De la moutarde "made in Haute-Loire" dans votre assiette
À Polignac, un agriculteur se lance dans la culture de la moutarde brune en vue de fabriquer le fameux
condiment tant utilisé en cuisine. Unique en Haute-Loire !
À Polignac, un agriculteur se lance dans la culture de la moutarde brune en vue de fabriquer le fameux
condiment tant utilisé en cuisine. Unique en Haute-Loire !
La diversification agricole se poursuit en Haute-Loire. Après les veaux des Monts du Velay et autres fruits rouges en leurs temps, arrivent de nouvelles productions, à l'image de la culture de la moutarde brune transformée en condiment, qui prend place au Domaine des Adrets, dans le petit village de Communac à Polignac.
L'initiative est celle de Bruno Nozi, un agriculteur qui a dû se séparer de ses troupeaux pour des raisons de santé, et qui a choisi la culture de la moutarde avec l'idée de la transformer en condiment à consommer et à utiliser en cuisine.
Pénurie de moutarde
Après des études agricoles au lycée de Bonnefont et à l'ISVT, Bruno Nozi s'est installé en hors cadre familial en 2002 avec 400 brebis, sur 41 ha auxquels il faut ajouter 8 ha en propriété. 10 ans plus tard, des problèmes de dos l'obligent à changer de production ; il se tourne alors vers les porcs bio qu'il doit aussi stopper quelques années plus tard pour les mêmes raisons. L'éleveur, qui tient malgré tout à rester agriculteur, entre alors en réflexion pour trouver une activité de production un peu moins physique. S'il a dû faire une croix sur l'élevage, il lui restait les cultures à explorer... "N'ayant plus d'animaux à nourrir, j'ai remplacé la luzerne par de la moutarde blanche (comme engrais vert au printemps). Les 5000 m2 que j'avais semés ont donné 200 kg de graines " explique-t-il. La pénurie de moutarde que la France a connue en 2021-2022 a aussi contribué à motiver Bruno à se lancer dans la culture.
La moutarde blanche (voir encadré) donnant un goût un peu plus amer (après essai en 2022), l’agriculteur a opté pour de la brune, la variété la plus utilisée en France et au Canada. En 2023, il en sème 3 ha sur une parcelle réputée "aride", au-dessus du village ; il récolte 500kg de graines triées/ha, un volume insuffisant comparé aux rendements compris entre 1 et 1,5 tonne/ha en Bourgogne... La récolte de ses 5 ha semés en 2024 devrait être meilleure...
Moutarde "La Véritable"
Du point de vue technique, Bruno a avancé seul dans son projet. Des recherches personnelles via des tutos sur internet, une formation de 8 jours suivie à Florac (48) sur le vinaigre et la moutarde et la visite d'une entreprise de moutarde à Beaune, lui ont permis d'acquérir les bases de la culture et de la fabrication du produit. Car hormis la culture qu'il faut réussir, il faut aussi disposer d'une recette de fabrication pour transformer les graines en moutarde...
Après plusieurs essais et dégustations de fin 2022 à aujourd’hui, il tient enfin sa recette de moutarde fine et à l'ancienne et projette même de la décliner en moutardes aromatisées.
Son objectif final étant de proposer la moutarde la plus naturelle possible : sans conservateur, ni colorant, ni additifs, ni traitements de semences. Une moutarde du champ à l'assiette, qui se prénomme "La Véritable" !".
Bruno est plutôt confiant quant à l'adaptation de la culture au climat et au terroir de Haute-Loire. "Vu que la plante craint le gel, je réalise les semis après les Saints de glace. Elle présente une bonne résistance à la sécheresse et n'est pas trop gourmande en apport organique et minéral (car elle est utilisée comme engrais vert). La moutarde n'est pas trop exigeante en matière de sol et d'exposition".
Une fois que le plant a jauni et qu'il a perdu ses feuilles, il est temps de récolter au moyen de la moissonneuse-batteuse. Bruno Nozi a choisi de faire appel à une ETA pour réaliser cette étape. Une fois passée au séparateur, pour ôter tout déchet, la récolte de grains est ensuite stockée en container pendant 1 ou 2 mois. Les grains sont transformés en moutarde à la demande pour des raisons de respect de dates limites de consommation.
Les surfaces de son exploitation n'étant pas extensibles, Bruno pense racheter la récolte de voisins agriculteurs qui se montrent intéressés par la culture. Il faut dire que les cours de la moutarde peuvent être très tentants à raison de 1500€-2000€ la tonne !
Conserver la valeur du produit
L'agriculteur a bien sûr réfléchi à la commercialisation de ses moutardes qu'il entend écouler d'abord en Haute-Loire au sein d'épiceries fines, de supermarchés, de la restauration et à la ferme ; un projet de construction d'un laboratoire pour cet automne lui permettra de transformer et de vendre sur la ferme. L'exploitation, qui fait partie de la route des producteurs du Velay créée par l'office de tourisme de la communauté d'agglomération du Puy-en-Velay, est de surcroît tout près du chemin de St Jacques de Compostelle.
"Je souhaite conserver toute la valeur du produit et être en contact direct avec le consommateur" explique-t-il.
Les premières ventes de la moutarde "La Véritable" auront lieu cette année au mois d'octobre, notamment à l'occasion du salon Les Halles du Velay à Espaly-St Marcel.