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La myrtille en pot, le projet de diversification de deux producteurs dans la Marne

Producteur de fraises depuis 2017, Rodolphe Schneider s'est lancé avec son père Vincent dans la culture en pot de la myrtille. Deux ans après les premières plantations, ils espèrent rentabiliser bientôt leur choix.

À Vanault-les-Dames, dans le sud-est du département de la Marne, Rodolphe Schneider produit depuis 2017 de la fraise remontante hors-sol, sur 1 hectare de serres multichapelles. À l'hiver 2020, il concrétise son projet de diversification avec son père Vincent, lui-même céréaliculteur, en plantant un hectare de myrtille en pot en plein air, suivi par un deuxième hectare pendant l'hiver 2021. « La réflexion ayant conduit au choix de la myrtille s'est faite avec Fruits rouges & Co, qui commercialise la majorité des volumes de fraises de l'exploitation, évoque Vincent Schneider. Avec Rodolphe, nous nous sommes lancés ensemble dans cette aventure, avec un hectare de myrtille chacun. On apprend la culture au fur et à mesure. » Les deux hectares de myrtille sont divisés en trois pépinières pour diviser les risques. Une dizaine de variétés de myrtille sont cultivées à la densité de 5 200 pots par hectare : Cargo, Last Call, Calypso, Duke, Draper, Katahdin, Liberty, Legacy et Aurora. Les plants proviennent de trois pépinières, Fall Creek, Multibaies et Degrave. Deux types de pots noirs sont utilisés.

Un substrat hollandais spécial myrtille

Un quart de la surface est en pots Beekenkamp de 45 litres (plus lourds et plus rigides), le reste est en pots Multibaies de 40 litres (plus souples). « Le substrat utilisé est un spécial myrtille de chez Legro aux Pays-Bas, présente Rodolphe Schneider. C'est un mélange fibre de coco, fraction de tourbe et perlite. Pour l'instant, on en est content. » Les pots noirs ont cependant l'inconvénient de devenir trop chauds lorsque les températures sont très élevées, comme durant l'été dernier. L'irrigation se fait avec deux goutteurs par pot. « Cette année, on a commencé à irriguer vers mars, jusqu’à mi-septembre. En jour long, on était à huit arrosages par jour, pour un volume de 1,5 à 4 litres d'eau par pot suivant les conditions météo. On essaie d'avoir un drainage à 10 % maximum », précise-t-il.

Pour la fertilisation, deux cuves sont présentes sur l'exploitation : une première cuve d'acide avec du phosphate monopotassé et des oligo-éléments ; et une deuxième avec du sulfate de magnésie, du sulfate d’ammonium et du nitrate de potassium. Rodolphe et Vincent Schneider ont pour l'instant pu se charger eux-mêmes de la taille pendant l'hiver 2022. « On taille assis, attaché à un siège qui repose sur le sol via un verrin. On ne va pas plus vite, mais on taille plus longtemps », confie Rodolphe Schneider. Le producteur note beaucoup de différences entre les variétés pour la facilité de taille, les variétés les plus développées étant plus dures à tailler. « On enlève entre 15 et 20 brins par pied pour laisser 3 à 6 brins. »

Une meilleure valorisation en août

Après une première récolte de myrtille, en 2021, aux alentours d'une tonne, la récolte 2022 a représenté 3,5 tonnes par hectare. À terme, le rendement visé sera autour de 12 tonnes par hectare. Les premières myrtilles ont été cueillies fin juillet, « un créneau trop précoce » pour le producteur. « On vise plutôt le créneau d'août, sur lequel les fruits rouges sont mieux valorisés. » Le dernier passage de récolte a eu lieu lors de la première semaine de septembre. Rodolphe et Vincent espèrent atteindre la pleine production des premières plantations en 2023. « Normalement, lors de la deuxième année on atteint l’équilibre, et à partir de la troisième année on commence à gagner de l’argent », résument-ils.

La commercialisation se fait à 90 % par Fruits rouges & Co, qui assure également le suivi technique, et à 10 % en vente directe : sur les marchés, via un magasin de producteurs et avec un distributeur automatique présent sur l'exploitation. Le tri et le conditionnement en barquettes se fait à la main sur l'exploitation et nécessite 3 à 4 heures après chaque passage de récolte. Un camion passe tous les jours pour amener les fruits rouges à Fruits rouges & Co, à Laon, à 150 km de l'exploitation.

Habituer à la myrtille les clients en vente directe

En vente directe, la myrtille reste encore un produit assez confidentiel dans la région. « Les gens ne connaissent pas trop le produit, beaucoup le confondent avec du bleuet. Mais ça commence à prendre, il faut les habituer. Au début, sur les marchés, on amenait un seul plateau de myrtille. Aujourd’hui on en est à cinq ou six », confie Rodolphe Schneider. Pour l’instant, les deux producteurs de myrtille ont choisi de ne pas identifier les variétés vendues, elles sont toutes mélangées.

« On vend de la myrtille, pas des variétés de myrtille, explique Vincent Schneider. En fraise, les gens veulent de la Charlotte, de la Mara des bois... Ce n'est pas encore le cas pour la myrtille, bien moins connue que la fraise, et dont les variétés présentent moins de différences d'aspect et de goût. »

Parcours

2017 Installation de Rodolphe sur 6 000 m² de fraise hors-sol

2020 Plantation de 1 hectare de myrtille en pot

2021 Plantation de 1 nouvel hectare de myrtille

2021 Extension des serres de fraise pour atteindre 1 hectare

Gérer l'enherbement dans les pots

Quatre passages de désherbage manuel à l'intérieur des pots sont nécessaires. © RFL
L'enherbement dans les pots constitue un point important de vigilance, surtout la première année. Quatre passages de désherbage manuel ont été effectués. « Il faut surtout surveiller les saules, avertit Rodolphe Schneider. Dès qu'ils grossissent, ça devient impossible de les retirer du pot. On est en attente d'une solution pour limiter l’enherbement, à intaller au-dessus du pot. » Un passage de désherbage chimique est aussi réalisé pour nettoyer le bord de la bâche. Côté phytosanitaire, la culture de myrtille n'a pas subi de dégâts de Drosophila suzukii pour l'instant, contrairement aux fraises. En revanche, « les oiseaux sont un gros problème », pointe Vincent Schneider. « On essaye de les gérer en installant des cerfs-volants, mais ceux-ci ont tendance à casser rapidement. Les oiseaux partent des myrtilles quand les raisins apparaissent sur les vignes avoisinantes. » Les lièvres sont également un vrai souci quand ils coupent les tuyaux d'irrigation. Les deux producteurs traitent contre les chenilles avec un insecticide de type Karaté. Un passage de cuivre a aussi été fait cette année en sortie d'hiver en raison de la présence de bactériose.

 

Trois semaines de récolte par variété

Au début, la cueillette était réalisée par les neuf cueilleurs de fraises. Mais la récolte des deux cultures représentait trop de travail, donc cinq personnes ont été recrutées pour la récolte des myrtilles. « Il y a beaucoup de différences entre les variétés au niveau de la facilité de cueillette, décrit Rodolphe Schneider. Aurora est la plus difficile à cueillir car elle est plus petite. On ne voit pas bien les baies quand on regarde par le dessus de la plante. De plus, le fruit tient fort sur la plante, il faut bien tirer dessus. Avec les autres variétés, on peut faire tomber les fruits dans la main rien qu’avec le pouce. Liberty est la variété la plus délicate à récolter, car le fruit tient très peu sur la plante. » Le taux de fruits abimés à la récolte est très faible, de l'ordre de 1 %. Trois à quatre passages sont nécessaires pour chaque variété, en moyenne un passage par semaine, soit trois semaines de récolte par variété. « On passe plus souvent à cause des oiseaux, précise-t-il. S'il n'y avait pas ce problème, on pourrait laisser les fruits mûrir un peu plus. »

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