Techniques culturales : «On est toujours dans l'expérimentation»
Philippe Gire et Emmanuel Volle travaillent souvent ensemble
pour optimiser leurs cultures sur leurs 2 exploitations conduites en bio.
Plus d'informations sur ces essais lentilles, bientôt en vidéo.
Ils sont agriculteurs bio, l'un Philippe Gire à St Martin de Fugères depuis 1998, l'autre Emmanuel Volle à Salettes depuis 2010. Éleveur laitier ou moutonnier, chacun conduit son exploitation avec des surfaces en herbe principalement mais aussi des céréales et des Lentilles Vertes du Puy.
Sur la même longueur d'onde quant à leur méthode de cultures, les deux jeunes agriculteurs travaillent souvent ensemble, mais surtout réfléchissent ensemble pour optimiser leurs exploitations. Nous les avons rencontrés lors du passage de la Commission technique de l'ODG Lentille Verte du Puy sur une parcelle d'essais appartenant à Philippe Gire. Voyons ensemble les techniques culturales qu'ils appliquent.
L'agronomie au coeur du métier
«Observer et analyser», telle est la base de l'agriculture pour Philippe et Emmanuel. Ils prennent systématiquement le temps de descendre de leur tracteur pour observer la terre, vérifier la germination, l'état des plantes, la présence d'adventices... avant de décider s'il faut intervenir, quand intervenir et avec quel outil. Et cette logique, ils ne l'appliquent pas parce qu'ils sont en bio, mais parce qu'ils mettent l'agronomie au coeur de leur métier.
Ainsi Philippe Gire nous explique la rotation qu'il applique sur son exploitation. «Je pars sur une rotation sur 7 ans avec 3 ans de prairies temporaires et 4 ans de cultures annuelles avec alternance entre culture de printemps et culture d'automne. Et depuis cette alternance, j'ai bien moins de problèmes de bleuet». L'assolement compte 4,5 ha de Lentilles, 4,5 ha de blé, 6 ha de méteil, 4 ha d'orge de printemps, 1 ha d'avoine... Pour les prairies, il a fait le choix de mélanges avec de la luzerne.
Pour la préparation du sol, l'exploitant fait un chaulage tous les 3 ans avec 1,5 t/ha de carbonate de calcium, qui a surtout «un rôle de stimulateur bactériologique» pour favoriser la décomposition des chaumes et fumiers. La fertilisation se résume à 30 t de fumier par hectare sur les terres labourables et du lisier à raison de 50 m3/ha.
Apprendre toujours...
Les interventions mécaniques sont multiples. Après moisson le déchaumage se fait avec un cultivateur à dents à patte d'oie qui «coupe bien les racines et griffe le chiendent». Le labour classique n'est pas très profond, 17 à
18 cm, pour ne pas remonter de la terre de nature différente.
Philippe Gire a supprimé les outils rotatifs avant semis qui tassent et affinent trop le sol gênant ainsi la circulation de l'air et de l'eau. Pour les Lentilles, il a essayé le faux-semis au vibroculteur, qui permet d'aplanir le sol et de détruire les mauvaises herbes qui ont déjà germé. Le semis est suivi d'un passage de herse étrille. Toujours à la recherche de l'efficacité, il envisage pour 2016, de faire un passage de herse étrille à l'aveugle
5 à 6 jours après le semis pour détruire les adventices qui germent un peu avant la Lentille. À voir... Cette année, déjà, Emmanuel Volle a fait des essais avec une bineuse, une machine intéressante mais avec laquelle il faut aussi apprendre à travailler.
À chaque intervention, Philippe Gire comme son collègue Emmanuel Volle, analysent la situation et interprètent les résultats avec leurs réussites et leurs échecs pour s'en servir les années suivantes. Ainsi, en fonction de leurs observations, ils règlent leurs outils : inclinaison des dents, vitesse d'avancement... pour un travail plus ou moins agressif.
Ces deux jeunes agriculteurs n'en finissent pas d'apprendre. «On est toujours dans l'expérimentation» disent-ils. Et c'est peut-être cela qui leur permet de progresser dans leur métier et d'aller de l'avant. Au fil de leurs réflexions et de leurs expériences, ils mettent l'agronomie au coeur de leur système d'exploitation pour une agriculture performante et saine, car comme le souligne Emmanuel Volle, «productivité ne veut pas dire productivisme».
Suzanne Marion