L'économie cantalienne sur la double pente du "W" de la crise
Enquêtes de la CCI 15 et de la Banque de France convergent : la reprise tant attendue n'a pas eu lieu en 2013 dans le département, bien au contraire...
Pire que redoutée : c'est le verdict des chefs d'entreprise cantaliens sur leur activité en 2013. Des patrons sondés par deux canaux : celui des CCI d'Auvergne d'une part, celui de la Banque de France(1) de l'autre, avec des résultats relativement convergents. Longtemps épargné par la crise, le département a été rattrapé par les difficultés économiques avec l'effet retard qu'on lui connaît. Ainsi, depuis deux ans, l'économie locale est engagée sur la seconde pente du W, selon la formule de Bernard Bouniol, président de la CCI. Chiffre d'affaires, marges, trésorerie et rentabilité : tous ces indicateurs sont ainsi passés du rouge vermeil au cramoisi au cours de l'année écoulée sans que la reprise tant attendue à l'horizon de fin 2013 ne donne de quelconques signes de traduction.
Effet à retardement pour la construction
Ainsi, près d'un chef d'entreprise sur deux enquêtés (123 au total dans le Cantal) estime avoir connu un repli d'activité en 2013, avec un secteur plus particulièrement touché, le commerce de détail. Et des services aux particuliers ainsi que les CHR (cafés-hôtels-restaurants) plus impactés que les services aux entreprises. Le climat des affaires cantalien est en retrait de sept points par rapport à la moyenne auvergnate, elle-même à la traîne par rapport à la tendance nationale, du moins pour l'industrie. Ainsi, alors qu'une progression d'activité de 3 % était attendue en 2013 dans ce secteur, elle n'a atteint que 0,4 %. Même déconvenue pour les services marchands (ingéniérie technique et informatique, nettoyage, transports routiers de marchandises). Paradoxalement, au niveau auvergnat, seul le secteur de la construction s'en sort mieux que prévu (+ 2,9 % de CA). Tout simplement parce que les particuliers ont anticipé la hausse de TVA au 1er janvier 2014, explique Jean-Louis Fruitière, directeur de la succursale cantalienne de la Banque de France. Une embellie qui a surtout bénéficié au secteur du bâtiment et pas à celui des travaux publics impacté par une baisse drastique des mises en chantiers (- 6,8 % en Auvergne) et permis de construire (- 18,8 %). Ce n'est donc pas une surprise si les entreprises du BTP s'attendent pour 2014 au revers de cette médaille, renforcé par l'effet de la période pré-électorale. Conséquences de carnets de commande en berne et de stocks au plus haut, l'emploi a reculé l'an dernier : 26 % des répondants indiquant avoir réduit leurs effectifs, notamment dans les services et l'industrie-BTP. Avec une croissance limitée à 0,3 % en 2013 dans l'Hexagone, la politique d'investissement est restée des plus frileuses l'an dernier : seules 23 % des entreprises cantaliennes ont consenti à investir mais souvent dans du renouvellement de leur parc productif ou dans le cadre de mises aux normes.
Rentabilité en berne
Au final, les marges des entreprises sont annoncées en repli pour 53 % des sondés, tout comme leur trésorerie et leur rentabilité. D'ailleurs, le tribunal de Commerce recensait il y a quelques semaines un total de 106 déclarations de cessation de paiement en 2013, soit un bond de 24 % en un an, avec, dans une majorité de cas, une liquidiation judiciaire à la clé. "Tous les secteurs sont impactés, révèle Bernard Bouniol. Et la situation ne devrait pas s'améliorer dans les mois à venir." Car même si 21 % des entreprises enquêtées font part d'un frémissement de leur activité (accroissement de ventes ou contrats signés, mais surtout des demandes de devis), ces affaires se font dans le cadre de fortes pressions sur les prix. Un cercle vicieux : avec de faibles marges, pas question d'investir, innover ou embaucher... (1) Enquête CCI auprès de 1 006 entreprises ressortissantes, dont 12 % du Cantal, soit exactement le poids de l'économie cantalienne au sein de la région. Enquête Banque de France : 958 entreprises auvergnates.
Plus d'infos à lire cette semaine dans L'Union du Cantal.
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