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Bien choisir les essences de ses haies

Planter une haie apporte divers services à l’agriculteur à condition de bien réfléchir aux essences choisies pour la composer.

Cinq à huit espèces suffisent pour constituer une haie abritant des auxiliaires.
© M. Le Corre

Planter une haie a de multiples utilités. « Elle peut jouer un rôle brise-vent lorsqu’elle est haute, homogène et implantée perpendiculairement aux vents dominants, indique Séverine Hénin, conseillère biodiversité à la Chambre d’agriculture de l’Hérault. On estime qu’un mètre de hauteur de haie, ce sont dix mètres de cultures protégées. » Le vent est en effet ralenti sur 10 à 20 fois la hauteur de la haie, ce qui réduit l’évapotranspiration. Elle limite aussi la variation des températures journalières en élevant la température nocturne du sol. « Le système racinaire des arbres de la haie constitue un frein au ruissellement et à l’érosion des sols, continue la conseillère. L’eau s’infiltre ainsi plus facilement vers les nappes. » Une haie est aussi un écran contre la dérive des produits phytosanitaires. « La zone non traitée de 20 à 50 m en bordure de cours d’eau peut être réduite à 5 m si une haie au moins aussi haute que la culture et d’au moins 5 m de large est plantée en bordure », mentionne le ministère de l’Agriculture. Enfin, c’est un lieu de refuge, d’abri et d’alimentation pour de nombreux auxiliaires des cultures et pollinisateurs.

Des espèces locales refuges pour les auxiliaires

Plus la haie sera large, composée d’espèces variées et de différentes hauteurs, et plus ces rôles seront renforcés. Avant de se lancer dans une plantation, mieux vaut donc réfléchir. Le lieu d’implantation va dépendre de l’espace disponible. « Une haie doit faire a minima deux à trois mètres de large pour être efficace comme brise-vent ou pour héberger des auxiliaires », souligne la spécialiste. La distance à la plantation doit être suffisante pour permettre le passage des engins agricoles et éviter l’ombrage de la culture. Pour améliorer les effets brise-vent et le frein à l’érosion, les haies doivent être implantées de préférence perpendiculairement à la pente et aux vents dominants. « Le choix des espèces va dépendre des conditions pédoclimatiques de la parcelle, des rôles que l’on veut faire jouer à cette haie et de sa hauteur souhaitée », détaille la conseillère. Les espèces implantées doivent être locales pour être adaptées aux conditions climatiques et à la biodiversité de la région. Pour qu’elles ne deviennent pas aussi un refuge aux bioagresseurs de la culture adjacente, surtout si c’est un verger, il est impératif d’éviter les essences sensibles aux mêmes bioagresseurs que la culture (voir encadré).

Obtenir une haie en fleurs presque toute l’année

Une haie composite de cinq à huit espèces complémentaires en termes de fourniture d’abri et nourriture est déjà un plus significatif. « Il n’est pas nécessaire de diversifier énormément et de risquer d’introduire les plantes hôtes de ravageurs secondaires ou polyphages », insiste Sylvaine Simon, Inra. « Lorsque nous accompagnons un exploitant agricole sur un projet de plantation de haies, nous conseillons des essences végétales avec des périodes de floraison étalées dans le temps, afin que la source de nourriture pour les auxiliaires soit la plus longue possible », complète Séverine Hénin. Le cornouiller, le saule ou encore le noisetier, quand il n’est pas déconseillé, ont des floraisons très précoces, « qualitativement importantes pour la reproduction de certaines espèces dont les punaises prédatrices », précise Sylvaine Simon dans un article de Jardin de France. La ronce fleurit en fin d’été quand la floraison d’autres espèces est rare. Le viorne tin, le nerprun alaterne ou le lierre sont des relais d’alimentation en automne et en hiver. Le merisier est, quant à lui, une source alimentaire toute l’année grâce à ses glandes à nectar. « Nous essayons aussi d’intégrer des espèces à feuillage persistant, afin que la haie implantée puisse servir de refuge pour la faune auxiliaire même en hiver », continue Séverine Hénin. Les espèces à tiges creuses ou tiges entrelacées constituent aussi des abris d’hivernation ou de refuge pour les stades vulnérables des auxiliaires. « Enfin l’assortiment doit fournir des proies de substitution spécifiques des essences implantées », indique Sylvaine Simon. C’est le cas du sureau, du lierre, du noisetier ou du cornouiller qui sont les hôtes de pucerons spécifiques. Ces espèces sont à planter sur une ou deux lignes en quinconce, espacées d’1 m à 1,5 m en alternant les hauteurs des végétaux : arbres de hauts jets de 6 à 8 m de haut pour une haie brise-vent, des arbustes de 2 à 6 m et des buissons de moins de 2 m. Sans oublier une bande enherbée au pied de la haie d’au moins 1 m. Pour assurer une bonne reprise de sa haie, mieux vaut des plants d'un à deux ans. La marque collective « Végétal local » assure une récolte des graines en milieu naturel pour garantir une diversité génétique des lots récoltés augmentant la capacité des végétaux à résister aux modifications de leur environnement.

Une haie en huit étapes

1 Travail préparatoire du sol : de mai à septembre, trois à six mois avant la plantation

2 Paillage du sol : immédiatement après le travail du sol

3 Plantation : de novembre à mars, hors des périodes de gel, de vents violents et de sols engorgés

4 Mise en place d’une irrigation : après la plantation

5 Protection par manchons : après la plantation

6 Taille d’entretien : seulement en cas de besoin à partir de la 3e année, de mi-octobre à fin février. La taille de formation des arbres de haut jet ne doit pas commencer avant mi-novembre.

7 Maîtrise des adventices : une fois par an au maximum, de mi-octobre à fin février.

8 Recépage des arbustes : dès la 2e année, de mai à février

Distances de plantation selon le voisinage

La distance à laquelle doit être plantée une haie par rapport à une parcelle d’un autre propriétaire dépend de sa taille adulte. Si sa hauteur finale est de plus de deux mètres, elle devra être plantée à plus de deux mètres de la limite de propriété. Dans le cas contraire, elle pourra être plantée à seulement 0,5 m. Les plantations en bordure de route nationale, départementale ou communale sont soumises à l’avis des services gestionnaires de la voirie. Les mêmes distances de plantation qu’avec la parcelle d’un tiers sont à respecter. Pour les chemins communaux, se référer à la réglementation communale. Si la haie borde une voie ferrée, une haie vive doit être implantée au minimum à deux mètres. Les arbres doivent se trouver à plus de 6 m de la voie ferrée.

Un choix selon les cultures adjacentes

De façon générale, les espèces qui hébergent des ravageurs ou maladies de quarantaine sont à proscrire, sans pour autant les éliminer des espaces semi-naturels où elles se développent naturellement. L’objectif est de ne pas créer des corridors à leur propagation. D’autres espèces sont à éviter lorsqu’elles sont hôtes de ravageurs problématiques. Quelques-unes sont listées ici.

En vergers de pommes et poires, les aubépines sont ainsi à proscrire. Sensibles au feu bactérien, elles sont une source d’inoculum. L’érable champêtre peut être un hôte de la zeuzère tout comme le noyer commun et le noyer hybride, aussi hôtes du carpocapse des pommes.

En verger de pêchers ou abricotiers, une majorité de prunus dont le prunier myrobolan et le prunellier sont à bannir car ils peuvent être hôtes du virus de la sharka. Le puceron du pêcher, qui s’attaque aussi à de nombreuses cultures maraîchères (voir RFL n°370), se retrouve sur plusieurs essences dont l’arbre de Judée. Le fusain est également hôte de cochenilles du pêcher.

En verger de cerisiers, pour diminuer la pression D. suzukii, toutes les espèces produisant des baies sont à éviter. Le merisier attire aussi le puceron noir du cerisier.

Près des vergers d’oliviers, le frêne oxyphylle est à éviter car il peut être vecteur de la verticiliose.

L’acacia, le peuplier et le genêt sont à éviter du fait d’un réseau racinaire traçant qui devient envahissant. Eviter également les essences avec de fortes épines (certains féviers, acacias) en raison du risque de crevaison des tracteurs. Enfin, certains arbustes tels le cytise sont toxiques pour le bétail.

Plusieurs essences sont particulièrement recommandées car capables d’accueillir une forte diversité d’auxiliaires : le noisetier, le laurier ou viorne tin, les cornouillers mâle et sanguin…

Pour en savoir plus

Haies composites, réservoirs d’auxiliaires, avril 2000, CTIFL (épuisé).

Biodiversité et régulation des ravageurs en arboriculture fruitière, nov 2012, CTIFL.

Guide technique les auxiliaires et l’arboriculture, arbres et arbustes au service de la biodiversité, mai 2012, Chambre d’agriculture Pays de la Loire.

Un grand nombre de Chambres d’agriculture, de conseils départementaux ou d’associations proposent des guides dont une partie est rassemblée sur le site d’Afac-Agroforesterie dans documentation, ressources documentaires, guides techniques.

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