“L’élevage a besoin d’être sauvé, et pas d’un consensus mou”
L’annonce des modalités d’application du bilan de santé de la Pac a été reportée, au grand dam des éleveurs de bovins viande réunis en congrès la semaine dernière.

Prévues ce mercredi, les annonces du gouvernement français relatives à l’application du bilan de santé de la Pac ont été différées et pourraient finalement n’être présentées par le chef de l’État lui-même qu’autour du 20 février. Un délai supplémentaire révélateur, si besoin était, d’une tension plus vive que jamais entre les différents protagonistes de ce dossier - en l’occurence le secteur des grandes cultures et celui de l’élevage - et d’une pression encore plus forte sur les épaules du ministre Barnier, qui avait pourtant clairement affiché sa volonté d’aller vite dans la mise en œuvre de la boîte à outils négociée en novembre à Bruxelles. Très attendu par les éleveurs de bovins viande réunis en congrès les 4 et 5 février à Cherbourg, Michel Barnier n’a pas levé leurs inquiétudes, ne donnant que très peu d’indice sur les options définitives que prendra la France. Et ce ne sont pas les propos du président de la FNSEA, Jean-Michel Lemétayer, qui ont donné à la FNB (Fédération nationale bovine) d’avantage de garanties, la fédération nationale n’ayant pour l’heure procédé à aucun arbitrage. Un situation qui a suscité agacement et exaspération du côté du président (en médaillon) et des membres du bureau de la FNB, à l’image de Patrick Bénézit.
On a l’impression d’une certaine déception à l’issue de ce congrès. Vous attendiez un début d’annonces du ministre ?
Patrick Bénézit : “Effectivement, nous étions confiants dans le gouvernement, on aurait donc souhaité que le Ministre soit plus précis dans ses intentions et aille jusqu’au bout de nos revendications. Il a certes réaffirmé sa volonté de procéder au rééquilibrage des soutiens de la Pac en faveur de l’élevage à l’herbe, mais sans donner d’assurance quant au maintien d’une PMTVA couplée additionnée de sa part nationale. Or l’un ne va pas sans l’autre, le redéploiement des aides européennes sur l’herbe n’aura d’effets positifs sur le revenu des éleveurs que si nous conservons cette prime couplée à la production.”
Pourtant la FNB a proposé elle-même une forme de découplage de la PMTVA à hauteur de 25 %.
P. B. : “Attention, il ne s’agit pas de découpler une partie de la PMTVA mais de participer au pot commun pour alimenter ce soutien à l’herbe dans le premier pilier de la Pac. L’article 63 du compromis sur le bilan de santé de la Pac permet ce rééquilibrage en mobilisant jusqu’à 25 % des aides historiques encore couplées. Ainsi, si 25 % des aides Scop (céréales et oléoprotéagineux) sont ponctionnés dans cet objectif, ce qui représenterait 1,1 milliard d’euro, il nous paraît normal et légitime de participer à notre niveau, soit 170 millions d’euros si on part sur 25 % de la PMTVA. Au final, c’est 1,4 milliard d’euros (en incluant une part des aides ovines, de la prime à l’abattage...) qui sera ainsi fléché vers l’herbe. Mais il faut aller jusqu’à ce maximum de 25 %.”
Un schéma sur lequel la FNSEA tarde justement à se positionner...
P. B. : “On a toujours su que cet arbitrage professionnel serait très difficile. Au vu de l’opposition farouche, agressive, méprisante et irresponsable des gens d’Orama, on voit mal comment la FNSEA pourrait aujourd’hui trancher. Si elle le fait, cela ne peut être qu’en faveur de la position de l’élevage majoritaire en interne à la FNSEA. Au sein de “la grande maison”, tous les éleveurs parlent aujourd’hui d’une même voix, qu’ils soient laitiers, allaitants, intensifs, des Pays de Loire ou des massifs montagneux. Ce débat est désormais d’ordre politique, c’est la raison pour laquelle nos propositions ont toujours été portées auprès du ministère de l’Agriculture. L’élevage est en train de crever. Cette réorientation doit se faire avec ou sans consensus à l’intérieur de la profession. Nous restons donc déterminés au sein des associations spécialisées de l’élevage, et d’une majorité de FDSEA et FRSEA qui composent la fédération nationale, pour obtenir une politique différenciée en faveur de l’élevage.”
Plus d'infos à lire cette semaine dans L'Union du Cantal.
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