[Covid-19] Fort impact de la pandémie sur la filière viande bovine des USA
Au plus fort de la crise, les abattages de bovins ont été réduits de 38 %. La pandémie a bouleversé les cycles à venir de la production de viande bovine aux USA.
Au plus fort de la crise, les abattages de bovins ont été réduits de 38 %. La pandémie a bouleversé les cycles à venir de la production de viande bovine aux USA.
Au cours du mois d'avril 2020, une vingtaine d’entreprises d’abattage et /ou de découpe ont fermé partiellement ou totalement pendant une à trois semaines après déclaration de nombreux cas de coronavirus chez leurs salariés. "Au plus fort de la crise, le volume d’abattage de bovins a été réduit de 38 % par rapport aux mêmes semaines de l’année dernière (-40 % pour les porcs). Une forte augmentation des prix de vente au détail de la viande a été observée" a expliqué Lina-May Ramony de l'Institut de l'Elevage lors d'un webinaire le 24 juin.
Début mai, le président Trump a signé un acte de défense de la production qui a classé les viandes «bien critique et stratégique ». Les industriels de la filière viande bovine ont été enjoints de se maintenir en activité, ou de reprendre leur activité le plus vite possible.
Baisse de 20 % des cours des bouvillons au plus fort de la crise
Les conséquences pour les éleveurs sont très lourdes. "Les cours des bouvillons ont chuté de 20 % par rapport à l’année dernière pendant les semaines 14 à 22." Leur poids moyen a progressé de 4 % du fait des délais d'attente pour l'abattage. Le prix du maigre était également en baisse, de 9 % au mois de mai par rapport à l'année dernière.
Les cycles à venir seront perturbés, avec moins de mise en place dans les feedlots de plus de 1000 places. D’importants volumes de viande ont été congelés pour stockage (+14 % par rapport à 2019).
D'autre part, la demande en viande bovine sera orientée durablement à la baisse. Avant la pandémie, le chômage était à son taux le plus faible des vingt dernières années, à moins de 4 %. Ce taux est monté jusqu’à presque 15 % pour revenir, fin mai, à 13 %.
L'image des grandes entreprises d'abattage altérée
Cette crise intervient alors que la filière viande bovine des USA était plutôt sur une phase de croissance. « En 2019, la consommation de viande bovine aux USA était de 37,5 kgéC par habitant et par an, ce qui est très élevé par rapport à celle des européens. Et elle augmente », resitue Lina-May Ramondy. "De 40 à 45 % des ventes portent sur la viande hachée. Pour la consommation à domicile, la viande hachée représente même 60 % des ventes".
La production était en progression avant la crise, avec + 2 % sur l’année 2019 (sur un cheptel de 31,3 millions de têtes de vaches allaitantes). Le contexte était orienté vers l'intensification des échanges internationaux de bovins vivants - les plus grands flux étant l’import de broutards mexicains, et l’export de bovins finis au Canada.
La crise a certainement changé l'image de la filière auprès des consommateurs. Les fermetures de sites qui ont parfois été imposées par les autorités locales, ont mis en lumière les conditions de travail souvent très difficiles des salariés dans ces entreprises.
D'autre part début juin, le pouvoir exécutif a demandé au département de la justice de lancer une enquête anti-trust. Aux Etats-Unis, quatre entreprises réalisent 80 % de l'abattage et la découpe des bovins (Tyson Foods, JBS, National Beef et Cargill).
« Il y a un siècle, cinq entreprises contrôlaient 70 % du marché de la viande bovine et le secteur a été restructuré" a rappellé Sylvain Maestracci, du ministère de l'Agriculture, conseiller aux affaires agricoles aux Etats-Unis. "Sommes- nous à l’aube d’une nouvelle étape similaire ? JBS est sous capital brésilien. Il est aussi possible que cette démarche ne soit qu’un effet de manche. Mais au moindre soupçon de cartel, il y aura une réaction de l’administration. »
Sur le plan des échanges internationaux, la Chine concentre et mobilise l'essentiel des intentions commerciales des USA. « Vis-à-vis de l’Europe, on observe le maintien du discours assez agressif sur le sujet des hormones et des substances de décontamination des carcasses, comme c’est le cas depuis longtemps, mais l'Europe n'apparait pas comme un marché prioritaire. On discerne par contre une volonté de faire basculer le Royaume-Uni sur un modèle sanitaire plus proche de celui des USA » analyse Sylvain Maestracci.
Dans le contingent « panel hormones », les USA ont obtenu fin 2019 de disposer de 78 % des volumes concernés jusqu’en 2026.
Pour faire face à la crise, la filière viande bovine des USA va bénéficier d'un plan de soutien au secteur agricole. Sur les 16 milliards de dollars annoncés au total, 5,1 milliards seront distribués au secteur de la viande bovine.
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