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"Je suis intransigeant sur le sanitaire et l’hygiène de mon troupeau de limousines"

Éleveur dans l’Allier, Bruno Chêne est depuis son installation très à cheval sur la biosécurité. D’abord car cela lui permet d’avoir des animaux en bonne santé, donc productifs. Un cheptel sanitairement irréprochable est également un atout pour valoriser au mieux ses animaux.

« La protection sanitaire de mon cheptel démarre par de bonnes clôtures électriques sur toutes mes parcelles. Elles sont régulièrement entretenues et souvent doublées pour interdire les contacts mufle à mufle avec les cheptels des voisins », souligne Bruno Chêne, sélectionneur limousin à Lurcy-Lévis dans le nord-ouest de l’Allier avec 80 vêlages annuels sur 118 hectares essentiellement consacrés à l’herbe.

« Quand il n’y a pas de contacts entre cheptels on limite beaucoup tous les facteurs de risque », souligne celui qui est également administrateur du GDS de l’Allier. Installé depuis 1984 et dès le départ très pointilleux sur ce volet, Bruno Chêne « touche du bois » mais n’a jamais été confronté ni à l’IBR ni à la BVD.

Pour autant, pour s’assurer que tous ses animaux sont bien indemnes de cette dernière maladie, il a fait partie des premiers éleveurs de son département à utiliser les boucles à prélèvement de cartilage. « Quand on vend des reproducteurs (28 mâles et quelques génisses l’an dernier), il faut être irréprochable sur les garanties sanitaires que l’on apporte à nos animaux. »

Trier les visiteurs

Et à côté des clôtures, inutile de dire que l’on ne rentre pas dans ses stabulations comme dans un moulin. L’accès en est fermé depuis la voie publique. Les visiteurs sont sévèrement triés et tous doivent évidemment avoir des bottes propres et passer dans le pédiluve au préalable. « Je suis très à cheval sur les horaires avec les différents interlocuteurs qui viennent sur mon élevage. »

Les animaux malades sont isolés dans des cases « infirmerie » réservées à cet usage lesquelles sont régulièrement désinfectées, tout comme le matériel lié aux soins ou à l’obstétrique. Idem pour le couloir fixe de contention situé en périphérie du bâtiment principal. Le vétérinaire a seulement accès à ces cases et non à celles occupées par les animaux en bonne santé. « Les vétos s’y sont faits. Je suis intraitable sur ce volet. Tout particulièrement en début d’hivernage quand les veaux ont moins de 5 mois. »

De la même façon, les animaux destinés à la vente pour la viande et non pour l’élevage rejoignent, une fois triés, un second bâtiment dans lequel les acheteurs peuvent venir les voir. Mais l’entrée de la stabulation des vaches suitées leur est rigoureusement interdite. Les éventuelles journées portes ouvertes sont rares et strictement encadrées. « Je donne toujours un coup d’œil aux bottes ou chaussures des visiteurs, puis pédiluve pour tous à l’entrée, puis surbottes obligatoires et je ne laisse jamais personne entrer dans les cases. »

Désinfection après curage

Le bâtiment des vaches suitées est paillé à la main avec, selon les disponibilités, mise place d’une sous-couche de plaquette sous la paille. « Pailler à la main évite la poussière, favorise une bonne surveillance et contribue à accoutumer les animaux à ma présence. Des bêtes non stressées, confiantes, faciles à toucher, cela fait partie du 'package' sanitaire ! De toute façon des bovins en état de stress, dès qu’ils voient quelqu’un s’approcher ne profitent pas et pour moi ce stress favorise l’émergence de certaines pathologies. »

Les quais à l’arrière des cornadis sont curés chaque semaine. La litière paillée l’est deux fois dans l’hiver (animaux rentrés début décembre) puis une fois les animaux sortis (début avril). Les cases sont ensuite pour partie passées au nettoyeur haute pression puis désinfectées en insistant à proximité des abreuvoirs. « Je n’ai pas de chien. J’essaye d’éliminer au plus tôt les pigeons qui cherchent chez moi le gîte et le couvert et je dératise régulièrement. » La place d’équarrissage est toujours la même, à l’écart des bâtiments. « Je n’ai pas de cloche à cadavre, mais je mets une bâche. »

Pas de matériel en Cuma

La totalité du matériel nécessaire à la récolte des fourrages est en propriété pour profiter de la moindre fenêtre météo. « Et je suis pointilleux pour son entretien ! Cela me permet d’abord de le faire durer et il est toujours disponible. C’est important. J’aime faucher de bonne heure pour avoir des fourrages très riches. Cela a un impact sur la santé et les performances de mon troupeau et me permet - comme cet hiver - de me passer de concentrés pour les vaches suitées. »

Bruno Chêne n’a pas de matériel en Cuma. Il serait pour lui de toute façon inenvisageable d’utiliser en commun du matériel de pesée, contention ou transport d’animaux. La seule exception est la cage de contention pour veaux utilisée en commun avec sa fille, installée depuis deux ans à une soixantaine de kilomètres, elle aussi avec un élevage de limousines. « Et on la nettoie et désinfecte chacun après chaque utilisation ! »

Les seules introductions d’animaux concernent les taureaux reproducteurs à raison d’un à deux par an selon les opportunités, à condition qu’ils aient moins de 26 à 27 mois. « Je n’en achète pas en copropriété, et je ne procède pas non plus à des achats en urgence pour 'dépanner'. Je m’arrange pour ne pas être à court de taureaux. Il est à mon avis préférable de faire inséminer plutôt que de procéder à un achat en urgence mal réfléchi. »

Avant de récupérer son achat, Bruno Chêne demande au naisseur de réaliser chez lui une préquarantaine. Une fois réceptionné, le jeune taureau est isolé du reste du troupeau tant que les dépistages à l’introduction n’ont pas livré leur verdict.

Et aux rares taureaux achetés en station, Bruno Chêne fait suivre le même protocole. Amener des animaux à des rassemblements ou des ventes est réalisé avec réticences. « Si les animaux ne sont pas achetés sur place et livrés dans la foulée, je ne refais pas pour autant de contrôle sanitaire à l’entrée mais une fois de retour chez moi je les isole en quarantaine d’observation. »

Gagnant sur deux tableaux

Tout le cheptel est vacciné BVD. Les différents tests préventifs pour la besnoitiose se sont jusqu’à présent tous avérés négatifs. « Quand on vend des reproducteurs (28 mâles et quelques génisses l’an dernier), il faut être intransigeant sur les garanties sanitaires. Il en va de la réputation de son élevage. »

En pâture, vaches et génisses sont conduites en petits lots (pas plus de 16 femelles) pour un pâturage tournant pas toujours forcément très académique. En revanche les quelques parcelles les plus éloignées, donc potentiellement les plus à risques, sont d’abord utilisées pour la fauche. « Je les fais ensuite pâturer avec des vaches que j’ai décidé de réformer dans de brefs délais. Je suis peut-être un peu dans l’extrême sur le sanitaire mais j’estime être gagnant sur deux tableaux. Cela a jusqu’à présent contribué à me permettre d’obtenir de bons résultats techniques pour la productivité du troupeau. J’estime ensuite que cela contribue à contenir efficacement les frais vétérinaires qui, sur la dernière campagne de vêlage se sont limités aux antiparasitaires et vaccins.

 

Bien nourri et minéralisé

Le cheptel est en vêlage d’automne et fin octobre 80 % des vêlages sont réalisés. Les mises bas se déroulent en bâtiment, mais le couple mère-veau est remis à l’herbe après désinfection systématique des nombrils juste après la naissance. « Je ne laisse pas traîner les placentas. Une fois les vaches délivrées, je les enterre. »

Pour avoir des vaches fertiles et des veaux en bonne santé, Bruno Chêne insiste sur le suivi de l’alimentation et de la minéralisation. « Si on veut un cheptel productif, il faut un bon sanitaire, mais également des fourrages de qualité », souligne cet adepte des fauches précoces chez qui l’essentiel des stocks repose sur l’enrubannage et le foin, toujours récoltés tôt, dès que la météo le permet.

« De bons fourrages, des vaches correctement minéralisées, cela se traduit par des veaux vite debout pour aller téter un colostrum de bonne qualité avec des vaches fertiles qui refécondent rapidement tout en limitant les frais liés à la complémentation. »

La crainte de la faune sauvage

La proximité de la forêt de Tronçais et le risque lié à la surabondance de la faune sauvage et en particulier les sangliers et blaireaux est particulièrement redouté. « Cela me préoccupe pour les années à venir. J’ai dernièrement posé des appareils photos à déclenchement automatique. Et j’ai appris pas mal de choses sur les animaux qui se promènent la nuit sur les parcelles, souligne Bruno Chêne. Les chevreuils viennent occasionnellement boire dans les abreuvoirs à niveau constant. Mais je me suis surtout rendu compte que les blaireaux apprécient de venir lécher et gratter les seaux de complément minéraux. »

Depuis, ces derniers ne sont plus posés à même le sol mais dans des auges métalliques dans lesquelles les blaireaux ne peuvent grimper. Pour limiter les risques liés à la douve et aux paramphistomes, les bovins ne boivent plus dans les mares. « J’utilise des abreuvoirs de 5 mètres de long, 80 centimètres de large avec un niveau constant branchés sur le réseau qui permettent à plusieurs bovins de boire simultanément. Enfin je piège les ragondins, mais c’est un travail sans fin tellement l’espèce est prolifique… »

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