Transparence Gaec : la fin d'une longue ère d'injustices
La reconnaissance fin 2014 par Bruxelles des Gaec et de tous leurs actifs marque l'aboutissement pour la profession agricole cantalienne de sept décennies de combat.
Au pays des droits de l'Homme et de Mai-68, il y a dix ans encore il fallait qu'une épouse d'agriculteur travaillant sur l'exploitation ait l'accord de son époux pour postuler au statut de conjointe collaboratrice... C'est dire si le combat pour la reconnaissance des agricultrices et plus globalement de tous les actifs agricoles a été un long, très long chemin, retracé vendredi par Chantal Cor, présidente de la section des agricultrices de la FDSEA à l'occasion de l'assemblée générale de l'Adasea. Cette croisade prendra pas moins de 70 ans pour qu'enfin, hommes et femmes soient reconnus à parité avec la récente transparence au sein des sociétés actée par l'Union européenne. Une transparence permettant certes de démultiplier les soutiens publics mais avant tout "de mettre fin à une injustice et à un retard financier cumulé depuis des décennies", a tenu à préciser d'emblée Michel Lacoste, président de l'Adasea.
Finie la course au foncier
Concrètement, ce principe de transparence, désormais effectif sans avoir à courir les hectares, permet aux associés d'un Gaec de bénéficier des mêmes droits que ceux auxquels ils auraient pu prétendre en matière fiscale, sociale ou économique en étant chefs d'exploitation à titre individuel. "À partir de 2015, la transparence n'est plus fondée sur le critère de SMI (surface minimum d'installation) mais sur la notion de renforcement économique de la structure basée sur le pourcentage de parts sociales détenues par chacun des associés, s'est félicitée Brigitte Troucellier, responsable de Gaec et sociétés dans le Cantal. On n'a plus rien à justifier hormis le travail effectif réalisé sur l'exploitation." De fait, chaque Gaec va se voir attribuer autant de parts Pac (comptant pour les aides du premier et second piliers de la Pac) que d'actifs. "Quand on connaît le prix du foncier dans ce département, on ne peut être que ravis", a déclaré Benoît Aurière, président des Jeunes Agriculteurs, qui espère que cette évolution va dynamiser davantage encore les installations en allégeant leur coût. Et son aîné de la FDSEA d'estimer que cette décision doit rapidement faire baisser le prix du foncier, "comme nous l'avons expliqué aux représentants de la Safer que nous avons rencontrés", a glissé Patrick Bénézit. Avant d'affirmer que cet acquis, fruit d'un "choix politique des montagnards", "a du sens pour nous, car on souhaite conserver dans nos zones difficiles une agriculture de type familiale, contrairement aux orientations bruxelloises"...Pour Véronique Pouget, installée en EARL avec son époux depuis 1994 sur Saint-Christophe-les-Gorges, c'est une forme de renaissance : "Depuis 1994, j'avais l'impression d'être une agricultrice au rabais, on avait tous les devoirs mais aucun droit. Fran- chement, on n'y croyait plus, a-t-elle témoigné, rendant hommage à la Lotoise Karen Serres, l'une des artisanes de cette évolution. C'est une avancée phénoménale et j'espère que beaucoup de femmes vont suivre l'exemple. De toute façon on a rien à perdre !" Et même tout à gagner comme l'ont montré les simulations du service Références de la Chambre d'agriculture sur des élevages types et des cas concrets du département.
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