Qu’attendre d’un sorgho fourrager au pâturage en été ?
Les sorghos multicoupes font partie des alternatives pour résister aux épisodes de sécheresse estivale, mais une vigilance particulière doit être portée à la hauteur dans les parcelles de pâturage afin de limiter à la fois les risques de toxicité et les refus.
Testées par Arvalis sur douze sites expérimentaux, quatre variétés de sorgho multicoupe démontrent leur résistance aux épisodes de sécheresse estivale : Sudan grass, Sudan x Sudan BMR (1), Sudan x Bicolore et Sudan x Bicolore BMR. « Les rendements en 2022 étaient similaires à ceux de 2021, soit entre 8 et 10,5 tonnes de matière sèche (tMS) par hectare et autour de 1 tonne de MAT produite sur l’année (deux fauches) selon les variétés », illustre Carole Gigot, ingénieure fourrages à Arvalis lors d’une visite d’essai le 18 juillet. Les sorghos avaient été implantés sur la deuxième quinzaine de mai.
10 à 15 % de MAT avant épiaison
Comme pour les graminées prairiales, l’avancement du stade de végétation dégrade la valeur nutritionnelle des sorghos. Ils contiennent 15 à 16 % de MAT et 0,9 UFL/kgMS à épis 10 cm au-dessus du plateau de tallage, « ce qui convient pour des animaux à forts besoins. Cependant, à ce stade, le rendement est encore faible, le pâturage est le mode d’exploitation le plus indiqué si la hauteur de la plante est supérieure à 60 cm », précise Carole Gigot. Au stade dernière feuille étalée, la MAT se réduit autour de 10 %. « À ce stade, la récolte en ensilage devient intéressante si le pâturage par des animaux aux besoins modérés n’est pas possible. » Au-delà du 5-10 août, l’épiaison et la floraison font passer la teneur en MAT en dessous des 10 %.
90 jours de pâturage
En 2023, des lots de génisses ont pâturé des cultures estivales de sorghos multicoupes de deux types : Sudan x Sudan Piper et Sudan x Bicolore non BMR Lurabo à un chargement de 32 ares par UGB. Ces variétés ont chacune permis trois cycles de pâturage sur 90 jours du 28 juin au 16 septembre, pour des croissances de 745 et 685 grammes par jour respectivement. « Cet écart peut s’expliquer tant par une variation individuelle des performances des génisses que par un rapport tige/feuille plus important du sorgho Lurabo », relativise Éric Moreau, technicien d’expérimentation sur la ferme expérimentale des Bordes, en Indre, où l’essai est réalisé.
La hauteur idéale en entrée de pâturage des génisses s’est révélée entre 60 et 140 centimètres. À partir de 160-180 centimètres, les génisses ont privilégié la consommation des feuilles et des repousses, laissant des refus allant jusqu’à 50 % de la biomasse.
Tourner rapidement pour limiter les refus
« Trois semaines suffisent pour qu’un sorgho de hauteur pâturable atteigne 2 mètres. Comme ces plantes se développent très rapidement, le chargement doit permettre de changer rapidement de parcelle afin de limiter les refus », précise Éric Moreau. La ferme expérimentale des Bordes a d’ailleurs passé le chargement à 24 ares par UGB pour les essais en cours en 2024. « Débrayer la moitié des parcelles permettrait d’arriver en deuxième cycle sur des parcelles à 1,10 mètre de hauteur de manière régulière, poursuit l’expert. Dans ce cas, la fauche réalisée au premier cycle risque néanmoins d’être plus humide, autour de 15-20 % de MS contre les 30 % visés pour un ensilage de bonne qualité. »
En raison de cette vitesse de pousse, l’association des sorghos multicoupes avec des légumineuses a peu d’intérêt. « Ce sont des graminées hautes, qui montent rapidement et ne laissent pas le temps aux légumineuses de se développer », explique Carole Gigot.
Repères
- 12-13 °C : température du sol pour semer les sorghos multicoupes
- 8 à 10,5 t de MS/ha de rendement
- 1 t de MAT/ha environ en deux cycles de récolte
- 60 cm : hauteur minimale à l’entrée de la parcelle (en dessous, risque de toxicité)
- 180 cm : hauteur maximale à l’entrée des parcelles