A l´EARL de Val Châtain en Corrèze, broutards limousins et agneaux de contre-saison menés de front
Après avoir repris l´exploitation de ses beaux-parents à Condat/Ganaveix, Jean-Claude Dezès a conservé le système mixte.
Depuis qu´il a repris l´exploitation de ses beaux-parents, Jean-Claude Dezès a conservé la mixité ovins/bovins du système d´origine. Le petit atelier porcin a lui disparu. « Pourtant, après avoir travaillé onze ans comme technico-commercial bovin dans une coopérative de Dordogne, j´avais davantage la fibre bovine. » Remplacer les brebis par des vaches aurait engendré des investissements trop lourds. Dès le départ, cela aurait amputé -et sur le long terme- les résultats économiques et la capacité d´autofinancement. Le cheptel bovin a été augmenté par croissance interne alors qu´en ovin, l´effectif d´aujourd´hui est le même que lors de l´installation. La construction d´une bergerie tunnel a été décidée afin de travailler dans de meilleures conditions que dans les vieux bâtiments.
Malgré des coups de main ponctuels, l´option retenue a été de simplifier le système de départ afin de pouvoir travailler seul tout en accroissant l´importance économique de l´exploitation. Des choix ont été faits sur la conduite du cheptel et le système fourrager. Ils pénalisent certains résultats techniques, mais sont cohérents avec la volonté de conserver des horaires de travail raisonnables pour ménager du temps pour la vie de famille tout en obtenant des résultats économiques satisfaisants.
L´option tout herbe a vite été retenue mais n´exclue pas la rénovation ponctuelle de certaines prairies. Pour les foins qui assurent la base de l´alimentation hivernale des deux troupeaux, la fenaison est désormais réalisée avec un voisin après avoir opté pour l´achat en commun du gros matériel nécessaire afin de travailler rapidement et dans de bonnes conditions. Aujourd´hui, mener seul de front une bonne quarantaine de Limousines et quelques 120 brebis ne semble pas poser de problèmes majeurs à l´ancien technicien. Ce dernier tient d´ailleurs à couper régulièrement les ponts avec son activité et prends quinze jours de vacances par an.
« Nous partons chaque année une semaine en février pour faire du ski et une autre en été. C´est alors mon fils qui me remplace. » L´exploitation se répartit en deux sites distants de quatre kilomètres et tout en veillant à maintenir de bons résultats techniques, la simplification des tâches a amené à faire certains choix.
« Je ne me lève plus la nuit. La bergerie est à quatre kilomètres de mon domicile. Me lever deux fois par nuit pendant un mois pour au final ne sauver que trois ou quatre agneaux, cela ne vaut pas le coup. Pour les vêlages c´est la même chose. Je passe voir le soir avant de me coucher, puis le lendemain matin à la première heure. »
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©F. d´Alteroche |
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Les ovins assurent 25 % du CA des ventes d´animaux
Le troupeau est mené en un lot et se compose de brebis F1. Toujours pour des raisons de simplification, tout le renouvellement est chaque année acheté à l´extérieur. « En février mars, j´achète des agnelles nées à l´automne. D´une année sur l´autre, elles viennent toujours du même élevage et sont issues du croisement de brebis limousines avec un Berrichon du Cher. Je renouvelle à raison d´une moyenne de 25 agnelles par an. Je procède ensuite à un croisement terminal avec du Rouge de l´Ouest. Tous les agneaux sont systématiquement vendus pour la boucherie. Acheter le renouvellement m´évite de nourrir les agnelles jusqu´à six mois et d´inclure leur production dans la gestion de mon troupeau. » Pour mener de front les deux productions, les agnelages ont lieu principalement en novembre et décembre avec des ventes d´agneaux avant Pâques, ce qui lui permet d´être plus disponible pour les vêlages de février mars, sachant que l´impératif pour les bovins est « pas de vêlages après avril. » Pour obtenir cet agnelage de contre-saison, Jean-Claude Dezès est rigoureux sur la mise en lutte qui est naturelle.
Les béliers rentrent le premier juin dans le troupeau après un flushing par apport d´avoine du 10 mai au 20 juin. Au début, les béliers sont alternés avant d´être lâchés tous les cinq ensemble. « C´est surtout la période de vente qui fait le prix des agneaux. » Le bilan commercial de 2003 fait pour l´instant état de 121 agneaux vendus à une moyenne de 103,3 euros pièce. « J´enlève les béliers début novembre. Quelques mises-bas ont cependant lieu en début d´automne. Elles résultent de brebis saillies au printemps par de gros agneaux un peu précoces et la plupart d´entre elles agnellent à nouveau au début de l´année suivante. » Le point faible de l´élevage réside dans un taux de mortalité de 16,6 % l´an dernier pour les agneaux. Une mortalité qui n´a pas lieu lors de l´agnelage mais davantage dans les dix jours qui suivent. La prolificité du cheptel (136,8 %) a de plus été pénalisée par un faible taux de mises-bas (84,8 %).
Pour Sylvie Denis, technicienne ovine à la Chambre d´agriculture, sans qu´il y ait forcément une relation de cause à effet, l´absence de vide sanitaire dans la bergerie tunnel et une densité d´animaux un peu élevée dans le bâtiment d´autant que les brebis sont plutôt de gros format sont deux pistes à explorer pour expliquer ces contre-performances.
Les ovins assurent exactement 25 % du chiffre d´affaires total des ventes d´animaux de l´exploitation et représentent aussi à quelques pourcents près, 25 % des UGB détenus. Les ventes bovines ont principalement lieu de septembre à février et les agneaux suivent de février à mai.
Au final, avec un produit brut total de 74 045 euros, l´exploitation dégage un EBE de 37 151 euros soit exactement la moitié du produit brut. « Ce qui conditionne aujourd´hui ma façon de faire sur mon exploitation, c´est le chargement, le chiffre d´affaires et le besoin en main-d´oeuvre », souligne Jean-Claude Dezès qui n´hésite d´ailleurs pas à préciser que s´il vend l´essentiel de ses broutards non primés c´est pour rester au régime du forfait.
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Cet article est extrait du Dossier de Réussir Bovins Viande du mois d´Octobre 2003. Sous le titre « Bovins-ovins : redorer le blason du système mixte », la revue montre que « brebis et bovins de race à viande sont deux productions très complémentaires. Une complémentarité bénéfique tant sur le plan technique qu´économique » (RBV nº98).