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Le tunnel fait la jonction entre éleveurs et consommateurs

Suite à la décision italienne d’exiger la vaccination des animaux importés sur son sol, les éleveurs ont bloqué lundi le tunnel du Lioran à l’appel de la FDSEA et des JA.

Tunnel fermé : pas de problème logistique cette fois, mais le ras-le-bol des éleveurs.
Tunnel fermé : pas de problème logistique cette fois, mais le ras-le-bol des éleveurs.
© P. O.
Le contraste est saisissant : moins de 24 heures après la fermeture de la plus grande vitrine agricole française Porte de Versailles, l’élevage vient de retomber dans un quotidien de plus en plus assombri, loin des flashs et des déclarations de soutien des politiques de tous bords. À l’image des quelques skieurs plongés dans la grisaille et le crachin qui bouchaient lundi les sommets du Lioran, les éleveurs, toutes productions confondues, peinent eux  à entrevoir la moindre éclaircie. Et pour la FDSEA et les JA du Cantal, la décision des autorités italiennes de conditionner l’entrée d’animaux d’élevage sur leur sol à leur vaccination contre la fièvre catarrhale, pourrait bien sonner le glas d’un élevage qui a du encaisser en moins de douze mois une inflation record du coût de l’alimentation animale, des charges d’exploitation (fuel, engrais...) et le désengagement des pouvoirs publics sur un certain nombre de lignes budgétaires. Une avalanche de “sales coups” pour les éleveurs, selon Patrick Bénézit, secrétaire général de la FDSEA, qui a motivé la mobilisation des deux réseaux syndicaux en ce début de semaine dans une opération médiatique justement intitulée “les éleveurs ne voient plus le bout du tunnel”.

Les consommateurs comme défenseurs

De 10 heures à 16 heures, les quelque 300 éleveurs qui se sont relayés de chaque côté du tunnel du Lioran en ont bloqué les entrées et ont exposé aux automobilistes, obligés d’emprunter le crochet par la station, l’aberration de cette clause de sauvegarde italienne ; mais aussi et surtout le décalage croissant entre les charges d’exploitation, le prix des animaux sortis de l’exploitation et le prix affiché en rayon de GMS. Pas besoin d’ailleurs de beaucoup de chiffres pour convaincre les automobilistes par ailleurs consommateurs et premiers confrontés à l’envolée des étiquettes. Et c’est peut-être là, dans ce soutien franc exprimé par leurs concitoyens accoudés à la vitre de leur véhicule, que les revendications des éleveurs pourraient bien trouver un nouveau salut. “Si on n’aidait pas nos enfants, qui travaillent pourtant tous les deux, ils ne mangeraient que de la viande bas de gamme. Il y a bien un problème et des intermédiaires qui se graissent la patte”, témoigne ce couple fraîchement retraité du milieu hospitalier. “On se demande s’il ne va pas falloir aller acheter directement chez les paysans pour pouvoir manger de la viande à des prix abordables”, enchaînent-ils, pleinement convaincus de la cause des éleveurs. Quant à savoir si la récente mobilisation des pouvoirs publics et politiques, appellant chacun à une transparence dans les filières, aura des effets concrets, la réponse est sans ambiguïté : “C’est bien de vouloir surveiller la grande distribution, mais est-ce qu’ils ne font pas ça seulement en raison des prochaines élections ?”. Et ce doute s’est aujourd’hui propagé dans les rangs des éleveurs, qui ont plus que l’impression d’être lâchés. “La loi française comme européenne interdit de vendre à perte, pourtant c’est bien ce que les éleveurs porcins, ovins, de lapins et depuis quelques jours de bovins, sont en train de faire, bien contre leur gré”, s’insurge Julien Fau, président des JA. 

Des pouvoirs publics qui tardent à agir

“Le cours des aliments pour nos animaux suit de près celui du blé qui bat tous les records depuis plusieurs mois et ce n’est pas fini. En face, que font les pouvoirs publics ? Ils se désengagent du financement de l’équarrissage, de la recherche génétique, des prêts bonifiés... sans parler des retards de versement des aides animales, prime herbagère agroenvironnementale !”, énumère, exaspéré, son aîné Patrick Escure. De son côté, Patrick Bénézit ne voit d’autre issue que celle politique. “Si le comité vétérinaire européen qui se réunit ce lundi ne revient pas sur la clause italienne, il nous faudra bien sûr des mesures, soit pour aider au maintien des veaux sur les exploitations, soit pour dégager le marché. Mais ce qui donnera vraiment des perspectives au monde de l’élevage, c’est une nouvelle Politique agricole commune tournée vers les productions à l’herbe, la montagne et les secteurs les plus fragilisés”. Ce message, la FDSEA et les JA du Cantal, qui devraient être bientôt suivis par leurs homologues d’autres départements, le martèlent depuis des mois en amont des premières vraies discussions sur le bilan de santé de la Pac. Et s’ils ne comptent plus leurs interventions en ce sens auprès des élus, ministres..., ils entendent bien dans cette course de fond “ne pas être se faire doubler dans le sprint final”. 

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