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Pourquoi rien ne justifie une baisse des cours

Une consommation qui se tient, un transfert de volumes vers la grande distribution favorable à la production française, et un marché export dynamique : la filière viande bovine tient le cap. Dans ce contexte, les éleveurs réclament légitimement d’être payés au moins au niveau du coût de production.

En cette période de crise, les organisations professionnelles agricoles redoublent de vigilance quant à la fluidité des marchés.
En cette période de crise, les organisations professionnelles agricoles redoublent de vigilance quant à la fluidité des marchés.
© SC

En cette période de crise, les organisations professionnelles agricoles redoublent de vigilance quant à la fluidité des marchés. Ainsi, en fin de semaine dernière, la Fédération nationale bovine (FNB) a rallié ses troupes (en visioconférence) afin de faire le point sur la situation. Au regard du contexte très changeant de jour en jour, un suivi régulier s’impose. Difficile en effet de dire si la réalité d’aujourd’hui sera celle demain. S’en tenir aux faits semble être la meilleure des stratégies, y compris pour couper court aux rumeurs et autres fake news qui vont bon train en ces temps troublés. Les faits rien que les faits donc. Contrairement à d’autres secteurs, celui de la viande bovine résiste. Il bénéficie de la hausse générale de 6 % de la consommation alimentaire relevée ces dernières semaines, ce qui fait dire à Philippe Chotteau, chef du département « économie » de l’Idèle : « Aujourd’hui mieux vaut être paysan que coiffeur ou voyagiste… ». Les achats d’animaux se réalisent normalement sans difficultés majeures identifiées. La semaine dernière, un rééquilibrage des abattages a été observée après une forte augmentation la semaine précédente (+15 % en semaine 12). « Les consommateurs ayant modifié leur fréquence et habitudes de consommations, ils vont revenir à des achats ces prochains jours, ce qui devrait réactiver de plus fortes commandes en GMS », expliquait la FNB, vendredi 27 mars. Mais encore faut-il que des barquettes de viande bovine soient disponibles dans les linéaires, c’est ce que redoutent les éleveurs : « les GMS doivent adapter leur fonctionnement aux nouvelles habitudes des consommateurs, faute de réapprovisionnements suffisamment organisés, des rayons restent vides parfois ! ».

L’Italie a besoin de produire de la viande
Sur l’export là-aussi, pas question de se laisser berner par le champ des rumeurs prédisant, comme souvent, le pire. L’offre de broutards et de jeunes bovins français vers l’Italie reste bonne. « La réorientation des achats vers les GMS et la boucherie est favorable aux broutards français engraissés en Italie. Les ateliers d’engraissement poursuivent leur activité dans des conditions parfois très chaotiques. Mais cette filière continue à fonctionner. Le pays a clairement besoin de produire de la viande d’autant que ses importations de viandes fraîches et congelées venant de Pologne et d’Irlande sont aujourd’hui à l’arrêt. Elles représentaient 42 % de la consommation italienne. C’est dire l’impact ! », explique Philippe Chotteau. Du côté de l’Espagne, les flux restent soutenus. Le secteur de la viande bovine se mobilise face à une augmentation de 30 % des ventes au détail. Les transports maritimes et camions frigorifiques accélèrent la cadence pour préserver l’approvisionnement du marché intérieur et les exportations. Pour les éleveurs français, difficile dans ces conditions plutôt favorables pour leur filière, d’assister à une baisse des cotations : -3 % pour le broutard de type charolais en semaine 12. « Il n’y a pas de raison que les cours diminuent. Au contraire, nous sommes dans une situation où ils devraient augmenter. Dans la plupart des catégories, il manque encore près d’1 euro du kilo pour que nous soyons payés au niveau de notre coût de production », insiste Christian Bajard, éleveur en Saône-et-Loire et coordinateur du Berceau des races à viande. Conscient que des arguments solides plaident en faveur d’une hausse des cours des bovins vifs français, Philippe Chotteau estime toutefois que le phénomène d’incertitudes pèse aussi : « Si on achète plus cher aujourd’hui, va-t-on pouvoir vendre plus cher dans neuf mois ? ». Pour lui, la crise structurelle induite par le Covid-19 va forcément induire de profonds changements, et pas forcément délétères : « Aujourd’hui, la population renoue avec les fondamentaux que sont la santé et l’alimentation. La baisse de la part budgétaire consacrée à l’alimentation ne devrait pas se poursuivre après la crise, bien au contraire ».

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