APICULTURE
La météo et le frelon décideront du succès du miel de montagne
Luc Mathieu est un des rares apiculteurs professionnels du Cantal. Il élève ses propres reines, double son cheptel d’ouvrières et veille à optimiser la production, malgré les aléas.
Luc Mathieu est un des rares apiculteurs professionnels du Cantal. Il élève ses propres reines, double son cheptel d’ouvrières et veille à optimiser la production, malgré les aléas.
Du miel, beaucoup en font. Peu en vivent. Dans le Cantal, sur 500 propriétaires de ruches, seulement 17 sont des professionnels qui en tirent leur principal revenu. Luc Mathieu est de ceux-ci. Il démontre que, même installé au pied du Puy Mary, au Vaulmier, on sait aussi faire autre chose que de l’élevage de ruminants. Dès sa récente installation, le 1er janvier 2023, il décide se consacrer essentiellement à l’apiculture, en plus de l’élevage salers du Gaec dont il est associé avec son frère Pierre.
Il a fallu démarrer à zéro, non s’en s’être préalablement formé à l’élevage spécifique des abeilles, pendant sept mois en alternance entre Marvejols en Lozère et chez David Pigeon, maître-exploitant à Naucelles, avec qui il continue d’entretenir des relations régulières.
Un pro, bien formé
Les conseils devaient être bons, puisqu’alors que 500 kg étaient prédis pour la première récolte, Luc a fait plus du triple : 1,7 tonne de miel extrait de 50 ruches(1), disponible en pots de 500 g à 7,5 € ou de 1 kg à 14 € en vente directe (voir buronduchaussedier.fr), ou dans les magasins de Mauriac (épicerie, GMS, traiteur), Le Falgoux, Saint-Martin-Valmeroux et jusqu’à Aurillac (Ferme de chez nous, fromagerie Morin...). La question qui, pour l’heure, reste en suspens : “L’exploit sera-t-il renouvelé cette année ?”
“Tant que le miel n’est pas dans le fût, on ne sait pas ce qu’on aura.”
L’apiculteur reste prudent, tant les paramètres de réussite ou d’échec sont nombreux et qu’il n’est pas possible de les maîtriser. Luc Mathieu insiste sur deux facteurs : la météo et la prédation. De ses formateurs, Luc a bien retenu la leçon : “Tant que le miel n’est pas dans le fût, on ne sait pas ce qu’on aura.” En l’occurrence, cette saison ne démarre pas comme elle aurait dû. Alors que la floraison partait plein fer, le froid de la mi-avril retarde nettement le rythme de production. Les abeilles ne sortent pas en dessous de 12°C, conservant leur énergie pour des jours meilleurs. “Leur travail de printemps n’a pas démarré.”
De fait, la saison se raccourcit, le but étant de récolter assez tôt, dès que le nectar n’est plus rentré, souvent après le 15 juillet, en espérant ni sécheresse, ni pluies abondantes qui rincent les fleurs. Si tout va bien, elles auront butiné auparavant, du noisetier, du saule et du tilleul au printemps, puis le pissenlit où elles vont rentrer du nectar, le prunelier, l’aubépine et tous les fruitiers, jusqu’au lierre à l’automne pour constituer les réserves hivernales. L’apiculteur, lui, se concentre sur une seule récolte annuelle, “toutes fleurs et montagne”.
Frelon asiatique et varroa
Outre la météo et ses caprices, l’autre générateur de stress tant chez les abeilles que chez leurs éleveurs, c’est le frelon asiatique. “Le prédateur qui n’en a pas”, comme le résume, d’une formule, Luc Mathieu. Les dégâts sont considérables : un nid de frelon ingurgite 15 à 20 kg d’insectes par an ! Quand on sait le poids d’une abeille (0,1 gramme...), on imagine facilement la quantité absorbée. “Si la colonie est faible, il entre et la décime.” Il revient donc à l’homme de le chasser, de le piéger chaque fois que possible : “Quand on arrive à attraper une reine frelon dans un piège installé dans un fruitier, c’est un nid en moins.”
“La ruche qu’on laisse vivre au fond du jardin, ça n’existe plus. Ça ne peut marcher qu’une année” (Luc Mathieu, apiculteur professionnel)
Et quand le nid est déjà là, la seule solution est de faire intervenir un professionnel, “à nos frais, rien n’est pris en charge”. Moins impactant, mais toujours présent, le varroa - acarien parasite, en quelque sorte “le tique de l’abeille” - ne peut être traité qu’après récolte du miel si on ne veut pas le voir se multiplier à la vitesse grand V. Le vétérinaire du GDS établit une ordonnance et délivre le traitement. Surveiller, prévenir, guérir...
Afin de sécuriser ses revenus, Luc Mathieu va multiplier le nombre de ruches. Parti de 50 essaims, il double la mise dès cette année (une centaine de ruches, donc) et le total de 250 ruches, prévu en rythme de croisière, devrait être atteint en quatre ans. Déjà, il a investi dans un véhicule adapté et surtout dans une miellerie flambant neuve, installée dans un ancien bâtiment de pierres.
(1) Installées entre Moussages et Pons, à Drugeac, à Salins et bien sûr au Vaulmier et à Saint-Vincent-de-Salers.