La santé caprine passe par la prévention
Le colloque caprin coorganisé le 7 avril par la chambre d’agriculture, le contrôle laitier et le syndicat caprin des Deux-Sèvres a permis de rappeler que la santé des troupeaux caprins passe d’abord par la prévention.
Les maladies, ça s’achète !
Contrairement aux bovins, il n’y pas d’examens sanitaires obligatoires avant une vente de caprin. Or, l’introduction d’animaux est une phase à haut risque sanitaire. Le mélange de microbismes différents est un risque pour l’animal entrant comme pour le troupeau accueillant. En plus du stress de l’introduction, l’animal introduit n’a pas d’immunité contre les germes présents sur l’exploitation d’accueil. L’animal acheté peut aussi être malade ou porteur de maladies absentes du troupeau. « Or, beaucoup de maladies qui entrent dans un troupeau ne sont jamais éliminées » explique Pauline Chaigneau du GDS 79. Pour mieux connaître les pratiques d’introduction d’animaux, Nicolas Ehrhardt de l’Observatoire des maladies caprines (Omacap) a enquêté auprès de 76 élevages de Poitou-Charentes. Plus de la moitié des éleveurs achètent des boucs pour le renouvellement et l’amélioration génétique. « Ils achètent en moyenne deux boucs de dix mois » précise le vétérinaire. Un éleveur sur dix achète régulièrement des chevrettes et un sur onze de façon plus occasionnelle. 12 % des éleveurs interrogés ont aussi acheté des chèvres, souvent pour faire face à une perte de chevrettes.
En listant les maladies achetables (mycoplasmoses, fièvre Q, Caev, paratuberculose…), les intervenants conseillent de privilégier l’auto-renouvèlement génétique du troupeau. « Il est possible de ne faire que des petits lots d’inséminations, uniquement pour produire des boucs » rappelle Lynda Jourdain du Saperfel. Si l’achat s’avère indispensable, on peut aussi limiter les risques par le dépistage en amont de certaines maladies ou la prophylaxie des animaux (vaccins, antiparasitaire, thermisation du colostrum). La quarantaine est peu pratiquée mais elle laisse pourtant le temps de s’adapter progressivement au microbisme du nouvel élevage. Un guide est en préparation pour rappeler les bonnes pratiques d’achat.
Plus de prévention pour limiter le recours aux antibiotiques
Mickaël Treilles du laboratoire d’analyses Sèvres Atlantique a rappelé les conséquences du plan EcoAntibio 2017 pour les éleveurs caprins. « La lutte contre l’antibiorésistance est un défi majeur pour la santé humaine, explique le vétérinaire. Pour cela, la médecine humaine et vétérinaire doit avoir un usage prudent et raisonné des antibiotiques. » Installé progressivement à partir de 2012, le plan EcoAntibio 2017 vise une réduction de 25 % de l’usage des antibiotiques vétérinaires en cinq ans avec un accent mis sur les antibiotiques considérés comme critiques en médecine humaine. Après avoir instauré un prix unique des antibiotiques en 2014 et instauré des guides de bonnes pratiques d’emploi en 2015, le législateur a limité en mars 2016 la prescription des antibiotiques critiques. Ainsi, l’examen des animaux et des examens en laboratoire sont désormais obligatoires pour prescrire certains antibiotiques tels que l’Excenel, le Naxcel ou le Cobactan. « Cette restriction n’est pas une interdiction mais il va falloir considérer les antibiotiques comme précieux. Aux Pays-Bas, les vétérinaires n’ont plus le droit qu’à trois antibiotiques et les éleveurs doivent donc accepter plus de mortalité ». En plus du respect du protocole de soin, les éleveurs sont aussi invités à augmenter les mesures de prévention tel que le transfert colostral, la vaccination ou l’autovaccination. La biosécurité en élevage est aussi à soigner lors de l’introduction d’animaux ou la gestion des malades.
Les cellules, ça se soigne
Lynda Jourdain du Saperfel, le contrôle laitier des Deux-Sèvres, a montré, à travers l’exemple d’un éleveur de 180 chèvres en ration sèche que l’on pouvait réduire le niveau cellulaire au prix de long effort. En 2012, il était toujours à plus de 1,5 million de cellules dont six mois à plus de deux millions de cellules. Progressivement, cet éleveur a réussi à réduire le niveau moyen pour n’être plus que trois mois à plus de deux millions et cinq mois à moins de 1,5 million.
Pour y parvenir, il a créé six lots en fonction du rang de lactation et du statut cellulaire pour établir un ordre de traite des plus saines au plus infectés. « C’est sûr que l’on se met des contraintes et que l’on perd du temps mais c’était un choix de l’éleveur et sa lutte commence à payer ». Le sixième lot, les gravement infectées, démarre la lactation à trois millions de cellules et la termine à plus de six millions. C’est dans ce lot-là que seront prises en priorité les reformes. Les chèvres infectées reçoivent un traitement au tarissement et, depuis 2014, toutes les chèvres et les nullipares sont vaccinées pour un prix de 4,5 à 5 euros par chèvre. « Le vaccin Vimco n’est pas la solution miracle mais c’est un outil en plus dans l’arsenal, apprécie Lynda Jourdain. Il semble efficace pendant au moins six mois et on observe des niveaux cellulaires plus bas sur les primipares. » Autres éléments de prévention, la machine à traire et vérifier annuellement et tous les trayons reçoivent un produit de trempage après la traite. Les mammites cliniques sont aussi repérées et traité rapidement.
Vers la reconnaissance des mycoplasmes dans le lait
Jacquemine Vialard de l’Anses de Niort cherche à savoir s’il est possible de connaître le statut sanitaire d’un cheptel vis-à-vis de la mycoplasmose à partir de l’analyse de lait de tank. Un test permettrait de connaître le statut infectieux des troupeaux et donc de sécuriser l’échange d’animaux en limitant les ventes provenant de troupeaux infectés mais cliniquement sains. Si les analyses PCR, à environ 30 € l’analyse, permettent de détecter la présence de mycoplasme caprine, la difficulté d’interprétation vient de la variation d’excrétion d’un mois à l’autre. Même si l’Anses de Niort est encore dans la phase d’exploitation des résultats de deux ans d’étude dans dix troupeaux de Rhône-Alpes et Poitou-Charentes, il semble qu’il faille au moins réaliser deux prélèvements à trois ou quatre mois d’intervalle pour identifier le risque de présence des mycoplasmes. L’Anses a testé deux modes deux prélèvements, soit en analysant directement le lait soit en mettant quelques gouttes sur un papier buvard FTA, un système qui permet de stocker l’ADN. Ce système donne des résultats similaires à l’analyse du lait. « Le buvard est beaucoup plus pratique à l’usage que les échantillons de lait à conserver au froid, apprécie Jacquemine Vialard. Une fois sec, il suffit de glisser le buvard dans une enveloppe et l’envoyer au laboratoire. »