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Elevage
Quel est le plan du Gouvernement pour l'élevage ?

Dans une lettre ouverte, adressée ce mardi 23 mai, à la Première ministre, la Fédération nationale bovine s'interroge sur la stratégie de la France en matière d'élevage alors que la Cour de Compte vient de publier un rapport accablant.

"Les éleveurs de bovins allaitants veulent connaître le « plan » de la France, en ce qui concerne l’avenir de leur secteur ! Madame la Première Ministre, Vous avez, ce lundi 22 mai, dans le cadre de la « planification écologique », présenté un plan d’actions du Gouvernement pour accélérer la réduction des émissions de gaz à effet de serre d’ici à 2030. Au cours de la même journée, la Cour des Comptes publiait un rapport appelant le Gouvernement à mettre en œuvre une stratégie de réduction drastique du cheptel bovin français. Nous, éleveurs de bovins, sommes très conscients de la nécessité d’une action politique globale et transversale pour lutter contre le changement climatique. La sécheresse historique que nous avons vécu l’été dernier nous l’a rappelé avec violence : le changement climatique est une réalité bien concrète qui met en danger la pérennité même de nos outils de production.

Des vaches nourries à l'herbe, herbe qui stocke du carbone

Car vous le savez, Madame la Première Ministre : nos vaches, en France, sont encore nourries principalement avec de l’herbe. C’est cette spécificité (de plus en plus rare, à l’échelle de la planète) qui nous rend particulièrement vulnérable aux sécheresses : lorsque l’herbe brule, nous perdons à la fois l’alimentation de notre troupeau pour l’été et nos réserves de fourrages pour l’hiver. Mais c’est, aussi, cette spécificité qui rend notre modèle d’élevage bovin français si durable. Puisque la réalité est là : c’est justement parce que nos vaches mangent de l’herbe que la France compte encore ces millions d’hectares de prairies qui font la beauté et l’attractivité de nos paysages ruraux. Et c’est parce que nous avons réussi, dans un contexte économique et politique pourtant défavorable, à maintenir en vie ce modèle d’élevage à taille humaine, basé sur une alimentation du troupeau quasi-intégralement produite sur notre exploitation que notre pays peut, encore, miser sur ces formidables puits de carbone et réservoirs de biodiversité.

D'abord le ministre de l'Economie...

Cette réalité toute simple, Madame la Première Ministre, votre Ministre de l’Économie semblait l’avoir oublié il y a quelques jours, lorsqu’il dénigrait publiquement notre secteur au détour d’une communication publicitaire en faveur d’une start-up ayant levé plus de 35 millions d’euros pour produire de la « fausse viande » élaborées par de « faux fermiers » ! Tout comme il semble ignorer qu’en multipliant, depuis plusieurs semaines, les appels aux prix bas en grande distribution, ce sont nos maigres revenus agricoles qu’il sacrifie. Et que comme toutes les entreprises et comme tous les foyers en France, nous avons nous aussi de lourdes charges à honorer.

...Puis la Cour des Comptes

Cette réalité toute simple, Madame la Première Ministre, la Cour des Comptes en fait également fi lorsqu’elle pointe nos élevages bovins herbagers comme les principaux responsables du changement climatique. Alors même que notre production ne cesse de diminuer ! Nous avons perdu près de 3 millions de vaches, soit quasiment 30 % de notre cheptel en 60 ans et cette décroissance ne cesse de s’accélérer : la perte s’élève à près de 1 million de vaches sur les seules 7 dernières années. Mais selon la haute administration, nos vaches ne disparaitraient pas assez vite des paysages français ? 

Quel plan, quelle stratégie ?

Et la France devrait donc faire faire de la suppression de nos troupeaux et de nos prairies son principal levier pour atteindre ses objectifs climatiques ? Néanmoins, ce n’est pas pour réagir à ces déclarations, aussi pénibles soient-elles pour les éleveurs, que nous nous adressons à vous, Madame la Première Ministre. Si nous vous écrivons aujourd’hui, c’est pour connaître votre « plan ». Nous voulons savoir ce que vous planifiez, vraiment, pour l’avenir de notre secteur. La France d’après-2030 que vous avez la responsabilité d’imaginer misera-t-elle encore sur son élevage bovin, pour produire tout en entretenant les paysages et animant l’activité économique et culturelle sur les territoires ruraux ?

Et demain de la viande made in "je ne sais où"

Ou, dans la droite lignée des propos de Bruno LE MAIRE ou des recommandations de la Cour des Comptes, votre France d’après-2030 fera au contraire le pari d’une économie « verte » mais sans prairie, basée sur un régime alimentaire sans viandes bovines ou, dans l’hypothèse beaucoup plus probable où vous ne réussiriez pas à bouleverser les habitudes alimentaires des Français, sur un recours massif aux viandes d’importation ? C’est d’ailleurs là un mouvement que nous observons déjà : face au recul de la production française, les importations de viandes bovines ont bondi de plus de 23% en 2022 par rapport à 2021, une tendance qui se poursuit sur les premiers mois de 2023. Et les accords de libre-échange en cours de négociation ou de ratification pourraient venir amplifier ce phénomène dans un futur proche.

Tous perdants

En offrant, au passage, de nouveaux débouchés porteurs pour l’élevage industriel en « feedlots » tel qu’il est majoritairement pratiqué dans d’autres régions du monde. Les éleveurs américains ou brésiliens, bien qu’engraissant, pour la plupart, leurs bovins à grands coups d’antibiotiques dans des fermes-usines de 30 000 places, semblent poser beaucoup moins de problèmes que nous, éleveurs français ! Voilà, Madame la Première Ministre, les questions simples que se posent aujourd’hui les 130.000 éleveurs de bovins français. Nous voulons connaître le « plan », le « cap », la « stratégie » : bref, nous voulons savoir quel avenir votre Gouvernement entend réserver à notre secteur, à nos territoires, à nos entreprises, à nos métiers, à nos familles, et quelle réponse il entend donner à l’enjeu majeur de souveraineté alimentaire. Si ce plan consiste, comme cela semble se dessiner au regard des derniers signaux envoyés par votre Gouvernement, à sacrifier notre élevage français pour mieux assumer un libre-échange sans règle et ouvrir en grand les vannes aux viandes importées, alors il y a fort à parier que nous, éleveurs bovins, ne serons pas les seuls perdants".

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