Des agriculteurs mitigés face aux annonces du gouvernement
1 700 tracteurs et près de 7 000 éleveurs ont convergé vers Paris le 3 septembre pour porter leur malaise devant le gouvernement français. Un malaise qui n’a été que partiellement entendu selon les responsables syndicaux limousins qui avaient fait le déplacement.
Tôt dans la matinée jeudi dernier, trois bus du Limousin rejoignaient les autres convois d’agriculteurs venus de toute la France au péage de Saint-Arnoult. En tout, près de 7 000 agriculteurs et 1 700 tracteurs s’étaient donné rendez-vous. Un chiffre rarement atteint de mémoire de syndicaliste agricole. Première étape du périple pour une partie d’entre eux, l’Assemblée nationale, où une délégation a été reçue par Claude Bartolone. Les manifestants restés à l’extérieur ont été rejoints par des députés venus à leur rencontre. Pour le Limousin, une seule député présente : Sophie Dessus, représentante de la Corrèze. Pendant ce temps, le reste du convoi prenait la direction de la Place de la Nation dans une grande opération escargot. Le périple, qui a duré la matinée, a permis aux manifestants de croiser les parisiens, qui, visiblement, leur avaient réservé un bon accueil. « Les gens semblaient de tout cœur avec nous », témoigne Christophe Lechevallier, secrétaire général de la FDSEA 87. Un point de vue confirmé par une étude d’opinion diffusée le matin même de la manifestation et où l’on apprend que 84 % des personnes interrogées déclarent « comprendre » l’action des agriculteurs, et même la « soutenir » pour 65 % d'entre elles. L’organisation de la journée, saluée par tous, n’a laissé la place à aucun débordement. « C’était une belle démonstration de force et sans casse » a conclu Pascal Lerousseau, président de la FDSEA 23. L’après-midi, place de la Nation, les témoignages des départements sur la crise actuelle se sont succédés jusqu’à l’arrivée du président de la FNSEA, Xavier Beulin et du président de JA, Thomas Diemer, venus exposer les annonces faites suite à leur rencontre avec le Premier ministre. Celles-ci ont été plus ou moins bien accueillies par les manifestants qui ont toutefois commencé à regagner leurs régions en milieu d’après-midi, dans le calme. Fait notable à signaler, le relevé de décisions de la rencontre, habituellement fait dans les jours qui suivent, a été cette fois fait et signé au cours de la rencontre, témoignant de la volonté d’engagement des pouvoirs publics. Quelques jours après cette manifestation, les mesures annoncées laissent un peu les responsables régionaux sur leur faim. « Certaines mesures paraissent intéressantes mais il va falloir être très attentifs et participer à leur mise en œuvre, déclare Daniel Couderc, président de la FDSEA 19. Nous avons le sentiment d’avoir été écoutés mais pas forcément entendus ». Même son de cloche à la FDSEA 23 : « le gouvernement paraît avoir compris qu’il y a un malaise dans le monde agricole, explique Pascal Lerousseau, mais sans mesurer vraiment l’ampleur de la crise. Nous devons rester vigilants ». Les responsables de Corrèze, Creuse et Haute-Vienne pointent du doigt l’effet à court terme des mesures prises, comme l’explique Christophe Lechevallier : « les mesures sont avant tout conjoncturelles. C’est déjà quelque chose mais cela ne suffit pas sur le long terme ». Pascal Lerousseau renchérit : « les agriculteurs en ont assez de contracter des prêts pour en rembourser d’autres. Tant que prix et coût de production n’iront pas de pair, on n’y arrivera pas ! ». Un point positif est à relever toutefois, c’est la pause accordée quant à la prise de nouvelles normes environnementales. « C’est un soulagement pour les agriculteurs » indique Christophe Lechevallier. Pour Daniel Couderc, il faut surtout rester mobilisés. « Notre rassemblement a porté ses fruits. Le gouvernement a donné une impulsion, à nous de vérifier que les annonces seront suivies d’effets. Le travail syndical doit continuer », termine-t-il. La mobilisation perdure bel et bien puisque les agriculteurs français étaient nombreux à Bruxelles le 7 septembre, en marge de la rencontre des ministres de l’agriculture européens. « À Bruxelles, nous attendions des prix et des soutiens pour nos laitiers. Nous avons obtenu 500 millions d’euros au total mais face à tout ce qu’ont perdu les laitiers, la part qui leur revient, reste insuffisante » retrace Christophe Lechevallier, présent à Bruxelles.