Jean-Paul Couatrd, de la Chambre d'agriculture du Maine-et-Loire
"Le vêlage à deux ans est une technique pour une population ciblée"
Le vêlage à 2 ans concerne encore peu d’éleveurs dans les Pays de la Loire. Mais il suscite des questionnements. Cette pratique demande une très bonne conduite des animaux.

Quelles sont les pré-requis en matière génétique pour pouvoir envisager cette technique?
J.-P. Coutard - Il convient d’abord de maîtriser les facilités de naissance, ce qui passe nécessairement par l’insémination avec des taureaux adéquats pour sécuriser cet aspect. On sait que les « taureaux à génisses » sont en général très moyens en aptitudes bouchères. Mais cela vaut aussi pour leur utilisation sur des génisses qui vêlent à 3 ans. Il s’agit aussi, pour atteindre le poids requis pour la mise à la reproduction (au minimum 60 % de leur poids adulte), que les génisses réalisent d’excellents démarrages sous la mère. Les qualités maternelles et en particulier l’ALait doivent être de bon niveau. Le retard pris sur le plan de la croissance dans cette phase est difficilement récupérable entre 8 et 15 mois. Au-delà du sevrage, il faut éviter les accélérations de croissance à contre-temps: les croissances trop élevées en hiver pénalisent la croissance au pâturage suivant.
Quel est pour vous le risque principal du vêlage à 2 ans ?
J.-P. C. - Il s’agit d’être extrêmement attentif à l’alimentation de la primipare. Elle arrive au vêlage en pesant entre 80 et 85 % de son poids adulte et a donc encore beaucoup de croissance à faire, en allaitant son veau, et ceci avec un appétit encore plus faible que celui de primipares de 3 ans. En hiver, il est nécessaire qu’elles soient conduites à part des multipares. Les systèmes herbagers sont moins avantagés que les systèmes semi-intensifs pour assurer ce soutien alimentaire, car ils subissent davantage les aléas climatiques avec une valeur des fourrages pouvant fortement varier d’une année à l’autre. Sur cette étape, il faut savoir ne pas chercher à faire d’économies, sous peine de voir la mise à la reproduction échouer. Or ce sont les meilleures souches du troupeau qui sont aptes les premières à vêler à 2 ans et qui risquent d’être ainsi « sacrifiées ».
Cette technique va-t-elle se développer dans la région des Pays de la Loire ?
J.-P. C. - Nous étudions le vêlage à 2 ans dans le cadre de notre travail régional sur l’élevage des génisses, qui sera publié fin 2009 ou début 2010. C’est une technique très peu utilisée dans la région. Dans la base de sélection des Pays de la Loire, une quarantaine d’éleveurs font vêler au moins le tiers de leurs génisses avant l’âge de 28 mois. Ils représentent 4 % de la base de sélection. Et ceux dont plus des trois quarts des génisses vêlent à 2 ans sont vraiment très rares dans la région. Les éleveurs utilisant cette technique ne font vêler qu’une partie de leurs génisses à 2 ans. On sent cependant de la part des éleveurs un questionnement sur le vêlage à 2 ans avec la disponibilité d’informations grâce à l’étude de Jalogny. Nous avons beaucoup communiqué sur le vêlage à 30 mois qui concerne les éleveurs organisés avec deux périodes de vêlage. Le vêlage à 2 ans représente un moyen de gagner en productivité du troupeau pour ceux qui ont une seule période de vêlage.