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Prédation
Pour Claude Font, « le plan Loup est un échec »

Le mercredi 17 mai avait lieu une réunion d’informations sur la prédation dans le Puy-de-Dôme et au-delà, animée
par la direction départementale des territoire (DDT) et la fédération nationale ovine (FNO).

Loup devant un troupeau de brebis
Aujourd’hui, la population du loup est estimée à près de 1 000 individus en France, soit 2 fois plus que le seuil minimum de viabilité démographique retenu par l’État, fixé à 500.
© © AdobeStock

Le 17 mai se tenait une réunion d’informations sur la présence du loup en France et dans le département du Puy-de-Dôme, co-animée par la DDT et la FDO. Une trentaine de personnes, éleveurs, élus, associations, était présente pour échanger sur la question en vue du prochain plan loup.
Le choix de la commune de Saint-Sulpice pour organiser ce rassemblement n’était pas anodin : c’est là qu’a eu lieu la première attaque de loup (non avérée) dans le département en 2022. Elle avait causé la mort de 8 brebis (dont 3 euthanasiées), 3 autres avaient été blessées. Depuis, 4 autres constats d’attaque, n’écartant pas la responsabilité du loup, se sont ajoutés à la liste. La plus récente a eu lieu le 14 mai à Charensat : 24 brebis ont été attaquées dont 12 tuées.
Aujourd’hui, la population du loup est estimée à près de 1 000 individus en France, soit 2 fois plus que le seuil minimum de viabilité démographique retenu par l’État, fixé à 500. « Pour rappel, les objectifs du plan loup sont : la préservation du loup et la protection des troupeaux. Force est de constater que c’est un échec, en faveur du premier et en défaveur des seconds » estime Claude Font, secrétaire général adjoint en charge du dossier « Loup » à la Fédération nationale ovine (FNO).
Le constat de la fédération est le suivant : malgré une augmentation constante des aides attribuées (en 2022, environ 35 M€ émanant du ministère de l’agriculture et 5 M€ du ministère de l’environnement), les mesures de protection fixées par l’état sont insuffisantes au vu de la prolifération du prédateur « strictement protégé » qui, à terme, menace l’avenir du pastoralisme et de la profession.

Nouveau plan loup en construction
Un des combats de la FNO : modifier le statut du loup, en le faisant passer d’espèce « strictement protégée », à « espèce protégée » au niveau européen (voir «elle a dit» ci-dessous). « Sans cette dé-classification, nous ne travaillons que par dérogation » précise Claude Font, qui espère un assouplissement des mesures applicables pour la protection des troupeaux.
Par ailleurs, une révision du zonage est en cours. Pour rappel, l’ensemble du Puy-de-Dôme est catégorisé en cercle 3(a) et seules trois communes, Gouttière, Saint-Sulpice et Anzat-le-Luguet (commune limitrophe), ont été classées en cercle 2(b) suite à des attaques. Jusque-là, les zones protégées n’avaient pas été élargies car les agents de l’Office français de la biodiversité (OFB) avaient conclu que le loup était « de passage ». Néanmoins, les communes limitrophes aux communes victimes d’attaques seront prochainement classées elles aussi en cercle 2, leur donnant un droit de tir létal en cas de rencontre avec le prédateur à proximité d’un troupeau. « Il est aberrant que cette règle de zonage, pourtant clairement énoncée dans le règlement interministériel, n’ait pas été appliquée plus tôt » s’indigne Claude Font, « comment un seul fusil peut-il assurer la protection d’une zone entière ? ». 

2% d'éleveurs formés à la récolte d’indices
Selon la FNO, l’estimation du nombre de loups, à partir duquel est calculé le plafond de prélèvement autorisé (fixé à 19% de la population totale), ne correspond pas à la population réelle, plus importante. Cet écart donnerait lieu à une sous-évaluation du plafond de prélèvement, donc à une régulation insuffisante. Pour Claude Font, ce décalage répété année après année participe à la prolifération de l’espèce et donne le sentiment aux éleveurs « de courir après le loup en permanence ».
Pour contribuer à un meilleur recensement, le secrétaire général appelle éleveurs, chasseurs et ruraux à se former à la collecte d’indices(c) pour devenir « correspondants loup » et ainsi renforcer le maillage du territoire (50 personnes sont formées sur le département à ce jour). La DDT invite les exploitants constatant une attaque à protéger les dépouilles sans les déplacer et à sécuriser « la scène de crime » afin de préserver au mieux les indices présents avant la venue des agents de l’OFB.

« Un nouveau caillou dans la botte des éleveurs »
Pour les éleveurs, la prédation s’ajoute à une longue liste de problèmes : dérèglement climatique, difficulté d’accès au foncier, endettement, excès de normes… « On a beaucoup parlé des loups et des troupeaux. Et l’éleveur dans tout ça ? » interpelle Michèle Boudoin. « C’est un nouveau caillou dans la botte des agriculteurs, qui vivent très durement la réapparition de ce fléau datant du moyen âge. Pour eux, c’est un stress permanent ». Et quand un troupeau est attaqué, les pertes ne s’arrêtent pas aux brebis tuées sur le coup : « les exploitations peuvent subir des pertes indirectes de production, de génétique, etc, dues à des brebis incapables d’agneler durant plusieurs années, car traumatisées » illustre Claude Font, qui ajoute que ces impacts devraient être pris en compte dans le barème d’indemnisation en 2024.
Pour toutes ces raisons, la colonisation lupine « représente un nouveau frein pour l’installation des jeunes » déplore Richard
Randanne, administrateur de la FDO 63, qui craint pour l’avenir de la profession. Et d'ajouter que " le futur plan Loup devra être un véritable plan de sauvegarde du pastoralisme, pour tendre vers le "zéro attaque" qu'on demandait tant pour 2023. Il faut que ce plan soit acté sans concessions pour qu'il puisse être le plus efficient possible."
 

a : Cercle 3 : Achat chiens de protection + entretien (80%), accompagnement technique chien (100%) ;
b : Cercle 2 : aides de cercle 3 + clôture et parcs électrifiés (80%) + tir de défense ;
c : Indices réseaux : observation visuelle, empreinte, dépouille, hurlement, poil, sang etc…

 

Assises de la prédation
Les assises de la prédation auront lieu les 1er et 2 juin 2023 à Chorges (05). L’objectif : proposer des solutions et être force de propositions pour modifier les règles actuelles de la gestion des loups.
Co-organisé par le Conseil de l’agriculture française « prédateurs », la FNSEA-JA, les Chambres d’agriculture France, FNO, FNB et FNC. Inscription obligatoire.

 

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