commencer à observer moins de dépôts au centre de l’arbre. Quand la végétation est établie, le travail à cette vitesse est plus risqué. »
"L’acquisition de références chiffrées sur les pratiques et réglages des pulvérisateurs est un prérequis pour engager les producteurs dans des démarches sécurisées de réduction de doses", Florence Verpont, CTIFL
Un protocole le plus homogène possible
Pour comparer les résultats obtenus sur les quatre sites, les vergers de pommiers ont été choisis les plus identiques possible sur les quatre sites. Ils étaient plats, important pour avoir une vitesse de turbine constante, adultes, en pleine production, conduits en axe, et représentatifs du verger pomme et pomme à cidre standard. Les distances entre rangs étaient donc de 4 m, le volume de végétation était en moyenne de 3,6 m de haut et 2 m de large.
Une référence producteur
Une modalité de référence de pulvérisation a été définie de manière collective. Il s’agit d’une pulvérisation avec un pulvérisateur à jet porté axial équipé de buses à turbulence, utilisé avec la vitesse de rotation de turbine II, à une vitesse d’avancement à 5 à 6 km/h. Le volume de bouillie de référence a été fixé à 400 l/ha en pomme de table et 500 l/ha en pomme à cidre. Tous les rangs étaient traités.
Le cas d’un rang sur deux
La pulvérisation un rang sur deux a donné des résultats de dépôts beaucoup plus contrastés. « Les dépôts sont inférieurs à ceux de la référence au centre et sur la face non pulvérisée de l’arbre quel que soit le type de matériel utilisé, axial simple, axial double ou pneumatique ajustable », commente Xavier Creté de Sud Expé. Bien que deux fois moins important que la référence, sur la face non pulvérisée, les dépôts restent au-dessus du seuil minimum en début de végétation. « Mais en milieu de végétation, les taux de dépôts sont inférieurs à ce seuil, ce qui est potentiellement problématique sur certains ravageurs », prévient l’expérimentateur. Sur la phase pulvérisée, les dépôts sont en revanche plus importants. « Comme la même dose de produit à l’hectare est conservée, la concentration est augmentée, ce qui explique ce résultat, souligne-t-il. Prudence donc sur l’utilisation d’un rang sur deux. Cette pratique est à raisonner en fonction de la pression du bioagresseur. Elle est à privilégier plutôt en début de végétation ou en cas de faible pression, pour accélérer le débit de chantier. »