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Pommier : les osmies au service de la pollinisation

Des travaux sont réalisés à la Morinière depuis 2014 sur le suivi et l’introduction d’osmies pour la pollinisation. Les études se poursuivent pour en démontrer l’intérêt.

L’observation du nombre de trous maçonnés est un indicateur pertinent car il y a corrélation entre le nombre de trous entièrement maçonnés en année N et le nombre de pupes présentes en N+1.  © C.Lavoisier
L’observation du nombre de trous maçonnés est un indicateur pertinent car il y a corrélation entre le nombre de trous entièrement maçonnés en année N et le nombre de pupes présentes en N+1.
© C.Lavoisier

En impactant le rendement ainsi que le poids des fruits, la pollinisation est un élément clef de la réussite de l’itinéraire technique d’une production fruitière, notamment celle des pommes. Le pommier étant autostérile, les vergers doivent donc être complantés avec des variétés inter-compatibles. Son pollen est peu adapté au transport par le vent mais assez attractif pour les abeilles se nourrissant de pollen et de nectar.

Sédentariser les populations d’osmies autochtones

Quantitativement et qualitativement, la production est donc fortement dépendante de la qualité de la pollinisation, ce qui a incité la station d’expérimentation de La Morinière à engager différents travaux sur le sujet, notamment une étude exploratoire sur les pollinisateurs sauvages. En effet, les abeilles solitaires du genre Osmia sont susceptibles de présenter un intérêt pour la pollinisation des vergers (voir encadré). Une population d’osmies autochtones ayant été identifiée dans le verger de La Morinière en 2014, les essais réalisés portent principalement sur son suivi. L’objectif est aussi de favoriser leur implantation en leur proposant un abri. Ce type d’essais nécessitent d’être conduits sur plusieurs années afin de suivre la dynamique des populations autochtones ou implantées. Afin de sédentariser les populations d’osmies autochtones s’étant installées dans les vergers, des abris contenant des « nichoirs artificiels » ou blocs à osmies sont mis en place dans tout le verger. Les abris sont placés à l’extrémité des rangs puisque les observations réalisées en 2014 ont démontré que les abris situés à l’intérieur des parcelles étaient peu fréquentés. Ces abris sont donc orientés vers le sud pour que les osmies disposent d’une luminosité optimale et pour qu’elles bénéficient au maximum de la chaleur. Avant leur installation, l’ensemble des blocs ont été ouverts début mars pour y extraire et dénombrer les pupes d’osmies, qui sont maintenues au frais afin de retarder leur émergence jusqu’à ce que les conditions environnementales deviennent plus propices à leur survie. Les blocs sont nettoyés pour favoriser la nidification et supprimer les parasites, puis réinstallés avant la floraison.

Comptages des pollinisateurs

Afin d’évaluer la part d’osmies parmi les insectes pollinisateurs, des dénombrements de pollinisateurs sont effectués lors de la pleine floraison. Les cocons comptés l’hiver dans les blocs à osmies sont des pupes d’Osmia rufa et d’Osmia cornuta. Ils proviennent du maçonnage de l’année précédente. Toutes les galeries n’étaient pas entièrement maçonnées et certaines galeries pourvues de pupes n’étaient pas maçonnées. Il peut s’agir dans ce cas d’une difficulté de l’osmie à finir son nid (mortalité, dispersion) ou de dégâts d’oiseaux qui ont picoré le « bouchon maçonné » pour prélever les premières pupes. Le nombre de pupes identifié démontre la corrélation entre le nombre de trous entièrement maçonnés en 2017 et le nombre de pupes présentes l’année suivante. L’observation du nombre de trous maçonnés est donc un indicateur pertinent. Le taux de maçonnage augmente exponentiellement durant la période de floraison. Cette période de floraison coïncide généralement avec un pic des températures maximales. Ensuite, ce taux de maçonnage diminue nettement. L’activité des osmies s’achève durant la dernière décade du mois de mai. Les osmies semblent particulièrement apprécier les poiriers puisque c’est là qu’on trouve les activités les plus importantes. Des osmies de l’espèce Osmia cornuta fournies par Martin Perrigault (Association l’Abeille rousse) sont introduites afin d’évaluer la dynamique de butinage et la production de futures osmies hébergées dans les différents blocs vides. Cette étude est menée pour évaluer si le service « introduction d’osmies » peut être un service intéressant à proposer aux arboriculteurs lors de la floraison. Les essais menés démontrent que l’évolution du maçonnage est comparable à celle observée pour les abris autochtones. L’installation des nichoirs à osmies à la station de La Morinière a été suivie de résultats intéressants. L’introduction extérieure d’osmies dans les vergers permet d’obtenir des résultats comparables. Ce type d’introduction doit se faire, a minima, une semaine avant la date présumée de floraison. Les comptages faits sur le verger donnent des résultats assez éloignés de l’attente au regard de la biographie. Aussi, afin de pouvoir aller plus loin sur cette thématique, il serait nécessaire de pouvoir normaliser et affiner la méthode de dénombrement mais surtout une méthodologie pour quantifier objectivement l’action des osmies sur la pollinisation/fécondation.

Un temps de butinage plus important

Il existe près de mille espèces d’abeilles sauvages en France, mais seulement 2 % participent significativement à la pollinisation des cultures. La bibliographie évoque un impact économique équivalent à celui des abeilles domestiques. La pollinisation par les osmies induirait aussi « une fructification deux fois plus élevée que celle induite par les abeilles domestiques ». Les abeilles du genre Osmia auraient des besoins énergétiques inférieurs aux abeilles domestiques et donc théoriquement un temps de butinage plus important. Par ailleurs, le pollen représenterait une part plus importante dans leur régime alimentaire. La qualité pollinisatrice de ces abeilles sauvages mérite donc d’être évaluée.

 

A lire aussi : la pollinisation du châtaignier est entomophile

 

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