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Perles du Massif : pourquoi Jean-Paul Bigard a sollicité la FDSEA du Cantal ?

Jeudi 6 juin, le PDG du groupe Bigard en personne sera à Trizac pour présenter la filière de génisses bouchères “Perle du Massif” co-construite avec les responsables de la FDSEA du Cantal.

Deux génisses salers croisées au pâturage.
Une filière pour valoriser les génisses croisées salers ou aubrac*charolais ou les aubrac pures.
© Patricia Olivieri

En février 2017, quand l’éleveur mauriacois est élu à la tête de la Fédération nationale bovine (FNB), il se lance un défi, celui de renouer le dialogue avec le groupe Bigard, premier acteur français et européen du marché de la viande bovine, avec lequel les ponts ont été rompus. Sept ans plus tard, alors que Bruno Dufayet a passé le relais à la tête de la FNB à un autre Cantalien, c’est Jean-Paul Bigard en personne, PDG dont les apparitions publiques et médiatiques se comptent sur les doigts d’une main, qui viendra présenter ce jeudi 6 juin dans le Nord-Cantal la filière Perle du Massif, fruit d’un partenariat improbable entre 
l’industriel aux 30 abattoirs et... la FDSEA du Cantal. 

Une demande de Jean-Paul Bigard à la FDSEA 15

Un partenariat auquel seules des relations franches teintées de respect et confiance entre deux hommes au caractère fort mais qui se respectent ont pu donner naissance. “Lorsque j’étais à la FNB, même si on n’était pas d’accord sur tout, Jean-Paul Bigard et moi partagions les mêmes inquiétudes sur l’évolution du cheptel bovin viande en France et sur la nécessité de construire des filières rémunératrices”, relate Bruno Dufayet. Les discussions se poursuivent et se précisent lors d’une première visite, discrète, du patron de Bigard, dans le Cantal. “Suite à cette visite, il nous a contactés à la FDSEA en nous disant qu’il était intéressé par un produit : des génisses de boucherie issues de nos races rustiques élevées à l’herbe, une filière dont il était prêt à accompagner la mise en place, ou plutôt la relance, cette production existant jadis dans le Cantal”, poursuit le responsable syndical. Si la FDSEA dit banco, elle y met des conditions, non négociables à l’heure des lois Egalim : contractualisation des femelles, prise en compte des coûts de production de ces génisses, avec de fait un différentiel de prix par rapport à la valeur d’une broutarde destinée au marché italien. Des éléments décisifs pour les éleveurs au moment de s’engager ou non dans l’engraissement d’une velle.

Objectif : 500 têtes en année 1

Ensuite, chacun son rôle : “Nous (FDSEA), on a fait la promotion de l’intention, du projet de cette filière baptisée Perle de Massif, le groupe Bigard a lui démarché les éleveurs, sachant que notre volonté est d’y associer un maximum d’acteurs, négoce privé, coopératives si elles le souhaitent”, précise Bruno Dufayet. Depuis l’automne dernier, ce sont 300 génisses qui sont entrées dans la démarche, l’objectif de cette première année étant d’un demi-millier de femelles. “On a fait le choix de partir sur des volumes modestes pour monter progressivement en puissance, 500 génisses ce n’est qu’une première étape sachant que le potentiel est beaucoup plus important, on grossira au fur et à mesure”, appuie l’éleveur. 
Les premiers contrats ont été signés et des génisses ont déjà été abattues à l’abattoir Bigard d’Egletons, correspondant aux spécificités recherchées : des génisses bouchères aubrac ou salers croisées avec du charolais (ou aubrac pur) issues d’élevages du Cantal et des cantons limitrophes afin d’assurer une homogénéité de modèle d’exploitation. Des animaux abattus entre 26 et 42 mois, avec un poids carcasse moyen cible de 420 kilos (mini 380-maxi 450 kg), une conformation cible U- et une note de 3 pour l’état d’engraissement. “Avec le groupe de travail qui a planché sur ces critères, nous avons fait le choix de ne pas intégrer les salers pures car la race a besoin de génisses pures, du fait de son fort taux de croisement, et parce que des démarches de valorisation existent déjà, dont le Label rouge salers”, expose l’agriculteur, insistant sur la volonté des concepteurs de cette nouvelle filière de ne pas concurrencer ni déstabiliser des démarches déjà en place, comme celles associant des groupes d’éleveurs avec certaines GMS locales (AVP Mauriac, Carrefour Jussac). 

“Ça montre que nos animaux ont de la valeur”

“C’est la première fois qu’un opérateur, a fortiori le leader du marché tricolore et européen de la viande bovine, sollicite ainsi le syndicalisme pour construire ensemble une filière, avec des perspectives de volumes derrière, se félicite Bruno Dufayet. Pour nous, c’est hyper intéressant à plusieurs titres : cela va permettre de valoriser les bienfaits de nos produits, issus de races emblématiques et d’un modèle d’élevage herbager, d’autre part de rémunérer les éleveurs sur la base d’un contrat avec une mécanique de prix indexée sur leurs coûts de production. Ça peut lever des freins potentiels à l’engraissement et c’est pour nous un vecteur d’attractivité supplémentaire pour des jeunes qui souhaitent s’installer, un point essentiel pour contribuer au renouvellement des générations.” L’ancien président de la FNB se veut lucide, cette filière n’est pas la solution à tous les maux de la production allaitante cantalienne, c’est une pierre de plus à la valorisation de ses animaux, à une moindre dépendance au diktat du marché transalpin. 
“C’est encourageant car cela montre que nos animaux ont leur place dans un marché incarné par le plus grand groupe industriel, ça montre que c’est possible et on peut imaginer que c’est le début de relations commerciales plus pérennes et espérer que cela inspirera d’autres opérateurs, y compris locaux”, conclut-il.
 

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