Les sénateurs veulent sauver « l’esprit des EGA »
Le 5 novembre, le groupe de suivi de la Loi EGalim au Sénat a déposé une proposition de loi pour limiter les effets de bord, en la modifiant à la marge. Il s’agit pour les sénateurs de corriger le titre 1 qui selon eux ne permet pas une revalorisation des prix payés aux producteurs et défavorise les PME, « plus proches des agriculteurs et implantées dans les territoires ».
« Notre objectif n’est pas de démolir la loi EGalim, ni de la condamner, mais nous la suivons pour éviter les effets de bord et proposer des ajustements », précise Sophie Primas, présidente de la Commission des affaires économiques du Sénat, le 5 novembre avant de présenter un bilan réalisé par le Comité de suivi de la loi EGalim. « La loi EGalim a suscité un espoir immense dans nos campagnes pour régler le problème du revenu de l’agriculteur, tout en ne concernant qu’une petite partie de ses recettes annuelles », ajoute-t-elle. Le bilan présenté par le Comité met en avant une inflation de 1 % sur les produits alimentaires pour le consommateur, une hausse des prix qui ne se retrouve pas dans la rémunération des producteurs. « Le ruissellement ne marche pas », insiste Anne-Catherine Loisier, sénatrice de la Côte-d’Or et co-rapporteure du texte. Pour les sénateurs cette constatation prouve les effets pervers du relèvement du SRP à 10 % qui a permis de revaloriser les produits de grandes marques en déplaçant la guerre des prix sur les produits de MDD (marques distributeurs) principalement produits par des PME, des entreprises plus proches des agriculteurs. Pour Michel Raison, sénateur de la Haute-Saône, l’encadrement des promotions a aussi des effets pervers. D’une part car les distributeurs ont mis en place des contournements et d’autre part car les petites entreprises, qui utilisaient la promotion comme moyen de communication, sont pénalisées. « Une PME ne peut se payer un spot publicitaire en prime time, s’agace Michel Raison, les PME sont les grandes victimes de la loi ! ». Parmi elles, les PME produisant des produits saisonniers sont les plus impactées. Certaines accuseraient même un recul de vente de 50 % depuis janvier. Sur l’ensemble des PME, Sophie Primas avance que les reculs de chiffre d’affaires vont de -20 % à -30 %. « Paradoxalement, la loi Egalim aboutit donc à pénaliser les entreprises qu’elle entendait renforcer, à savoir les PME et les entreprises coopératives », estime le groupe de suivi.
3 mesures à appliquer d’urgence
Afin de corriger ces effets pervers et « sauver des PME en danger », le groupe de suivi a déposé une proposition de loi comportant 3 mesures à appliquer d’urgence. Les sénateurs soulignent qu’il ne s’agit pas de stopper l’expérimentation mais bien de proposer des ajustements afin d’éviter de nombreuses fermetures d’entreprises. La première mesure consiste à sortir de l’encadrement des promotions en volume, les produits les plus saisonniers et permettre l’examen, au cas par cas, de la situation des PME en difficulté. La deuxième mesure consiste à expérimenter une clause de révision automatique des prix à la hausse comme à la baisse, pour les filières où cela est le plus nécessaire, notamment pour le porc. Des seuils de hausse devront ainsi être définis. « Il s’agit de permettre aux entreprises de répercuter de fortes hausses des cours, comme dans la filière porcine où les cours ont progressé de 45 % depuis le début de l’année », précise Daniel Gremillet, président du groupe de suivi. La dernière mesure propose de revenir à la volonté initiale du législateur concernant l’ordonnance sur les coopératives agricoles, en supprimant la possibilité pour le juge de sanctionner financièrement les coopératives ayant pratiqué une rémunération des apports abusivement basse. Face à l’urgence de la situation, le groupe de suivi espère que sa proposition de loi sera examinée en janvier prochain. Il promet aussi qu’il sera attentif à l’application du titre 2 de la loi, qui entrera en vigueur l’an prochain.