Photovoltaïsme
Un tiers investisseur pour construire un bâtiment : un pari gagnant-gagnant ?
Sébastien Portier est éleveur bovin dans le Puy-de-Dôme. Pour financer la construction d'un nouveau bâtiment, il confie une partie de son terrain à un tiers investisseur spécialisé dans la production d’énergie solaire, pendant 30 ans.
Sébastien Portier est éleveur bovin dans le Puy-de-Dôme. Pour financer la construction d'un nouveau bâtiment, il confie une partie de son terrain à un tiers investisseur spécialisé dans la production d’énergie solaire, pendant 30 ans.
Sébastien Portier est éleveur charolais dans les Combrailles, à Charbonnières-les-Vieilles (63). Il y a deux ans encore, l'agriculteur stockait son fourrage dans un espace attenant à sa stabulation, et parquait ses engins agricoles à l'extérieur. "Ma première préoccupation était de mettre mes machines à l'abri, sous un hangar, afin de limiter leur usure " explique-t-il. En recherche d’une solution pour financer son projet, sans passer par les cases "investissement" et "subventions" qu’il qualifie de "véritable machine à gaz", Sébastien se laisse séduire par la possibilité de mettre à disposition une partie de son terrain à un tiers investisseur, spécialisé dans la production d’énergie solaire.
Un contrat "qui profite davantage au tiers investisseur" ?
"Le tiers investissement offre une solution "clef en main", avec ses avantages et ses contraintes " prévient Thierry Roche, conseiller énergie à la Chambre d'agriculture du Puy-de-Dôme. En faisant ce choix, l'agriculteur s'assure la construction d'un bâtiment à moindre frais, car en grande partie financée par la société tierce, et n'a pas à se soucier du bon fonctionnement de la centrale solaire installée sur le toit du bâtiment. Toutefois, s’il redevient propriétaire de son terrain, du bâtiment et de la centrale au terme du bail emphytéotique*1 signé avec l'entreprise, "l’agriculteur reste dépendant d'un acteur externe pendant 30 ans, souvent avec un choix de bâtiments limité, et sans possibilité de le modifier !" Pour éviter les mauvaises surprises, le conseiller invite les agriculteurs qui choisiraient cette option à mesurer clairement les clauses d'usage du bâtiment avant de signer le bail, "L'avis d'un notaire ou conseiller juridique est indispensable". En fin de compte, la plus-value de l’Énergie étant moins valorisée par l'exploitant, "c'est une option qui profite davantage au tiers investisseur" estime le conseiller.
"J'ai économisé plus de 110 000 euros"
Après s'être renseigné sur plusieurs entreprises pratiquant le tiers investissement, et avoir consulté les modèles de bâtiments standards proposés par les constructeurs, Sébastien Portier signe son projet avec un concepteur en 2020. La construction se termine 1,5 an plus tard. "J'ai opté pour deux hangars mitoyens de 1 200 m2 chacun, tout acier, d'une profondeur de 16 m et avec des travées de 7,5 m de large, pour pouvoir entrer et sortir mes machines sans difficulté." Si le modèle est préconçu, il est possible d'y ajouter des options, moyennant finance. "J'ai par exemple choisi d'ajouter une bande ouverte au niveau de la toiture, afin d'avoir une aération au cas où je voudrais un jour y abriter des bêtes" illustre l'éleveur. Au total, l'agriculteur aura déboursé moins de 40 000 € (terrassement et bardage), pour un ensemble d’une valeur avoisinant les 160 000 €. De son côté, l'investisseur produit 2x100 kWc*2 par an grâce aux panneaux installés sur les bâtiments. Côté assurance, l'entreprise est entièrement responsable de la toiture et des panneaux photovoltaïques, et l'éleveur de l'intérieur des bâtiments, « comme quand on loue un appartement ! ». L’entreprise et l’assureur lui imposent plusieurs conditions : laisser une distance d’un mètre entre le fourrage et le plafond, ne pas stocker de fuel ou encore ne pas pratiquer de soudure au sein du hangar.
*1 bail immobilier longue durée conférant au locataire une quasi-propriété du bien
*2 kWc : le kilowatt crête correspond à une capacité de production électrique de 1 000 W
3 options en photovoltaïsme pour les agris
Le photovoltaïsme offre plusieurs possibilités aux agriculteurs, pour obtenir un revenu complémentaire et/ou financer la construction d'un bâtiment. La plus rentable consiste à devenir propriétaire d'une centrale photovoltaïque pour vendre la totalité de l'électricité produite (actuellement, le prix de vente du kWh est de 13,12 cts d'€) ou l'auto-consommer avec revente du surplus. « Cette option permet à l'agriculteur d'avoir un contrat d’achat avec EDF à un prix connu et indexé sur l'inflation pendant 20 ans. Une opportunité peu présente en agriculture qui mérite d'être étudiée par les chefs d'exploitations » commente Thierry Roche, conseiller énergie à la Chambre d'agriculture du Puy-de-Dôme. Il est également possible de louer la toiture d'un bâtiment existant à un investisseur externe, spécialisé dans la production et la vente d'électricité solaire, afin de percevoir un complément de revenu régulier (entre 25 et 40 cts d'€/kWc/an), sans se préoccuper du fonctionnement de la centrale. La dernière option : mettre à disposition une partie de son terrain à un tiers investisseur via un bail emphytéotique de 30 ans, l'autorisant à construire un bâtiment équipé d'une centrale photovoltaïque. L’agriculteur garde l’usage de l’intérieur du bâtiment, sans se préoccuper de la centrale.