Détresse morale et économique pour les céréaliers creusois
Une délégation de la section grandes cultures de la FDSEA de la Creuse a rencontré Monsieur le Préfet vendredi 21 octobre pour lui remettre une motion alarmant une fois de plus l’État sur le contexte agricole.
Le conseil d’administration de la section grandes cultures s’est réuni vendredi 14 octobre afin de faire l’état des lieux de la récolte 2016. Les membres de la section ont pris la décision d’écrire une motion afin de faire entendre leurs revendications. Un rendez-vous a été fixé avec M. le Préfet vendredi 21 octobre afin d’aborder la situation catastrophique des exploitations et le durcissement des normes agro-environnementales.
Récolte 2016
Cette année, le constat est unanime : les rendements sont en baisse de 30 à 50 % et les grains de petites tailles. C’est la deuxième année consécutive de mauvaises conditions climatiques avec un printemps pluvieux, une sécheresse pendant l’été sans oublier un épisode de grêle fin mai. Didier Dhume, président de la section grandes cultures explique : « cette année, c’est la double peine ! Nos rendements sont catastrophiques alors que la récolte mondiale est excellente, ce qui va entraîner une baisse du cours des céréales ». « La crise des céréales finit d’impacter la crise de l’élevage, l’un ne va pas sans l’autre dans un département comme le nôtre » intervient Christian Arvis. Il manque 300 à 400 euros par hectare sans prendre en compte la rémunération de l’exploitant. Les trésoreries suffoquent. Les représentants de la profession agricole craignent « des drames économiques et humains d’ici six mois à un an ».
Sécheresse
Les membres de la délégation grandes cultures ont profité de cette rencontre pour rappeler au préfet que les céréaliers du département ont été écartés du dispositif d’indemnisation dans la cadre de la sécheresse 2015. Leur production céréalière est considérée comme production principale alors qu’ils possèdent eux aussi du cheptel qu’ils doivent alimenter. De plus, ils alarment sur la situation actuelle « la sécheresse 2016 va encore plus impacter les exploitations que celle de 2015 si on regarde le bilan fourrager. Une seule coupe de foin a été récoltée et les stocks de fourrages sont mis à mal. Les agriculteurs ayant dû affourrager plus tôt pour alimenter leurs animaux à cause du non-reverdissement des prairies ». Concernant la demande d’obtention d’une dérogation suite à la non levée des dérobées comptabilisées comme Surfaces à intérêts écologiques (SIE), le préfet déclare qu’à plusieurs reprises il en a fait la demande auprès du ministère de l’Agriculture. Cette dérogation n’a pas été obtenue car il est prévu dans les textes qu’aucune pénalité ne soit appliqué en « alignement sur la réalité du terrain » atteste M. Debray, directeur adjoint à la DDT, présent lors de cette rencontre. Les représentants de la profession estiment qu’« il aurait fallu le savoir à l’avance ainsi les agriculteurs n’auraient pas implanté ces dérobées. » « Nous savions qu’elles ne pousseraient pas compte tenu des conditions climatiques. Nous étions contraints de semer pour ne pas être pénalisés dans le cadre du verdissement de la PAC ». De plus, les agriculteurs mettent en place des légumineuses et des couverts végétaux depuis longtemps, ils n’ont pas attendu le « volet vert de la PAC » pour mettre en place des dérobées.
Arrêté « phyto » 2006
« La parole du Premier ministre est remise en cause : l’été dernier, M. Valls avait annoncé l’arrêt des normes en agriculture. Hors aujourd’hui nous découvrons un nouveau projet d’arrêté sur les zones non traités (ZNT) proposé par les ministères de l’Agriculture, de l’Environnement et de la Santé qui est irréaliste » s’exclame Christian Arvis, secrétaire général de la FDSEA. « Les distances avec les dispositifs antidérive doivent rester à 5 m et non de 20 m en cultures basses (céréales) et 50 m en cultures hautes (arboriculture) comme proposé dans le futur arrêté, et uniquement le long des cours d’eau, et non le long des haies et des lisières de bois comme envisagé ».
Cette modification n’est pas envisageable pour un département en bocage comme la Creuse, ceci amènerait à une diminution très importante des surfaces en cultures. Un agriculteur argumente « le schéma agro-écologique idéal est le système polyculture élevage à dominance herbagère comme chez nous, là ils sont en train de détruire ce modèle. À croire que l’on nous fait payer le fait d’avoir conservé nos haies alors que d’autres les ont supprimés depuis longtemps ».
Les agriculteurs ont pleinement conscience des enjeux sociétaux de leur métier : « ne pas traiter le long des cours d’eau c’est normal ! ». Ils utilisent des outils d’aide à la décision afin d’utiliser le minimum d’apports phytosanitaires car ces traitement sont coûteux autant financièrement que sanitairement. « Au niveau des indices de fréquences de traitements (IFT) nous sommes déjà au strict minimum, nous faisons un à deux fongicides et un désherbant alors que certaines régions atteignent 6 passages. » Mais il ne faut pas que la société oublie que « plus d’agriculteurs signifie plus d’aménagement du territoire ».
Le Préfet s’est montré très attentif lors des échanges avec les représentants de la profession agricole, il est pleinement conscient des enjeux et s’est engagé à faire remonter leurs demandes.