Pomme : comment ont évolué les variétés en 35 ans ?
L’évolution des caractéristiques des variétés de pomme au cours du temps a été mise en évidence par un travail de synthèse de données du CTIFL, compilées dans le cadre de l'évaluation variétale entre 1987 et 2020.
L’évolution des caractéristiques des variétés de pomme au cours du temps a été mise en évidence par un travail de synthèse de données du CTIFL, compilées dans le cadre de l'évaluation variétale entre 1987 et 2020.
Les données acquises dans le cadre de l'évaluation variétale pomme conduite par le CTIFL et l'INRAE entre 1987 et 2020 ont été utilisées pour définir la valeur moyenne et la distribution des principaux critères observés. « La synthèse de ces données est une source d'informations précieuses pour définir les caractéristiques dominantes chez le pommier, expliquent les auteurs d’un article paru dans Infos-CTIFL, décrivant les enseignements de cette synthèse*. La définition d'un profil moyen et de sa variabilité est très utile pour apprécier la pertinence d'une innovation variétale ».
L'étude a porté uniquement sur les hybrides de pommier qui sont des sélections avancées proposées par les obtenteurs et éditeurs de variétés : 5 737 observations correspondant à 1575 hybrides ont ainsi été utilisées dans la synthèse. Au fil des années de plantation, certains critères ont suffisamment évolué pour faire apparaître des tendances nettes, qui mettent en évidence les efforts constants des obtenteurs et éditeurs pour apporter des variétés amélioratrices pour l'espèce et répondre aux attentes du marché. Ces tendances se traduisent par la sélection d’hybrides plus petits, plus sucrés, plus fermes, moins acides et se conservant mieux.
Plus d’hybrides résistants à la tavelure
L'année de plantation est utilisée pour traduire les tendances dans le temps au lieu de l'année d'observation qui peut refléter un climat annuel inhabituel. Parmi le panel observé, Golden Delicious est la variété la plus souvent utilisée comme parent femelle suivie par Gala et Fuji. Pour le géniteur mâle, c'est Braeburn, Golden Delicious et un hybride INRAE résistant à la tavelure incluant dans son ascendance Idared et Prima qui ont le plus contribué à la transmission de leurs caractères. Plus récemment, ce sont les variétés modernes qui ont logiquement suscité de l'intérêt dans les programmes de création variétale : Honeycrisp cov, Cripps Red cov, Inored cov...
Plusieurs tendances intéressantes sur l’évolution des caractéristiques variétales au cours du temps ressortent de la synthèse. Ainsi, « l'introduction d'hybrides présentant des gènes de résistance à la tavelure a régulièrement augmenté pour atteindre 66 % en moyenne dans les tranches de plantation mises en place depuis 1998. Cette part n'était que de 25 % avant 1998 », décrit l’article d’Infos-CTIFL. La valeur moyenne du poids du fruit est de 204 g, soit un calibre moyen estimé de 77 mm. Cela correspond au poids moyen rencontré sur Golden Delicious. Au fil des tranches de plantation, le poids moyen des fruits observés ne fait que baisser, passant de 216 g en 1983 à 188 g en 2018.
Une forte teneur en sucres difficile à obtenir
Cette tendance correspond à une demande des consommateurs pour des fruits plus petits et plus en adéquation avec les modes de consommation actuels. Elle suit aussi les évolutions réglementaires qui autorisent la vente de fruits de petits calibres. Il est probable que, par le passé, quelques variétés se soient vues éliminées à cause de leur calibre, l'exigence de l'époque étant supérieure à l'actuelle.
L'indice réfractométrique moyen est de 13,3° Brix. Seulement 7 % des variétés dépassent 15° Brix dont 2 % atteignent 16° Brix régulièrement. Les pommes avec une forte teneur en sucres sont donc difficiles à obtenir. La fermeté moyenne est de 8,3 kg/cm². Elle augmente régulièrement au fil des années de plantation pour passer de 7,2 kg/cm² en 1991, année des premières systématisations des données, à 9,2 kg/cm² en 2019. Cette tendance montre les efforts des obtenteurs et éditeurs pour obtenir des fruits croquants et susceptibles de se conserver longtemps.
« Concernant la conservation post-récolte, le potentiel des variétés évolue de façon gaussienne autour des classes 3 à 4 mois et 4 à 5 mois de conservation en froid normal. Seules 10 % des variétés se conservent plus de 6 mois et 0,2 % plus de 9 mois », soulignent les auteurs de l’article. Depuis 1999, le potentiel de conservation évolue constamment de manière linéaire. Cette tendance illustre également la volonté d'apporter sur le marché des variétés au bon potentiel de conservation.
Les caractéristiques recherchées
Pour tendre vers des caractéristiques intéressantes, une variété de pomme devra échapper aux valeurs moyennes obtenues lors d'un semis de hasard ou de croisement sans soins particuliers donné au choix des géniteurs. Ceci est rendu possible par l'emploi de géniteurs très spécifiques pour un caractère particulier. Une variété ayant pour objectif de s’imposer sur le marché devra ainsi avoir une identité visuelle et/ou gustative, un fort taux de premier choix, un calibre commercial homogène, une tolérance ou résistance aux bioagresseurs et une faible sensibilité aux manipulations. L'arbre devra être facile à conduire tout en étant rapidement et régulièrement productif. La pomme devra être très juteuse, aromatique et croquante avec une texture fine. Le fruit se démarquera inévitablement si l'indice réfractométrique est supérieur à 15° Brix, l'acidité comprise entre 6 et 7 g/l et la fermeté supérieure à 9 kg/cm². La durée de conservation en froid normal devra être supérieure à 6 mois. Si la nouvelle variété se satisfait de faibles quantités de froid, si elle présente une bonne efficience pour l'eau et si elle est tolérante aux fortes chaleurs, elle sera en plus, armée pour s'adapter au changement climatique.
