Ail : bien maîtriser le désherbage mécanique
Le désherbage mécanique en culture d’ail est un levier important de réduction de l’utilisation des produits phytosanitaires. Mais il doit être bien maîtrisé pour ne pas impacter négativement la culture.
Le désherbage mécanique en culture d’ail est un levier important de réduction de l’utilisation des produits phytosanitaires. Mais il doit être bien maîtrisé pour ne pas impacter négativement la culture.
L’ail est une culture à cycle long et peu couvrante. Elle est donc très exposée à l’enherbement hivernal et printanier. Non maîtrisé, l’enherbement peut avoir un fort impact sur le rendement et oblige à un rattrapage manuel long, pénible et coûteux. « Une fois les bonnes pratiques préventives mises en œuvre, le recours au désherbage mécanique est impératif », souligne Mikaël Boilloz, conseiller légumes à la Chambre d’agriculture de la Drôme et animateur du Groupe 30 000 Ail, lors d’une conférence de Tech & Bio 2021 (Désherbage mécanique de l’ail : les bonnes pratiques et le matériel disponible). Le désherbage mécanique doit cependant être bien maîtrisé sous peine d’impacter négativement la culture : moins bon enracinement, beaucoup de blessures ou de casse du feuillage…
Des essais réalisés sur culture d’ail par la Chambre d’agriculture de la Drôme à Etoile-sur-Rhône, dans le cadre du projet en cours Pepit, ont comparé le rendement obtenu suite à un désherbage mécanique au rendement obtenu dans un témoin sans désherbage. En 2019-2020, le rendement du témoin zéro désherbage a été de 9,3 t/ha, contre 13,2 t/ha dans la modalité désherbage mécanique, qui a consisté en 2 passages de herses étrilles et 4 binages. En 2020-2021, le témoin zéro désherbage a affiché un rendement de 11,8 t/ha. Une modalité « désherbage mécanique réduit » (1 herse étrille et 3 binages) a fait légèrement mieux, 12,3 t/ha, tandis que la modalité désherbage mécanique (4 herses étrilles et 4 binages) a permis d’atteindre 14,7 t/ha.
Limiter l’herbe en amont de la culture
« L’enherbement non géré entraîne une perte de rendement de 20 à 30 %, observe Mikaël Boilloz. S’il est bien réalisé, le désherbage mécanique n’impacte pas la perte de plants, ni le rendement face à une référence chimique. Et ce, même s’il engendre 5 à 15 % de plantes avec feuilles cassées. Il doit être réalisé dès le début du cycle de la culture ».
Un préalable essentiel au désherbage mécanique est de limiter l’herbe en amont de la culture d’ail. Il faut ainsi choisir des parcelles les plus « propres » possibles et adaptées au désherbage mécanique, en évitant les pentes, la présence de cailloux, les terrains hydromorphes… Les rotations, les faux semis, l’occultation et la solarisation sont des pratiques possibles pour nettoyer les parcelles avant l’implantation de la culture. Mais ces deux dernières ne sont envisageables que sur faibles surfaces et en l’absence de vent. De plus, la solarisation semble peu adaptée au vu du calendrier de la culture d’ail.
Réussir son désherbage mécanique nécessite que la distance de plantation des caïeux soit comprise entre 4 et 5 cm. Le terrain doit être nivelé et ressuyé (délai de 24 à 48 h avant la prochaine pluie). « Il faut éviter d’intervenir tôt le matin car le feuillage est plus cassant à ce moment-là », précise Mikaël Boilloz. Le développement des adventices doit être observé régulièrement afin de pouvoir intervenir rapidement quand c’est nécessaire. Le premier passage doit être effectué au plus tard quand elles sont au stade 2F.
Des stades d’intervention différents selon le matériel
Divers outils sont utilisables par les producteurs, en plein, en inter-rang ou sur le rang. Les stades d’intervention ne seront pas les mêmes suivant le matériel utilisé. En inter-rang, la bineuse peut être utilisée de la prélevée jusqu’au milieu de la bulbaison. Mais le système de guidage doit être suffisamment performant pour des interventions avant le stade 2F. Pour un travail en plein, la herse étrille peut intervenir de la prélevée jusqu’au stade 6F, à une profondeur comprise entre 2 et 3 cm. Le terrain ne doit pas être dur ou très croûté lors du passage. La houe rotative est utilisable en prélevée ou au stade 2F pour un résultat optimal, à une profondeur plus réduite (1 à 2 cm), sur un terrain sans pierre.
« La rotoétrille procure un effet « rattrapage » intermédiaire entre étrille et bineuse », présente Mikaël Boilloz. En plein, elle est à utiliser de préférence en prélevée. Sur le rang uniquement, son utilisation optimale se situe en prélevée ou entre les stades 2F et 4F. Le doigt rotatif est un outil pour le désherbage sur le rang à faible profondeur (1 cm), avec un stade optimal d’utilisation à partir du stade 5F et jusqu’au début de la bulbaison. « Il peut être utilisé en prélevée, mais seulement si on dispose d’un système de guidage performant de type RTK », prévient Mikaël Boilloz. L’utilisation de doigts rotatifs nécessite un sol sans pierre et souple.
Quel matériel pour désherber l’ail ?
Outils en plein : herse étrille, houe rotative, rotoétrille
Outil inter-rang : bineuse
Outils sur le rang : doigt rotatif, élément de rotoétrille, peigne, moulinet, herse étrille rotative
Guidage : RTK, caméra, robotique
Le rattrapage manuel peut sauver certaines situations
Si l’enherbement n’a pas été suffisamment maîtrisé, un désherbage manuel peut s’avérer rentable selon la valorisation de l’ail et l’étendue du chantier. Le temps de travail qu’il nécessite est très variable suivant le salissement de la parcelle, mais peut aller jusqu’à 100 h/ha. « Il vaut mieux intervenir en plusieurs passages, plutôt qu’attendre en vue d’un seul passage », prévient Mikaël Boilloz. L’utilisation d’enjambeur électrique permet de réduire la pénibilité du désherbage manuel et le temps de travail à y consacrer.