Assemblée générale de la FNB
Un modèle d’élevage unique sur la planète
Réunie en congrès à Evreux du 6 au 8 février, la Fédération nationale bovine avait choisi comme thème la nécessité de la cohérence entre les politiques publiques et l’évolution du modèle d’élevage.
Réunie en congrès à Evreux du 6 au 8 février, la Fédération nationale bovine avait choisi comme thème la nécessité de la cohérence entre les politiques publiques et l’évolution du modèle d’élevage.
« Les éleveurs travaillent, chaque jour, au service des populations. Ils incarnent un modèle unique sur la planète : familial, à taille humaine, durable, vertueux sur le plan environnemental et dans le respect de l’animal », a entamé Bruno Dufayet le président de la FNB, lors de son discours prononcé devant Stéphane Travert, le ministre de l’Agriculture, le 7 février à Evreux en Normandie. « Nous avons fait le choix, collectivement, de nous mobiliser dans la défense de ce modèle et dans sa constante amélioration pour répondre toujours mieux aux 98 % des Français qui aiment toujours – et pour très longtemps encore – manger notre viande. » La FNB se positionne ainsi à l’écoute de la société et met en avant son ouverture au monde. « Comprenons nous bien. Quand nous nous opposons à des accords de libre-échange, nous ne prônons pas une fermeture de notre marché sur lui-même ! Nous refusons ces importations parce qu’elles ne correspondent ni à une demande des consommateurs français et européens – le marché européen de la viande bovine est largement autosuffisant –, ni aux standards de production imposés au sein de l’Union », a insisté Bruno Dufayet. « Nous souhaitons exporter nos produits vers des pays non producteurs, au sein desquels notre modèle d’élevage et l’excellence de nos produits sont plébiscités. » Les différents orateurs ont d’ailleurs insisté au cours des deux jours de travaux sur la fierté du métier d’éleveur de bovins viande et de son environnement professionnel. « Ce n’est nullement de compassion dont nous avons besoin, et si la solution à la crise de l’élevage pouvait se régler dans les seules interprofessions, cela aurait été fait depuis des années ! Alors nous attendons du Gouvernement qu’il remplisse sa part du marché et ne cède pas à la facilité. » Si le plan de filière a été longuement salué par le ministre, les signaux envoyés par les pouvoirs publics vont en effet plutôt à contre-courant de ce cap. En premier lieu sur la question du ciblage de l'ICHN, mais aussi sur celle de l'aide couplée aux légumineuses fourragères, des aides aux veaux sous la mère, des outils de gestion des risques adaptés au secteur bovins viande.
Faire reconnaitre le modèle par la FAO et par les ONG
La FNB a consacré une bonne partie des travaux de son congrès à la reconnaissance du modèle d’élevage français par les organisations non gouvernementales nationales et internationales, et par les relais médiatiques. « Il n’y a pas un élevage d’herbivores français type, mais des élevages, en lien avec des territoires et des hommes », a présenté Emmanuel Coste de la Confédération nationale de l’élevage (CNE). La valeur forte c’est qu’en France, ce sont les mêmes hommes qui sont forces de travail, porteurs du capital et décisionnaires. La CNE a récemment intégré deux plateformes de la FAO (Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture) et accède ainsi aux débats. « La position de la FAO a complètement changé par rapport à 2006 et au rapport intitulé 'L’ombre portée de l’élevage'. Elle reconnait désormais le rôle positif de l’élevage pour le développement. » Pour autant, dans la typologie actuelle des systèmes d’élevage qu’utilise la FAO, la France (et toute l’Europe) est classée dans les systèmes intensifs, avec des pays comme les USA. « Notre prochaine étape est de convaincre la FAO d’amender sa typologie pour faire reconnaitre notre spécificité », explique Emmanuel Coste.
Débat sur l’évolution de la charte des bonnes pratiques d’élevage
Depuis 2014, l’interprofession bétail & viande mène un travail de concertation avec quatre ONG environnementales. « Les points d’accord sont nombreux : le caractère herbager, le rôle dans la biodiversité et le territoire, le niveau d’autonomie alimentaire des élevages », rapporte Caroline Guinot, responsable de la commission Enjeux sociétaux d’Interbev. « On arrive aussi à une concertation sur le Manger moins de viande mais de la viande de meilleure qualité , et sur le fait que la viande française a des atouts de qualité.» Cette année, la même démarche est engagée avec quatre ONG de protection animale (Welfarm, CIWF, OABA et Fondation pour le droit animal). D’après une étude réalisée par Sofra conseil (pour Interbev, le CNIEL et la CNE), les consommateurs ne connaissent pas la charte des bonnes pratiques d’élevage, mais quand on la leur présente, ils trouvent que c’est un outil très intéressant.
"Globalement, la charte des bonnes pratiques d’élevage a des fondamentaux solides », analyse Clarisse Hamon, consultante au cabinet Sofra conseil. « Mais elle n’apporte pas ou peu d’assurance sur les thématiques émergentes que sont la vie de l’animal, son transport et sa mort. » Les ONG ne demandent pas à la filière de l’élevage d’être tout de suite dans l’excellence sur ces thèmes, mais elles tiennent au principe d’une démarche d’amélioration continue et à un contrôle extérieur par un organisme indépendant. « Il faut garder ce lien avec l’opinion publique, pour que l’agriculture ne soit pas marginalisée, mais demeure un pan de notre économie », a conclu Philippe Boehmler, membre du bureau de la FNB et référent bien-être animal. « Il s’agit désormais de débattre pour définir jusqu’où les éleveurs sont prêts à aller. »
Du travail en perspective sur la loi de conclusion des EGA
Le ministre de l'Agriculture a voulu rassurer les éleveurs rassemblés au congrès de la FNB sur le projet de loi sur l’alimentation des conclusions des États généraux de l’alimentation (et des ordonnances associées). "Il comportera de contraintes et des contreparties en cas de non-respect des clauses. Mais pour que la loi fonctionne, il sera essentiel que vous vous en saisissiez », a prévenu Stéphane Travert. Ce projet sera présenté à l’Assemblée nationale en mars. Jean-Baptiste Moreau, député La République en marche et éleveur de limousines dans la Creuse, en est rapporteur. Il a lui aussi appelé les représentants professionnels à se mobiliser auprès de leurs députés pour que soient apportés les amendements nécessaires pour que la future loi fonctionne. Ce dont Bruno Dufayet ne manquera pas de s'assurer car en l'état, « les nouvelles obligations sont enore trop floues, la référence aux indicateurs de coûts de production trop imprécise, et les contrôles et sanctions insuffisants. »
L’élevage français face aux dix-sept objectifs de développement durable des Nations Unies
Pour faire valoir le modèle français, la Confédération nationale de l’élevage s'appuie sur les travaux de recherche notamment de l’Inra, et s'approprie le « modèle de la marguerite », qui inventorie l’ensemble des services rendus par l’élevage à la société. Ces atouts sont placés face aux dix-sept objectifs de développement durable pour 2030 des Nations Unies pour l’agriculture et l’alimentation. Tous les grands pays agricoles en sont signataires, y compris les USA, et se sont par là engagés à ce que leurs politiques agricoles publiques y soient conformes.