Carrefour fait un pas vers des prix plus rémunérateurs
Suite au blocage de l’hypermarché le samedi 22 mai à Brive, la FDSEA et les JA de Corrèze ont obtenu un deuxième rendez-vous avec les dirigeants du groupe Carrefour.
François Vincent, récemment nommé directeur marchandises alimentaires chez Carrefour France, s’était engagé à rencontrer les éleveurs afin de mieux cerner leurs revendications. La promesse a été honorée ce samedi 19 juin à Brive. Le dirigeant était accompagné de Bertrand Eon, directeur national boucherie, tandis que la FDSEA et les JA de Corrèze avaient convié leurs collègues de Creuse et de Haute Vienne. Après un passage éclair à l’abattoir de Saint Viance, c’est autour de la table que les parties ont échangé dans l’objectif d’avancer sur la construction d’un prix plus rémunérateur pour les producteurs.
Changer la nature des relations commerciales
À l’issue d’une présentation de l’agriculture limousine et de l’élevage bovin en particulier, les responsables syndicaux ont mis en cause le rôle de la grande distribution en général dans la destruction de valeur. La guerre des prix entre enseignes et l’incapacité du monde agricole à imposer ses prix a en effet conduit à ce que la rémunération de l’éleveur devienne la variable d’ajustement du marché. Si les producteurs en souffrent, la production aussi désormais, avec une menace de court terme pour la souveraineté alimentaire du pays et la sauvegarde du tissu industriel agroalimentaire.
Pour les organisations syndicales, l’objet d’une rencontre directe entre producteurs et distributeurs est de sortir du jeu de dupes qui caractérise les relations commerciales. D’un côté, des GMS qui scandent « augmentez vos prix, nous achèterons plus chers » ; de l’autre, des intermédiaires qui déclarent « si j’augmente mes prix, on menace de me déréférencer ». Qu’à cela ne tienne ! Tant que la distribution s’engage sur un retour au producteur, le reste suivra…
Une solution globale
FDSEA et JA ont rappelé aux représentants de Carrefour qu’ils n’étaient pas la seule enseigne en cause et que toutes ont été ou seront rencontrées car les organisations syndicales sont à la recherche d’une solution générale pour les quelques 200 000 animaux finis produits chaque année sur le territoire limousin. « Acheter de temps en temps une vache locale à bon prix, c’est bien. Mais si cela sert de prétexte pour casser les prix sur la marchandise restante et qui représente l’essentiel des volumes, alors cela ne résoudra rien. C’est bien une stratégie globale que l’on recherche. Une méthode de construction du prix à la fois universelle, lisible, juste, adaptée à tout type de bovin et conforme à la loi. Et cela passera par la contractualisation ». C’est dans cet esprit que les FDSEA et JA ont présenté à Carrefour la formule travaillée en Corrèze dite « de prix exigible », et établie dans les principes de la loi EGALIM.
Un bon point pour Carrefour
Il n’est pas commun de lire dans L’Union Paysanne des mots tendres à l’intention de la grande distribution mais les représentants des éleveurs ont bien identifié des signes positifs dans la politique que Carrefour entend mener. Même si la pression des producteurs et la loi n’y sont pas pour rien, et même si bien des divergences de points de vue persistent, cela mérite d’être souligné.
Le groupe prévoit de contractualiser à 100 % et en direct avec les OP l’approvisionnement de son rayon boucherie traditionnelle. Abatteurs et transporteurs deviennent alors des prestataires de service. La construction du prix intègre bien les coûts de production officiels mais les représentants syndicaux ont signifié leur désaccord sur la manière de rémunérer la qualité, notamment le classement carcasse.
Carrefour travaille également sur le développement de sa filière génisse Prim’herbe pour son rayon libre-service, avec là encore une contractualisation directe avec les OP mais sur la base d’un coût de production qui n’a pas emporté l’adhésion des éleveurs, car « autoconstruit ». Un important travail reste à mener sur les approvisionnements en « piécés », principalement issus du jeune bovin ou du troupeau laitier, qui pour l’heure ne font l’objet d’aucune contractualisation, et donc sans transparence sur le prix effectivement payé au producteur.
Cette rencontre a donc permis d’identifier les principaux points de divergence et Carrefour s’est engagé à revenir dès la rentrée pour les retravailler avec les éleveurs.