ESB: "pas de risque accru dans la réalisation des farines animales"!
Réaction de Jeanne-Brugère-Picoux, professeur honoraire de l’école nationale vétérinaire d’Alfort, spécialiste de la tremblante du mouton et de l'ESB, après la publication d’une étude publiée par des chercheurs de l’Inra et de l'école nationale vétérinaire de Toulouse.
Réaction de Jeanne-Brugère-Picoux, professeur honoraire de l’école nationale vétérinaire d’Alfort, spécialiste de la tremblante du mouton et de l'ESB, après la publication d’une étude publiée par des chercheurs de l’Inra et de l'école nationale vétérinaire de Toulouse.
Dans l’étude publiée le 16 décembre dans la revue Pnas (1), des chercheurs de l’Inra indiquent avoir trouvé une « explication expérimentalement étayée » à l’apparition de l’ESB dans les années 80. Ces résultats posent selon eux « la question de la ré-émergence » de l’ESB via la tremblante atypique. Et plaident pour « le maintien des mesures les plus fondamentales » comme l’interdiction des farines animales.
Des propos alarmistes auxquels réagit Jeanne Brugère-Picoux, professeur honoraire de l'École nationale vétérinaire d'Alfort. Voici sa réaction :
« Depuis longtemps les chercheurs ont démontré les variations pouvant être observées lors des essais de transmission des prions d’une espèce à l’autre, la barrière d’espèce pouvant expliquer les échecs souvent observés. Très tôt, il avait été démontré que, lors de ces essais de transmission, le prion d’une espèce s’adaptait à la nouvelle espèce inoculée. Des passages aveugles étaient souvent nécessaires du fait que la maladie était subclinique (pas de symptômes ni de mortalité) et l’adaptation à la nouvelle espèce s’accompagnait après plusieurs passages d’une diminution des temps d’incubation de la maladie avec une mortalité pouvant atteindre un taux de 100%. Le prion s’était alors adapté à la nouvelle espèce cible. La diversité des souches de prions rencontrées dans les maladies à prions animales peut aussi expliquer l’émergence d’un nouveau type de prion au cours de ces expérimentations.
Ce fut le cas pour les travaux réalisés par des chercheurs à l’école nationale vétérinaire de Toulouse en association avec d’autres laboratoires européens. Dans une étude publiée dans Proceedings of the National Academy of Sciences, le 16 décembre (1), ces chercheurs ont montré que la transmission d’isolats provenant de 5 cas européens de tremblante atypique peut conduire à l’émergence d’une souche d’encéphalopathie spongiforme classique (ESB-c = agent bovin responsable des cas de variant de la maladie de Creutzfeldt-Jakob) .
Ce n’est pas pour autant que l’on peut considérer de façon formelle que la tremblante atypique peut être à l’origine des cas d’ESB-c, car il est vraisemblable que la maladie existait sous une forme rare avant la crise de l’ESB et ce dans de nombreux pays dont la France ou les Etats-Unis.
De même, il ne faut pas considérer que ce travail démontre un risque accru dans la réutilisation des farines animales (ou protéines animales transformées -PAT) dans l’alimentation des porcs et des volailles (espèces omnivores que nous avons transformées en végétaliens depuis 2001). Car les précautions préconisées depuis la crise de la vache folle ont permis de prévenir tout risque de recyclage des prions dans l’alimentation animale (les PAT sont utilisés dans l’alimentation des animaux de compagnie). L’important est surtout d’éviter tout « cannibalisme » dans la distribution de ces aliments, en particulier en maintenant leur interdiction chez les ruminants. »
(1) The emergence of classical BSE from atypical/Nor98 scrapieº; Alvina Huor et al.º; PNASº; first published December 16, 2019 en pièce jointe
https://www.reussir.fr/lait/les-equarrisseurs-acteurs-de-leconomie-circulaire