« Je continuerai de défendre les dossiers lozériens », assure la députée de Lozère
Fraîchement élue députéé de la circonscription de la Lozère, Sophie Pantel planifie sa rentrée à l’assemblée nationale. Ayant obtenu un siège à la commission des finances, à la délégation des collectivités territoriales, puis aux affaires européennes, elle compte bien « défendre les dossiers lozériens », dont l’agriculture. Et a pour ambition de faire reconnaître la place des territoires ruraux et des territoires de montagne au niveau national. Entrevue.
Fraîchement élue députéé de la circonscription de la Lozère, Sophie Pantel planifie sa rentrée à l’assemblée nationale. Ayant obtenu un siège à la commission des finances, à la délégation des collectivités territoriales, puis aux affaires européennes, elle compte bien « défendre les dossiers lozériens », dont l’agriculture. Et a pour ambition de faire reconnaître la place des territoires ruraux et des territoires de montagne au niveau national. Entrevue.
Allez-vous rencontrer la filière agricole ?
D’une manière générale, j’ai prévu de rencontrer toutes les filières économiques, dont les syndicats et la profession agricole, puisqu’ils représentent tout un pan de notre économie.
J’ai déjà eu des demandes de rendez-vous, par exemple une intersyndicale m’a demandé, et je me suis rendue dans leurs locaux à Jean Jaurès pour discuter. Bien sûr, je recevrai tous ceux qui me solliciteront.
Élue avec le Nouveau Front populaire, comment allez-vous défendre l’agriculture lozérienne à l’Assemblée nationale ?
Je vais les défendre comme je les ai toujours défendus, c’est-à-dire que je défends une agriculture qui soit territorialisée, qui défende les petites structures, parce que même la plus grande des structures chez nous reste petite par rapport au modèle européen, et en particulier du nord de l’Europe. Je défendrai une agriculture qui permette une juste rémunération pour les agriculteurs, qui permette de maintenir des animaux. Je suis très favorable aux aides couplées, liées aux aides surfaciques, et je défendrai, évidemment, une agriculture respectueuse de l’environnement, ce qui est la nôtre. Et il y a un point, pour notre agriculture, qui est important : c’est d’arriver à faire reconnaître notre bon niveau environnemental, qui, aujourd’hui n’est pas reconnu, et on a un certain nombre d’aides qui vont prioritairement à ceux qui ont des marges de progrès à faire. Il faut vraiment qu’on arrive à faire reconnaître notre bon niveau de qualité environnemental.
Le NFP souhaite fortement soutenir l’agriculture biologique, dans son programme. Comment cela s’articule-t-il avec l’agriculture lozérienne ?
Sur la partie bio, ce qui est dit, c’est qu’il y avait la problématique aide à la conversion qui est aujourd’hui maintenue, et puis l’aide au maintien qui ne l’est pas. C’est aussi lié à ce sujet-là des aides. Il ne faut pas sortir des mots du programme et de leur contexte. Moi, je préfère un produit local, qui ne voyage pas de l’autre bout du monde et qui est fait dans de bonnes conditions chez nous et qui n’a pas forcément le label, parce que cela implique des coûts supplémentaires. On a des productions qui pourraient être labelisées bio sans aucun souci, qui pourraient être reconnues par des labels, mais en fait la production étant faible, cela ne leur permet pas de payer le coût des contrôles, les certifications, etc. Donc, je préfère ce type de produit à celui qui vient du bout du monde et qui voyage sur des bateaux en faisant trois fois le tour de la planète et qui est peut-être bio mais qui n’est pas du tout, pour moi, respectueux de l’environnement.
Le marché bio traverse aujourd’hui une crise énorme. Comment défendre ces filières de qualité ?
En fait, globalement, il n’y a pas une différence énorme en termes de rémunération entre des filières de qualité et celles qui ne le sont pas, et c’est vrai que ça pose souci parce que les filières de qualité, que ce soit des IGP, AOP, AOC ou la bio, ça a un coût pour les exploitants agricoles. Si en plus ils ne s’y retrouvent pas financièrement, qu’ils ne tirent pas une valorisation de cette qualité, c’est sûr que ça pose problème.
Après, nous, ce que l’on avait proposé aussi, c’était de taxer les produits qui arrivent de l’extérieur et qui ne respectent pas les normes sociales et environnementales. Dans les mesures d’urgence, il y avait des discussions avec les grands groupes agroalimentaires et les grands groupes de la grande distribution sur la question de la rémunération, d’un revenu juste et rémunérateur pour l’agriculteur.
Si, déjà, on arrivait à faire appliquer la loi Égalim, ce serait bien. Ça fait partie de nos propositions si on nous laisse gouverner. Et, il y avait aussi des propositions de pouvoir revoir le Ceta, et affirmer une opposition au Mercosur. En tout cas, sur une agriculture de montagne comme nous, on a aucun intérêt à aller vers ces deux conventions. Après, quelqu’un qui fait du vin et qui exporte beaucoup, aura peut-être un avis différent. En tout cas, pour nous, je pense que nous sommes assez unanimes là-dessus.
Quels autres sujets agricoles vont particulièrement retenir votre attention ces prochains mois ?
Il y a deux autres sujets sur lesquels je vais m’investir : la question des prairies sensibles. Il y avait eu un embryon de réponse qui avait été apporté quand le ministre de l’agriculture était venu, puis c’est tombé à l’eau puisque la LOA est en suspens. Dedans, j’ai un deuxième intérêt pour la Lozère puisque c’est dans cette loi que nous devions avoir l’autorisation pour les départements de construire des réservoirs d’eau qui intéressent aussi beaucoup l’agriculture, puisque ces réservoirs d’eau ont vocation à servir aussi bien la DFCI que les agriculteurs en période d’étiage quand il faut soulager les réseaux d’eau potable.
Puis, il y a aussi la question de la prédation. C’est d’abord à l’Union européenne, aux députés européens d’arriver à faire en sorte que le statut du loup, le niveau de protection soit revu, puisque aujourd’hui le loup n’est plus un animal en voie de disparition. Ça, je pense, qu’il faut vraiment arriver à le faire comprendre. Et le retour du loup engendre d’autres conséquences sur la biodiversité. Nous, on l’a vu au niveau de l’entente Unesco, je l’avais aussi expliqué au moment du débat organisé par les JA et KWZTV, dans la chaîne alimentaire, il y a des animaux soit qui disparaissent soit qui deviennent plus petits du fait de milieux qui se ferment. Sans parler de l’augmentation des risques incendies, puisqu’on a quand même vu une disparition importante des ovins au profit des bovins, et ça ne mange pas la même chose, et ils ne nettoient pas le territoire de la même manière. Donc, là, c’est vraiment un travail conjoint qui doit être mené avec les collègues de l’UE, et moi ce qui me fait vraiment râler et le mot est faible, c’est de voir que la France avait eu la possibilité de revenir sur le niveau de protection, et qu’elle n’a pas accepté de le faire.
On en a parlé en réunion de groupe (ndlr une réunion de groupe NFP), j’ai pris la parole tout de suite. Et puis, il faut trouver des alliés, y compris en Aura avec des députés LR, avec lesquels j’ai travaillé sur le sujet, par exemple. Ce sont des sujets où on ne peut pas être isolés et je pense qu’ils n’appartiennent pas forcément à un parti ou un courant de pensée. C’est du bon sens et de l’aménagement de territoire.
En fait, il faut trouver l’équilibre entre ce qu’on veut (un territoire ouvert, des hommes et des femmes qui vivent de l’agriculture dignement, conserver le travail génétique que l’on fait), ou l’on considère que les bêtes peuvent être bouffées n’importe comment et on recommence tout, et on ne tient plus compte de ce travail de génétique de qualité, et ça va à l’inverse de ce que veulent les consommateurs.
Je l’ai eu dit à des pro-loup : il faut savoir ce que vous voulez. Vous ne pouvez pas dire que vous voulez manger local, que vous voulez de la traçabilité, et après, manger du veau blanc qui n’est jamais sorti de la stabulation. Ce n’est pas comme les poules en étage, mais pas loin. Enfin voilà, si vous voulez que votre veau pâture et qu’il soit bien rosé, bien comme il faut, et bien ça veut dire qu’il lui faut de l’espace dehors, sans risque. Je pense que ça, il faut arriver à l’expliquer, et notamment à une population qui ne connaît pas le milieu agricole. Et dire qu’on ne peut pas dire qu’on est pro-loup et vouloir une alimentation locale et élevée en plein air. C’est complètement lié. Ceux qui veulent le retour du loup, il faut qu’ils acceptent que les bêtes ne pâturent plus à l’extérieur et ça ne sera pas de la viande de bonne qualité.
Sur ce sujet, j’ai toujours eu une position très claire, et je pense que le retour du loup, avec un élevage extensif tel qu’on le pratique chez nous, c’est incompatible. Et il y a des études qui ont démontré les limites des mesures de protection, les problèmes de conflits d’usage avec les patous, le mal-être des agriculteurs, etc. Et quand on m’explique que les agriculteurs « sont indemnisés », non, ce n’est pas vrai. Déjà, il y a un attachement aux bêtes, il suffit de connaître une famille d’agriculteurs pour le comprendre. Et puis tout n’est pas indemnisé, ce n’est pas vrai. Il suffit qu’un gypaète soit passé par là, on retrouve la boucle et point barre, et puis la peur des animaux, les ventres vides, etc., ne sont pas indemnisés. Sur le loup, c’est un sujet extrêmement compliqué, qui dure depuis de nombreuses années, et je ne vais pas régler le problème à moi toute seule, mais je vais y travailler.
Un mot de conclusion ?
Je ne sais pas encore comment je vais l’organiser, mais j’aimerais trouver un moyen pour échanger avec les agriculteurs, au-delà des institutions qui les représentent, et en particulier ceux qui ont voté pour le RN. Parce qu’il y en a beaucoup, quand on regarde la répartition des votes. J’aimerais vraiment discuter avec eux, parce que j’aimerais comprendre les craintes, inquiétudes et difficultés des uns et des autres.