Gîtes de France - C'est (presque) reparti comme en 40
Intervenant devant les hébergeurs cantaliens du réseau Gîtes de France, Didier Arino, directeur du cabinet Protourisme, a décrypté les tendances d'un secteur en pleine reprise post-Covid.
Malgré l'inflation galopante qui flirte toujours avec les 6 %, la baisse de pouvoir d'achat, les exhortations à la sobriété,... les Français ne sont pas prêts à sacrifier ce qui, pour nombre d'entre eux, est devenu le sel de leur existence : les vacances ! Pour preuve, 30 % avaient déjà réservé fin février leur séjour pour l'été, un ratio inédit, relève Didier Arino, directeur du cabinet Protourisme qui intervenait le 27 avril devant les propriétaires cantaliens du réseau Gîtes de France réunis en assemblée générale à Aurillac. Et le budget qu'ils vont y consacrer cette année atteint lui aussi des sommets : 2 668 EUR en moyenne par foyer sur l'année 2023, dont
2 400 EUR pour les vacances d'été, soit 400 EUR (20 %) de plus que l'an dernier. Quels que soient leurs revenus, nos concitoyens veulent bien se serrer la ceinture sur leurs dépenses alimentaires, mais pas question de renoncer à "leur jardin d'Eden", dixit Didier Arino, dont ils ont été sevrés sous l'ère Covid. Question de priorité dans une société où loisir et hédonisme priment.
Le monde d'après ? Utopie touristique
Le secteur touristique revient pourtant de loin. Après une croissance ininterrompue depuis 65 ans (chiffre d'affaires multiplié par 45), la crise sanitaire a plongé le secteur dans le marasme : chute de 75 % de la fréquentation mondiale, 3 560 milliards d'euros de pertes cumulées en 2020 et 2021. Mais 2022 a marqué une reprise en fanfare avec près de 900 millions de visiteurs à travers la planète (le double de 2021). C'est certes en-deçà de 2019 (1,4 milliard) mais les perspectives sont prometteuses (1,8 milliard attendu en 2030). Seul bémol, pointé par Didier Arino : "De plus en plus de gens ont envie d'être touristes, mais de moins en moins ont envie de travailler dans ce secteur", un constat qui n'a rien de spécifique à la France, relève le spécialiste.
Les territoires de montagne et ruraux, présentés comme de nouveaux eldorados au sortir de la crise, vont-ils continuer à bénéficier de ce regain d'intérêt pour les grands espaces, la nature, le calme... "On nous a vendu un monde d'après très différent, mais tout ça, c'est du bidon !", lâche l'intervenant. Les destinations touristiques privilégiées des Français ressemblent furieusement à celles du monde d'avant : 68 % ont l'intention de partir cet été à la mer, avec un tropisme retrouvé pour la Méditerranée. Et malgré le renchérissement du prix des billets d'avion, 27 % iront à l'étranger soit quasiment autant qu'en 2019.
"On peut tout rater... sauf ses vacances !"
Le Cantal, "destination fabuleuse, verte, avec de l'espace", a cependant toujours une carte à jouer, assure Didier Arino, à condition de se distinguer sur le marché des destinations devenu très concurrentiel par un rapport qualité/prix/expérience élevé, en cernant bien et exauçant les desiderata évolutifs de la clientèle.
Ce qu'attend le touriste ? Vivre une expérience authentique, être acteur de son séjour, voir ses cinq sens stimulés avec des visites interactives, ludiques, des activités créatives voire du "sport adrénaline", il veut comprendre les us et coutumes de son nouvel environnement (tourisme identitaire)... "Les touristes sont prêts à dépenser davantage pour plus de qualité, plus d'expérience... Aujourd'hui, on a le droit de tout rater dans sa vie sauf... ses vacances !", résume l'expert, qui pointe l'importance que la réalité du séjour soit à la hauteur - voire supérieure - à la promesse faite (hébergement, activités...). En glissant que nos contemporains, en politique comme en matière touristique, ne croient plus aux paroles mais jugent sur pièce.
Au passage, Didier Arino souligne également la corrélation entre attrativité touristique et attractivité économique d'un territoire, message important dans un département qui a fait de l'attractivité sa croisade : "Une entreprise comme un travailleur indépendant ou un salarié n'accepte de s'installer sur un territoire, y compris rural, que si il y a des connexions (internet) mais aussi que s'il est attractif d'un point de vue touristique."