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« Je n’ai jamais perdu d’argent avec l’asperge »

Dans le Maine-et-Loire, Guillaume Thomas produit de l’asperge sur 16 ha. Le producteur, adhérent à Fleuron d’Anjou, apprécie particulièrement cette culture singulière, qui nécessite un engagement dans la durée.

La production sous grands abris, anecdotique en termes de volumes, permet de former les nouveaux cueilleurs.
La production sous grands abris, anecdotique en termes de volumes, permet de former les nouveaux cueilleurs.
© A. Lasnier

En cette fin mars, sur une parcelle de Saint-Mathurin-sur-Loire (Maine-et-Loire), une dizaine de personnes s’activent à la récolte des asperges sous une pluie battante. « Nous avons commencé la récolte en plein champ le 10 mars, précise Guillaume Thomas, le producteur. Cette année, nous n’avons pas eu 4-5 jours d’affilée sans pluie. Nous avons fini le buttage très tardivement, le 25 mars, alors qu’habituellement c’est vers le 10-15 mars ».

Installé depuis 2005, Guillaume Thomas produit de l’asperge sur 16 ha (6 parcelles de 2 à 3 ha chacune) ainsi que d’autres légumes sur une quinzaine d’hectares : échalote, potimarron, butternut, rhubarbe, navet, rutabaga, radis noir… Trente hectares sont aussi consacrés aux grandes cultures, notamment blé, maïs semence et trèfle semence. « Je ne me sens pas maraîcher, mais plutôt producteur de légumes, confie-t-il. Contrairement à un maraîcher qui produit des légumes toute l’année, il y a 4-5 mois où je ne ramasse pas de légumes ».

Lire aussi : « Comment j’ai choisi mes productions pour garder mes saisonniers »

L’importance d’avoir une offre précoce

L’asperge, principale production légumière de Guillaume Thomas, lui assure un revenu assez stable. « Je n’ai jamais perdu d’argent avec l’asperge, témoigne-t-il. C’est une culture exigeante, technique, et très intéressante ». Toute sa production de légumes est conditionnée et commercialisée par la coopérative Fleuron d’Anjou.

 

 
20 à 25 saisonniers travaillent sur l'exploitation au moment du pic de la production d’asperge.
20 à 25 saisonniers travaillent sur l'exploitation au moment du pic de la production d’asperge. © A. Lasnier

Au sein de la coopérative, l’asperge est en développement. Elle représente actuellement un volume de 700 t contre 300 t en 2015. L’objectif, ambitieux, est d’atteindre 1000 t d’ici cinq ans. « On recherche des producteurs, expose Baptiste Richard, responsable technique et développement de Fleuron d'Anjou. Il y a beaucoup de jeunes qui se lancent dans la culture. Pour être présent en GMS, qui représentent 70 % de notre chiffre d’affaires, il faut des volumes pour pouvoir mettre le produit en avant. »

Chez Guillaume Thomas, l’asperge est principalement cultivée en plein champ. Pour le créneau précoce, une petite partie de la production se fait sous mini-tunnels et, pour des volumes plus anecdotiques, sous grands abris, qui permettent aussi de former les nouveaux cueilleurs. « C’est important au niveau commercial d’avoir une offre précoce, même avec des faibles volumes, explique le producteur. Nous ne sommes pas dans un bassin de production précoce, donc cette offre est recherchée par nos clients ».

Un engagement fort du producteur est nécessaire

La grande majorité de la production se fait en blanche, une petite part en violette et en verte. Au niveau de Fleuron d’Anjou, l’asperge verte représente 10 % des volumes. Avant de se lancer dans la culture, un engagement fort du producteur est nécessaire. « Il faut bien sûr de la trésorerie pour investir dans les griffes, les bâches, les machines d’assistance à la récolte, illustre Baptiste Richard. Mais il faut aussi pouvoir s’engager sur plus de dix ans, et avoir la fibre pour travailler avec de la main-d’œuvre sur toute cette période, trois mois dans l’année ».

20 à 25 saisonniers travaillent chez Guillaume Thomas lors du pic de la production d’asperge. Ce sont principalement des habitués, qui restent pour certains 6 à 7 mois sur l’exploitation, entre la plantation de l’échalote en février et la récolte des navets. « Le travail est assez pénible en asperge, on se donne les moyens de bien accueillir les saisonniers pour les fidéliser, partage le producteur. Lorsque j’ai commencé, on récoltait à la gouge, qui pèse entre 1 kilo et 1,2 kilo, ce qui causait des tendinites. J’utilise depuis des couteaux qui sont employés en Allemagne. Ils pèsent seulement 400 grammes et permettent de récolter plus vite. »

 

 
Guillaume Thomas a adopté l'utilisation de couteaux pour récolter les asperges, pour limiter l'apparition des troubles musculo-squelettiques.
Guillaume Thomas a adopté l'utilisation de couteaux pour récolter les asperges, pour limiter l'apparition des troubles musculo-squelettiques. © A. Lasnier

Une irrigation au goutte à goutte face au manque d’eau

« L’asperge présente de nombreux atouts, assure Baptiste Richard. Les producteurs sont vraiment dans la récolte pendant 2-3 mois, mais il y a peu d’interventions pendant la période estivale, surtout en irrigation au goutte-à-goutte ». A l’image de Guillaume Thomas, beaucoup de producteurs d’asperge du Val de Loire se sont orientés vers le goutte-à-goutte en raison des problèmes récurrents de manque d’eau dans la région. « Le système d’irrigation est installé à la fin de la récolte, après le débuttage, explique le producteur. Il est retiré en octobre-novembre, après avoir broyé le dessus de la végétation ».

Un système d’aspersion est également utilisé sous abri pour humidifier la terre afin de confectionner la butte. Le professionnel voit l’asperge comme une culture vertueuse, qui nécessite peu d’interventions phytosanitaires, en dehors d’un désherbage chimique une fois dans l’année. « On a peu de problèmes de maladies, grâce au vent d’Ouest l’humidité ne reste pas. Quand j’ai débuté, je faisais une protection fongicide pour me rassurer, maintenant je ne le fais plus. Certaines années, on est embêté par le criocère, d’autres non ».

Parcours

2001 Installation sur 30 ha en semences céréales, échalotes et melons Galia

2004 Arrêt du melon Galia et plantation d'asperges sur 2,5 ha

2008 Développement de l'asperge sous tunnel

2016 Développement des surfaces d'asperge en précoce et des légumes anciens (radis noir, courges)

2024 16 ha d'asperge dont la moitié en technique précoce

La gestion des bâches grâce aux sondes

Pour piloter la qualité des asperges, l’utilisation des sondes connectées est un rouage essentiel de l’exploitation. Celles-ci indiquent la température en temps réel dans les buttes, au niveau des griffes. Cette information doit être couplée aux prévisions météo, afin de gérer le sens du positionnement des bâches thermiques sur les buttes. « En début de saison, on a besoin de chauffer la butte, les bâches thermiques sont placées du côté noir pour capter le rayonnement solaire », explique Guillaume Thomas.

La température optimale pour la pousse de l’asperge est de 18°C. Dès que la température de la butte dépasse les 18°C, et qu’il est annoncé un temps ensoleillé dans les jours à venir, les bâches doivent être retournées du côté blanc. « Sans les sondes, on est incapable de savoir s’il fait 16°C au niveau de la griffe ou 20°C. A 20°C, les asperges récoltées quelques jours après seront de moins bonne qualité, avec une pointe très ouverte », précise Baptiste Richard.

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