Gaec entre époux
Gare à la remise en cause de la transparence
En autorisant le Gaec* entre époux dans le cadre d'un amendement à la Loi de modernisation agricole, les députés UMP ont ouvert la boîte de pandore, au risque selon Maryse Font1, de fragiliser le statut.
L'ouverture du Gaec entre époux constitue-t-elle une réelle avancée ?
Maryse Font : Pour nous, ce n'est pas vraiment une avancée. Au niveau de Gaec et société, nous avons tous été surpris par cet amendement, car à aucun moment nous avons été associés aux discussions. Cette absence de concertation sur un sujet aussi sensible est dommageable.
Comment expliquez ce brusque revirement sur un sujet aussi symbolique ?
M.F. : Les agricultrices en EARL revendiquaient depuis longtemps une modification du statut du Gaec, au titre de la justice sociale et surtout économique. Une évolution pour reconnaître le statut d'exploitants associés était certes nécessaire et, nous étions les premiers à travailler dessus, mais fallait-il aller jusqu'à ouvrir le statut du Gaec aux conjoints, j'en doute. Nous sommes en droit de nous interroger sur l'objectif final d'une telle modification du statut, car derrière cet amendement, c'est le principe de transparence qui risque d'être mis à mal.
C'est-à-dire ?
M.F. : Le choix qui a été fait de permettre à deux époux (concubins, ou partenaires liés par un Pacs) seuls d'être associés d'un Gaec suppose que des garanties soient apportées sur la pérennité de la transparence des Gaec, notamment au regard des aides européennes. Autrement dit, en ces temps de restrictions budgétaires, on a du mal à imaginer que la multiplication des Gaec sera synonyme de multiplication des enveloppes. C'est pourtant bien cela qui est en jeu avec le principe de transparence, exception française qui permet l'attribution de certaines aides aux exploitants qui composent le Gaec et non à la seule société.
Quels points méritent aujourd'hui d'être éclaircis ?
M.F. : Les critères d'agrément vont devoir être précisés pour exiger une activité professionnelle à temps complet sur le groupement, pour apprécier l'adéquation entre la taille économique du groupement et son nombre d'associés et pour conforter l'absence de subordination entre les membres du groupement.
* Groupement agricole d’exploitation en commun.
1. Maryse Font est responsable de l’organisation professionnelle Gaec et société en Massif central.
Repères
Le Gaec* désigne une société civile de personnes qui permet à des agriculteurs associés de réaliser un travail en commun dans des conditions comparables à celles qui existent dans les exploitations de caractère familial. Regroupant de deux à dix associés, le Gaec constitue aujourd'hui la première forme sociétaire agricole (même si l'on constate une diminution de cette forme d'association au profit, par exemple, des EARL) : on en compte actuellement plus de 42 000, regroupant plus de 100 000 associés. Le succès du Gaec est notamment dû au fait que cette forme sociétaire est régie par le principe de transparence qui permet à chaque associé de bénéficier du même traitement que celui qui est habituellement réservé aux exploitants individuels.